mardi 28 juin 2011

Etienne Balibar : « les grandes mobilisations doivent traverser les frontières  »

Le projet politique européen est moribond. Les populismes galopent, nourris par la faiblesse d’une gauche qui peine à se faire entendre. Entre l’effondrement et la refondation, l’Europe est à la croisée des chemins. Rencontre avec le philosophe Etienne Balibar.
Regards.fr : Vous interrogez la « fin » de l’Europe comme projet politique. Vivons-nous un moment spécifique de l’histoire de la construction européenne ?
Etienne Balibar : Tout à fait. Sans prétendre lire dans le marc de café et prophétiser des évolutions qui ne se produiront peut-être pas, plusieurs scénarios sont possibles. L’Union européenne a connu des tournants dans l’histoire de sa construction, qu’il s’agisse d’étapes nouvelles, comme l’épisode de la constitution manquée de 2005, ou des élargissement successifs, surtout aux anciens pays socialistes. Ces tournants sont déterminés à la fois par des processus intra-européens et des transformations géopolitiques, économiques ou culturelles mondiales. L’Europe est un équilibre entre son intérieur et son extérieur. Entre la signature du traité de Rome et 2005, tous les moments critiques ont apparemment été surmontés. Ils ont même paru servir au renforcement du projet politique européen plutôt qu’à son affaiblissement ou à sa remise en question. Il s’est développé une double mythologie. La première, c’est le caractère irréversible de la construction européenne qui correspondrait à une sorte de nécessité historique. La seconde, c’est que les conflits entre les différents Etats-nations qui semblent constituer des éléments de blocage finissent toujours par servir à résoudre la crise. Cette mythologie extrêmement simplificatrice, qui correspond à l’idéologie officielle de la technocratie européenne pro-libérale, n’est plus tenable. Quand il y a un an j’ai pris le pari avec quelques autres de dire que la construction européenne était en proie à une crise existentielle qui remettait en question le projet politique lui-même, cela pouvait paraître imprudent. Aujourd’hui, c’est devenu au contraire un lieu commun.
Regards.fr : Comment définiriez-vous cette crise ?
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