Côté militants, la stratégie à suivre quant à la candidature de Jean-Luc Mélenchon fait débat.

Savourant sa pause clope, elle exhibe un briquet où est représenté Che Guevara. Laura a 27 ans et, malgré sept ans d’adhésion au PCF (Parti communiste français), c’est la première fois qu’elle se rend à son université d’été annuelle. Elle a hâte d’écouter l’allocution de Pierre Laurent, secrétaire national du parti, prévue à midi dans les locaux de la fac d’Angers, où a lieu l’événement cette année : «Pour moi, c’est notre candidat pour 2017.» Pour autant, elle ne pense pas qu’il se présentera au scrutin présidentiel, «car s’il le fait il fera 4%, donc je vais sans doute voter Mélenchon même si je n’ai pas aimé sa façon d’agir».
Là est l’un des débats qui agite le PCF depuis quelque temps : donner éventuellement sa voix à l’ex-président du Parti de gauche, parti en cavalier seul avec sa «France insoumise» et porteur d’idées communes avec le PCF - mais coupable d’avoir quitté le Front de gauche de façon peu appréciée - ou refuser le vote «utile» et préférer un candidat made in parti communiste. Alors, après les différents ateliers et conférences organisés le matin, il y a foule pour le discours de Pierre Laurent.

Accueilli par une ovation des adhérents et sympathisants, il se dresse sur l’estrade dans sa chemisette rose. Sa voix est un peu enrouée, après son passage aux journées parlementaires d’Europe-Ecologie-les-Verts, à Lorient, la veille. Vu son discours du jour à Angers, on comprend qu’il n’était pas en Bretagne par hasard : Pierre Laurent appelle à la mise en place d’un «pacte commun possible pour une alternative de gauche en 2017», que le PCF souhaite «soumettre à une grande votation citoyenne en octobre.» 

«Nous ne pouvons nous payer le luxe de la dispersion»

«Je vous demande de ne pas brader la grande ambition collective de changer les choses […] contre les moins grandes ambitions, personnelles et partisanes, toutes légitimes qu’elles soient.» Comprendre : rassembler les forces de gauche «alternative» - hors PS, donc - autour d’un candidat commun, plutôt que de se présenter en rangs dispersés. A la fin de sa prise de parole - et après une Internationale chantée avec conviction - il confirme ce point de vue : «Dans le climat politique actuel, nous ne pouvons nous payer le luxe de la dispersion.»
Et d’estimer qu’«il y a du commun entre nous», citant tour à tour Arnaud Montebourg, Benoît Hamon ou encore les Verts - tout en rappelant qu’il «n’est pas question pour le PCF de déserter l’arène présidentielle». Mais quel candidat en ressortira ? «Je ne suis pas devin, mais, si ce pacte commun se met en place, nous serons ouverts en tout cas à tous les modes de désignation. Il n’est pas trop tard pour que ça se passe.»
Un avis pas vraiment partagé par une militante rencontrée à la fin de son discours : «Ce rassemblement est souhaitable, mais, selon moi, ça sera trop juste pour y arriver avant 2017.» D’autres y croient, à l’image de Stéphane, jeune de 21 ans qui sert le café à la buvette et pour qui «c’est la seule stratégie viable». Avec ses camarades, il chante devant la cafétéria, drapeaux du PCF dans le vent. Peu avant, on rencontrait Vincent et son chien Loki, assis tranquillement dans l’herbe. Le jeune homme n’a pas d’avis tranché : «Mélenchon, Montebourg… Je ne peux pas les saquer. Mais si jamais on partait seuls, on ferait un bien moins bon score… En même temps, cela nous permettrait d’avoir une meilleure visibilité, notamment pour les élections législatives.»
Dans une vision plus court-termiste, Pierre Laurent l’a rappelé, son «appel à tous est pressant». Dimanche, à Toulouse, Jean-Luc Mélenchon y répondra-t-il ?
Amélie Quentel