jeudi 28 avril 2011

Le mauvais chemin de Damas

Editorial par Jean-Paul Piérot
Le président syrien Bachar Al Assad commet les mêmes fautes que ses ex-homologues tunisien et égyptien. À l’expérience, pourtant, les événements qui ont emporté Ben Ali et Moubarak auraient dû être médités à Damas avec davantage de sagesse. Si le régime du parti Baas s’imagine trouver son salut dans une répression meurtrière, il court le risque de deux défaites : soit être renversé par l’insurrection, soit, au cas où il parviendrait à se maintenir au prix de la terreur, se discréditer définitivement auprès de son propre peuple. Ce serait alors un pouvoir en sursis, un régime aux abois.
En fermant le pays aux journalistes étrangers, le gouvernement de Damas croit circonscrire et contrôler l’information. C’est encore un mauvais calcul. À l’heure où le moindre internaute, le plus modeste manifestant peuvent prendre des images furtives sur leur téléphone portable et les transmettre au monde entier, l’interdiction faite aux journalistes d’exercer leur mission laisse la voie libre à toutes les approximations.
L’histoire en cours
 a déjà livré au moins
 un enseignement : la peur
 peut faire reculer pendant
 un temps limité une
 jeunesse éprise de liberté.
 Une fois que cette étape
 est dépassée, le recours
 à la violence d’État 
ne peut que se retourner 
contre ceux qui en usent et les oblige à en faire 
toujours davantage, accroissant leur isolement. On a évoqué la chute de Ben Ali et de Moubarak, on observera que le seul autocrate à parvenir à se maintenir en place malgré la rébellion populaire est Kadhafi. Faut-il y voir l’effet de l’intervention armée de l’Otan ? La question vaut d’être posée.
La Syrie occupe dans le Proche-Orient une place
 importante et singulière avec, au nord, la Turquie 
et la proximité de l’Europe, à l’est, l’Iran et l’Irak, au sud,
 Israël (qui occupe toujours le Golan syrien). On sait 
le rôle que Damas a joué dans la crise qui a secoué le
 Liban, culminant avec la guerre civile des années 
quatre-vingt. Et comme le Liban, et dans des proportions
 plus vastes, cette ancienne province de l’Empire ottoman
 devenue «protectorat français» jusqu’en 1946 
et, depuis son indépendance, l’une des principales voix 
du nationalisme arabe, fédère de nombreuses communautés, ethniques (Arabes, Kurdes, Arméniens, Tcherkesses, Bédouins) et religieuses (musulmans 
sunnites, chiites, alaouites et chrétiens de toutes les 
églises). En restant sourd aux revendications en faveur 
de réformes démocratiques, le régime baasiste met en
 danger la stabilité du pays. Or l’opposition démocratique
 tient à cette stabilité et ses exigences ne sont pas teintes de ce coloris islamiste qui avait marqué les émeutes,réprimées dans le sang à Hama en 1982 par Hafez Al Assad.
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