samedi 28 avril 2012

L’historien Stéphane Sirot : "Une forme d’instrumentalisation inédite dans l’histoire"

Stéphane Sirot pointe une dérive inquiétante, sans précédent, de la part de la droite républicaine : la dénonciation systématique et violente des syndicats.
L’opération politique consistant à détourner le 1er Mai n’est pas une nouveauté dans l’histoire…
Stéphane Sirot. Ce qui n’est pas nouveau, c’est que le 1er Mai s’invite dans un processus électoral. En 1936, entre les deux tours des législatives qui ont porté Blum au pouvoir, il a déclenché la vague de grèves que l’on connaît. Le 1er Mai 1950, de Gaulle a organisé un grand rassemblement à Bagatelle, avec un discours sur la question de la participation. L’habitude prise par le Front national de se réunir le 1er mai pour fêter soi-disant Jeanne d’Arc remonte au 1er mai 1988, lendemain de la présidentielle où Jean-Marie Le Pen avait fait près de 15 %. Et le 1er Mai 2002, on se souvient de ces manifestations au lendemain de la qualification de Le Pen pour le second tour. Ce qui est beaucoup plus particulier, c’est qu’on n’a jamais eu cette forme d’instrumentalisation entre les deux tours de l’élection par le candidat de la droite républicaine, organisant une espèce de contre-manif qui vise à être un contrepoids aux syndicats. C’est inédit, et ça s’inscrit dans le contexte de la poursuite et de la radicalisation du discours que porte déjà, depuis le début de sa campagne, Nicolas Sarkozy à propos de la dénonciation très violente du rôle des contre-pouvoirs, des syndicats en particulier, et au lendemain d’un premier tour où le FN a fait 18 %. Cela me semble être une dérive inquiétante, surtout dans un contexte où on sent bien que le champ politique français, particulièrement celui de sa partie droite, dérive vers une démarche 
à l’autrichienne.
Quand l’UMP se recommande 
de la défense du «vrai travail», 
cela n’évoque-t-il pas une période sombre de l’histoire ?
Stéphane Sirot. Le dernier chef 
de l’État qui, en France, a cherché, de cette façon-là, à instrumentaliser le 1er Mai, c’est Pétain en 1941 avec la « Fête du travail 
et de la concorde sociale ».
 Sans avoir besoin d’aller jusqu’à une comparaison historique, c’est tout à fait logique puisque 
la démarche n’est pas tellement 
de s’inscrire dans une tradition 
– on n’est plus sous Pétain. Mais à partir du moment où on veut attirer un électorat d’une extrême droite dont la rhétorique est volontairement marquée historiquement, alors, on en arrive à tenir ce propos.
Ne faut-il pas rappeler l’origine historique du 1er Mai ?
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