mercredi 6 novembre 2013

L’enjeu de l’ADN

par Maurice Ulrich
L’affaire de Roanne a une portée hautement symbolique et, au sens fort, politique. Les cinq militants syndicaux poursuivis le savent et 
ils l’assument, quand bien même ils en paient le prix. Il est lourd, en termes de stress, de vie familiale, d’humiliation et de colère.
Le point de départ, on le sait, c’était, il y a trois ans, quelques tags hostiles à Nicolas Sarkozy et au député UMP local pendant les luttes contre la réforme des retraites. Mais le point où ils en sont aujourd’hui, où nous en sommes, car cela nous concerne tous, c’est, pour le résumer, le fait qu’un simple test ADN est devenu un enjeu de lutte des classes. C’est parce qu’ils le refusent qu’ils sont aujourd’hui poursuivis et que la CGT appelle à faire de cette journée 
du 5 novembre, à Roanne, une journée pour les libertés.
C’est que, en réalité, au-delà d’un inacceptable acharnement antisyndical, démesuré au regard 
des faits, ce pourquoi du reste la cour d’appel de Lyon les avait jugés coupables mais pas condamnables, il s’agit de cette question : l’action syndicale, collective, peut-elle faire l’objet d’un fichage qui, créé au départ pour mieux lutter contre les délits sexuels, viols et autres, n’a cessé de s’étendre à d’autres infractions et délits ? Et il faudrait aujourd’hui que des militants acceptent de s’y soumettre, d’être considérés comme des délinquants potentiellement récidivistes ? Avant eux, d’autres syndicalistes ont refusé, légitimement, de s’y soumettre, avec la même conscience de l’enjeu. Le patronat et son personnel politique n’ont jamais renoncé à considérer 
les syndicalistes comme des empêcheurs d’exploiter en rond, en tentant pour cela de les faire passer pour 
des fauteurs de troubles. « Des salopards en casquettes », disaient-ils au moment 
du Front populaire. En d’autres termes il faudrait que 
les salariés subissent les patrons voyous, les licenciements boursiers, les OPA et autres rachats, les régressions sociales, la remise en cause des acquis de décennies 
de luttes ouvrières, en discutant bien sagement, comme 
des images, les conditions de leur soumission. Alors, disons-le bien clairement, au risque d’être taxés d’archaïsme ou de ce qu’on voudra : l’exploitation capitaliste est déjà une forme de contrainte exercée 
sur ceux qui n’ont pour vivre que leur force de travail.
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