vendredi 10 mars 2017

Conflits d’intérêts : comment expulser le CAC 40 du Parlement

François Fillon n’est pas un cas isolé. La collusion entre les multinationales et les parlementaires est très fréquente. Mais ces conflits d’intérêts sont encore peu sanctionnés. Jusqu’au mois de mai ?
François Fillon n’a pas tort sur un point. Il n’est, c’est vrai, pas le seul parlementaire à avoir confondu l’intérêt général avec ses propres intérêts familiaux. Environ 20 % des députés ont embauché des membres de leur famille, selon un décompte effectué par le Monde. « Le débat public se focalise trop sur la personne de François Fillon. Il privilégie une approche moralisatrice plus qu’une approche systémique : on dénonce les agissements d’un élu, mais on ne remet pas en cause l’existence d’un système de non-contrôle qui permet ces dérives », alerte Benjamin Sourice, auteur d’un Plaidoyer pour un contre-lobbying citoyen.

Les députés-avocats, une espèce particulièrement répandue

Vendre ses services de consultant aux plus grandes entreprises du CAC 40 n’est pas, non plus, le domaine réservé du député de Paris. Luc Chatel avait, lui aussi, créé sa société de conseil quelques jours avant son arrivée au Palais-Bourbon, en mai 2012, ce qui lui a permis d’échapper à la loi sur la transparence de la vie publique. Celle-ci interdit en effet à un parlementaire de créer une société de conseil pendant son mandat. L’ex-ministre de l’Éducation nationale a ainsi touché 183 135 euros en 2013. Le sénateur Gérard Longuet, autre soutien indéfectible du candidat de la droite, a gagné jusqu’à 42 000 euros par an pour ses activités de conseil, à la tête de son entreprise Sokrates Group. Sans même parler des députés-avocats, une espèce particulièrement répandue, puisqu’on en trouve une cinquantaine dans les travées de l’Assemblée.
Des situations de conflits d’intérêts objectives, mais qui ne sont pas, en l’état actuel du droit, illégales. Seuls la corruption et le trafic d’influence, qui consiste pour un dépositaire des pouvoirs publics à recevoir des dons en échange d’avantages ou de passe-droits, constituent un délit. Même chose pour la prise illégale d’intérêt : un fonctionnaire ou un agent public ne peut, sous peine de poursuite pénale, travailler pour une entreprise qu’il a surveillée, avec laquelle il a conclu un contrat, sur laquelle il a donné des avis ou proposé des opérations à l’autorité compétente dans les trois ans suivant son départ de la sphère publique.
C’est exactement ce que la justice reproche à François Pérol, président du directoire du groupe Banque populaire – Caisse d’épargne. Son affaire, examinée cette semaine par la cour d’appel de Paris, a été totalement éclipsée par le tintamarre provoqué par l’affaire Fillon. Dommage. Car elle constitue la plus parfaite illustration du mélange des genres entre les grands groupes financiers et la haute administration de Bercy, en particulier au sein de sa direction du Trésor.

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