Hommage à Nelson Mandela
Paris le 9 décembre 2013
Discours de Pierre Laurent, secrétaire national du Parti communiste français.
Madame l'ambassadrice d'Afrique du Sud en France,
Messieurs les ambassadeurs de Palestine en France et auprès de l'Unesco,
Madame Jacqueline Dérens, fondatrice de la Rencontre nationale avec le peuple d'Afrique du Sud,
Mesdames, messieurs,
Chers amis, chers camarades,
Le 7 juin 1990, quatre mois à peine après sa libération, le 11
février 1990, Nelson Mandela se trouvait ici même au siège du Parti
communiste, accueilli par Georges Marchais. Âgé alors de 72 ans, celui
qui n'était pas encore Président de la nation «
arc en ciel »
était venu en frère pour témoigner de sa reconnaissance à notre parti,
et à toutes celles et ceux qui, à ses côtés, avaient embrassé le combat
contre l'apartheid et celui pour sa libération, 27 années d'un combat
inlassable, finalement victorieux, et 42 ans depuis l'instauration de
l'apartheid en 1948.
Aujourd'hui, Madiba n'est plus, il est «
rentré à la maison »,
endeuillant une nation dont les frontières débordent la seule Afrique
du Sud. Nelson Mandela n'a jamais voulu être une icône, lui, dont les
premiers mots à sa sortie de prison, furent : «
Je suis ici devant vous, non comme un prophète, mais comme votre humble serviteur. »
C'est pour honorer cette leçon de combat et d'humilité au service de
l'émancipation humaine, que nous portons à nouveau ce soir à la
boutonnière le badge à l'effigie de Mandela, que nous portions si
fidèlement lors des longues années de lutte pour sa libération.
Ce soir, nous saluons le combat d’une vie, qui fut le symbole de la
lutte collective de tout un peuple. Celle d’un jeune sud-africain avocat
noir, celle du militant de la Charte de la liberté adoptée par le
Congrès du Peuple en 1955, à Soweto, celle d’un révolutionnaire qui fait
le choix de la lutte armée, quand la tyrannie de l'apartheid ferma
toutes les portes de la non violence, celle d’un responsable politique
qui traverse avec courage et sans haine 27 années de bagne et de prison,
celle du premier Président sud-africain élu au suffrage démocratique
non racial, symbole de l'union d'un peuple dans sa lutte pour la
liberté, la paix et une nouvelle Afrique du Sud. Telle fut l’existence
de Nelson Mandela, tumultueuse, faite des peines les plus profondes
comme des joies les plus grandes.
L'hommage le plus sincère que nous pouvons rendre à Nelson Mandela
est d'éviter les artifices d'une canonisation vidée de sens, portant au
pinacle l'homme de la réconciliation et masquant volontairement l'homme
de combat. Nelson Mandela ne fut qu'un. La dureté de sa lutte est
indissociable de son ambition de réunification, fondée sur l'égalité de
tous les Sud-Africains. Il n’y a pas eu d’abord Mandela le
révolutionnaire, puis Mandela le réconciliateur. Il a toujours été les
deux. La lutte contre l’apartheid et la volonté de réconciliation ont
été les objectifs fondateurs de l’ANC qui se battait pour une Afrique du
Sud non raciale rassemblée autour de la justice et des droits
démocratiques pour tous. Mandela est devenu la figure de proue de ce
combat. Mais derrière lui, il y avait une cause, une organisation, la
triple alliance de l'ANC, du Parti communiste sud-africain et de la
Cosatu, et des milliers de combattants. Derrière le nom de Mandela
raisonnent ceux de Walter Sisulu, d'Olivier Tambo, de Joë Slovo, de
Chris Hani, le secrétaire général du PC Sud Africain, sauvagement tué un
an avant l'élection de Mandela, de Desmond Tutu, de Dulcie September,
représentante de l'ANC, lâchement assassinée en plein Paris, et tant
d'autres.... Le sourire de Mandela est une constellation de sourires, de
ces sœurs et frères sud-africains, de ces combattants, de ces
camarades. Nelson Mandela est universel, il est le visage réconfortant,
familier de ceux qui n'abdiquent pas face à la ségrégation, la
discrimination, l'exploitation, l'oppression, de ceux qui tendent la
main, qui rassemblent autour de causes justes qui font l'essence de
l'humanité. Pour tous ces combattants, j’ai ce soir une pensée très
émue.
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