vendredi 16 mars 2018

Pouvoir d’achat. « Macron, ça suffit de tout casser et de culpabiliser les retraités »

Neuf organisations syndicales comptabilisaient, jeudi après-midi, 161 manifestations dans 95 départements. À Paris, des milliers de personnes ont défilé contre la hausse de la CSG et pour la revalorisation des pensions.
«C’est normal, Mamie, que ta pension baisse, c’est parce qu’elle s’use. » À 84 ans, Josette Riandière La Roche sourit amèrement en racontant l’anecdote. L’expression du député LREM, rapporteur du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS), évoquant dans le Parisien la « génération dorée » des retraités, lui est restée en travers de la gorge. « Nous sommes les enfants de la guerre, nous avons vécu sous la domination allemande, sous les bombes. Je travaillais 44 heures par semaine pour payer mes études… Nous sommes loin d’être favorisés. Notre classe creuse a élevé les baby-boomers. Si je perçois une retraite, c’est parce que beaucoup d’amis sont morts avant moi. C’est ça, la retraite par répartition. »
L’ancienne professeure d’espagnol en faculté, longtemps syndiquée FSU, s’appuie sur sa canne, en attendant que le défilé s’ébranle. À ses côtés, Guy Niel porte une pancarte du collectif citoyen de Gentilly (Val-de-Marne) et enchaîne : « Le gouvernement fait tout pour culpabiliser les retraités, leur demander des efforts de solidarité… Mais aux actionnaires des grandes entreprises qui récupèrent des milliards, on ne leur demande rien, et on leur fait des cadeaux. » Pour se soigner, cela devient difficile. Pourtant, Guy travaille depuis l’âge de 14 ans et peut être fier d’une jolie carrière qui l’a fait évoluer de plombier chauffagiste à ingénieur-conseil. « Celui qui n’a pas les moyens deviendra un sans-dents, comme dirait M. Hollande… »
« Ça suffit de vouloir tout casser », s’insurge ce couple de l’Essonne, triste de ne pas avoir vu l’annonce de la manifestation bien relayée dans les médias. Tous deux ont travaillé quarante-trois ans. Jean-Yves s’est arrêté il y a sept ans. Christine l’a rejoint l’an dernier. Il a suffi d’une année pour voir leurs pensions baisser de 68 euros par mois. « C’est la première manifestation que nous faisons depuis que nous avons commencé à travailler : ça montre notre ras-le-bol ! »

Le gouvernement veut supprimer 120 000 emplois de fonctionnaires

Le gel des pensions, la perte du pouvoir d’achat et maintenant la hausse de 1,7 point de la CSG les révoltent, comme Luis Villemez, qui affiche sa perte de revenu autour du cou. Cet ancien fonctionnaire territorial de 65 ans pointe depuis 2013 la diminution de sa pension : 1 456,94 euros en 2013, 1 409,74 euros en 2015… En 2017, il avait retrouvé son revenu de 2013, mais pour mieux le voir fondre en janvier 2018. Comme son épouse travaille encore et que les calculs se font en lien avec le revenu fiscal de référence qui tient compte des ressources de la famille, le voici ponctionné de 1 014 euros dans l’année. Sa voisine, elle, va perdre 307 euros : « Déjà, je n’achète ma nourriture qu’en promo, et je tiens un petit carnet pour garder la notion des prix et mesurer l’augmentation sur les marques que j’achète. Quand c’est trop, je vais le montrer à l’accueil du magasin : ça me soulage ! »
Près du camion rouge de la CGT du Val-de-Marne, Odette Terrade devise avec ses camarades syndiqués. « Nous aidons déjà nos enfants et nos petits-enfants, nous sommes actifs dans des syndicats, des associations. Nous faisons beaucoup pour la société. Après quarante et un ans de service, on veut encore nous piquer des sous… Le gouvernement peut en trouver ailleurs : le Cice a été donné aux entreprises sans aucune contrepartie sur l’emploi, et on a baissé l’impôt sur les sociétés… Beaucoup d’entreprises ne paient pas leurs cotisations sociales, et le gouvernement veut supprimer 120 000 emplois de fonctionnaires, notamment ceux qui contrôlent ces entreprises. » Cette ancienne sénatrice communiste, retraitée de la finance, sait de quoi elle parle, sortant de la fourgonnette une lettre adressée à Emmanuel Macron, rédigée par l’intersyndicale des neuf organisations qui appellent à la mobilisation. « Je veux que ma pension soit revalorisée et indexée sur les salaires et non pas sur l’inflation, ce qui a conduit à accélérer le décrochage du pouvoir d’achat des retraités. Comme des millions de retraités, je dis : “C’est assez” », peut-on lire sur l’adresse censée être relayée par les parlementaires du Val-de-Marne.
« C’était important d’être là aujourd’hui, conclut Guy Niel. Et les autres jours à venir ! Va falloir lui secouer les bretelles à Macron et lui montrer que le peuple sert à quelque chose ! »

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