dimanche 8 avril 2018

Cette gauche qui veut bâtir un front anti Macron

Appels à de grandes manifestations nationales, soutien aux cheminots, esquisse d’unité : la gauche tente de s’accrocher au wagon des cheminots et autres revendications sociales. L’exécutif n’entend rien lui céder et joue l’opinion.

Passer
Des sifflets devant le CHU de Rouen, un échange tendu avec deux infirmières qui interpellent le Président sur la pénurie de moyens à l’hôpital… Le climat social s’est invité hier à la première sortie en province d’Emmanuel Macron, silencieux jusqu’à présent sur le conflit des cheminots et les diverses et éparses grèves et manifestations du moment. « Des protestations tout à fait légitimes qui nécessitent des explications mais ne doivent pas empêcher le gouvernement de gouverner », a lâché le Président. Selon son entourage, il « s’exprimera prochainement ».
Pour le moment, les ministres, dans le sillage du premier d’entre eux Édouard Philippe montent au créneau avec une seule réponse : « On ne lâche rien. » La SNCF sera réformée, les examens dans les facs auront lieu sans attribuer des 10/20 aux grévistes, l’État serrera les budgets et effectifs dans la fonction publique.

« Pouvoir autoritaire »

Face à cette détermination, la gauche hors PS a déclenché la bataille de l’opinion. Le député LFI de la Somme, François Ruffin a lancé hier un appel « à une grande manifestation nationale le 5 mai pour faire sa fête à Macron ». Il réfute pourtant la notion vintage de « convergence des luttes »
Au Tréport (Somme), avec Eric Coquerel, autre député Insoumis, il s’est retrouvé dans un train et une gare avec Benoît Hamon (Génération. s), Olivier Besancenot (NPA), Pierre Laurent (PCF). Convergence des gauches hors PS ? « Face au pouvoir autoritaire, nous devons construire un rapport de force large. La situation n’est plus la même qu’à la rentrée 2017 lors des ordonnances travail. Les Français comprennent que la politique de M. Macron dégrade le service public », ajoute le député PCF Sébastien Jumel qui voit un signal fort « dans les cagnottes réunies pour les cheminots en grève : les donateurs se comptent par milliers » (10 000 sur le site Leetchi pour un don moyen de 34 euros). Cette gauche s’active aussi dans les blocages de 13 universités où les réseaux de Benoît Hamon et d’Olivier Besancenot sont très présents.

L’inconnue de l’opinion

Deux questions lui sont néanmoins posées :
- Peut-elle surmonter ses fractures ?
À l’image des syndicats, ces partis comptent de moins en moins d’adhérents, sont divisés entre eux sur des sujets majeurs (Europe, nucléaire), voire de l’intérieur, sans compter les inimitiés. Exemple : Jean-Luc Mélenchon, peu amène avec Besancenot et Hamon, n’était pas sur la photo au Tréport. Il a lancé sa propre marche le 14 avril à Marseille, « cratère du volcan social français ». Le PS est exclu du mouvement eu égard à la période Hollande, ce qui met à l’écart son réseau d’élus locaux
- P e ut-elle gagner la bataille de l’opinion ?
Comme pour la loi Travail le Président compte sur la majorité silencieuse. Les électeurs LREM, de droite (mais pas du FN) et une majorité qui se définit de gauche approuvent les réformes. Par nature, cette majorité présumée n’est pas visible dans la rue, déjà plus active sur les réseaux sociaux. Ainsi sur twitter #RendsLaFac animé par des étudiants qui veulent aller en cours rencontre un fort succès. Sa cote de confiance reste correcte. Et un dernier sondage Elabe réalisé les 1 et 2 avril révèle un paradoxe : 44 % des Français approuvent la mobilisation des agents SNCF (41 % contestent), mais deux tiers sont favorables à la réforme du statut des cheminots. La suite et l’issue de ce bras de fer à la fois social et politique sont plus que jamais imprévisibles.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire