jeudi 29 février 2024

“Ce que Manouchian nous dit sur la nation” – Extrait du discours prononcé lors de l’hommage à Manouchian le 21 février au siège du PCF.


 Missak Manouchian et ses camarades du groupe FTP-MOI n’étaient pas nés en France, mais ils ont permis au pays de rester debout. Aujourd’hui, ces résistants communistes, étrangers, entrent au Panthéon, et avec eux quelques leçons.

Avec Manouchian, nous nous souvenons que la nation est avant tout un projet politique, un contrat. Ce n’est pas qu’une question de frontière ni de nationalité, comme le prétendent les cadres du Rassemblement national, défenseurs d’une vision racialiste et ethnique de la nation. Pour eux, nous faisons partie de la nation si, et seulement si, nous, nos parents et leurs parents avant eux, sommes nés du bon côté de la frontière. Une vision extrêmement pauvre d’une France déclinante. Une petite France. En divisant, les nationalistes se coupent de toute une partie de la nation, pour la détruire quelque part.

Au contraire, la France, la nation de Manouchian, c’est celle qui rassemble les êtres humains d’accord avec trois principes : liberté, égalité, fraternité. Ces valeurs ne se décrètent pas ou ne sont pas à prendre comme acquises, il faut les faire vivre. C’est à ça que servent les services publics, l’école républicaine en tête. La nation, ce sont les services publics. Les libéraux qui s’y attaquent détruisent, eux aussi, une partie de la France.

Une nation où tout le monde trouve sa place, c’est aussi une nation sans exploitation. C’est probablement ce qu’il y a de plus frais dans l’héritage de Manouchian et du CNR, c’est ce qu’il reste à construire. C’est l’avenir de la nation française. Débarrasser la France et particulièrement le travail de l’exploitation, c’est faire la devise du pays 2.0. Comment parler de liberté dans le travail capitaliste ? Puisque finalement, on est juste libre - lorsqu’on en a la chance - de choisir quel patron va nous exploiter. Quelle égalité dans le travail capitaliste ? Puisque la majorité travaille, et une minorité vit du travail des autres. Quelle fraternité dans le travail capitaliste ? Puisque la concurrence entre les travailleurs est sciemment organisée.

Défendons les services publics, débarrassons le travail du capitalisme, c’est le meilleur hommage que nous puissions rendre à Manouchian. Aujourd’hui, Missak Manouchian entre au Panthéon, demain nous continuerons la France.

Assan Lakehoul

secrétaire général du MJCF

Article publié dans CommunisteS, N°985, 28 février 2024.

Précarité : les Banques alimentaires alertent sur le désastre sanitaire causé par la flambée des prix

Obésité, problèmes cardio-vasculaires, diabète… Selon une étude publiée lundi 26 février par la Fédération française des banques alimentaires, 71 % de leurs bénéficiaires déclarent au moins un problème de santé. En cause : la flambée des prix, qui impose restrictions et privations à une part croissante de la population et touche de nouveaux profils, comme les travailleurs pauvres.

En première ligne dans l’aide aux personnes confrontées à la précarité, les Banques alimentaires (79 banques qui fournissent 5 700 associations et centres communaux d’action sociale) livrent une étude très préoccupante sur la dégradation de l’état de santé des publics qu’elles accueillent, de plus en plus nombreux, au sein de leurs permanences.

Présentés lundi 26 février au Salon international de l’agriculture à Paris, les chiffres du premier réseau alimentaire de France révèlent ainsi que le nombre de bénéficiaires a augmenté de près de 30 % en trois ans, soit 2,6 millions de personnes.

Parmi elles, une part croissante de jeunes (+19 % en cinq ans) et de travailleurs pauvres, 17 % des personnes accueillies ayant un emploi, dont une majorité en CDI mais avec un salaire inférieur au Smic. Au cœur de cette hausse et de cette extension de la précarité à d’autres pans de la population : la flambée des prix sur « des produits essentiels pour leur alimentation » (beurre +72 % ; lait demi-écrémé +40 % ; pâtes +30 % ; légumes frais +72 %) qui, selon les Banques alimentaires, a contribué à faire basculer dans la pauvreté des publics jusque-là épargnés.

Plus d’un tiers des personnes ne mangent que deux repas par jour

Conséquence directe de cette crise inflationniste inédite depuis trente ans : un nombre croissant de personnes malades en raison des restrictions alimentaires (plus d’un tiers des répondants ne mangent que deux repas par jour et pour 16 % l’aide alimentaire est la principale source d’approvisionnement pour les protéines, fruits, légumes et légumineuses).

Selon les Banques alimentaires, l’état de santé de personnes accueillies à l’aide alimentaire est moins bon que la moyenne nationale : 71 % des personnes déclarent au moins un problème de santé ; 25 % sont en surpoids ou obésité ; 16 % souffrent de diabète contre 5 % dans la population générale.

Réalisée dans le cadre des ateliers « Bons gestes & bonne assiette », programme de prévention santé à destination des personnes en situation de précarité alimentaire, cette étude menée avec le soutien méthodologique d’Action contre la Faim, a permis aux Banques alimentaires de recueillir les réponses de 140 personnes accueillies, qui ont accepté de répondre individuellement à un questionnaire.

 

mercredi 28 février 2024

Comme l'atteste le document ci-dessous, la proposition de prix planchers a été faite pour la première fois, il y a plus de douze ans, par les députés communistes.


 Dès 2011, André Chassaigne et les députés communistes proposaient des prix planchers pour permettre aux agriculteurs de vivre de leur travail.
En 2024, Macron reconnaît que c’est nécessaire. Que de temps perdu ! Avec Léon Deffontaine et Andre Chassaigne, nous porterons ce combat à Bruxelles.

« Envoi de troupes » en Ukraine : les déclarations de Macron dénoncées par la gauche


 « Rien ne doit être exclu », pas même l’envoi « de troupes au sol », a assuré Emmanuel Macron à l’issue d’un sommet à Paris lundi 26 février. La gauche fustige des déclarations belliqueuses qui risquent d’entraîner la France et le continent dans l’engrenage de la guerre.

Une vingtaine de chefs d’État et de gouvernement, en majorité européens, se sont réunis, ce lundi, à Paris, pour réaffirmer leur soutien à l’Ukraine, depuis l’invasion russe le 24 février 2022. À l’issue de la rencontre, Emmanuel Macron s’est fendu d’une déclaration des plus martiales qui n’a pas manqué de faire réagir. « Il n’y a pas de consensus aujourd’hui pour envoyer de manière officielle, assumée et endossée des troupes au sol. Mais en dynamique, rien ne doit être exclu. Nous ferons tout ce qu’il faut pour que la Russie ne puisse pas gagner cette guerre », a-t-il déclaré.

Le chef de l’État n’a pas souhaité en dire plus sur la position de la France sur cette question, évoquant une « ambiguïté stratégique que j’assume »« Beaucoup de gens qui disent « Jamais, jamais » aujourd’hui étaient les mêmes qui disaient « Jamais des tanks, jamais des avions, jamais des missiles à longue portée » il y a deux ans », a-t-il cependant insisté, semblant prêt à entrer dans un engrenage belliciste. Et d’ajouter : « Ayons l’humilité de constater qu’on a souvent eu six à douze mois de retard. C’était l’objectif de la discussion de ce soir : tout est possible si c’est utile pour atteindre notre objectif. »

« Une escalade guerrière terriblement dangereuse »

Des personnalités de gauche ont dénoncé le risque d’escalade engageant des puissances nucléaires après la prise de parole d’Emmanuel Macron. « Stop, ça suffit ! Plus de 500 000 morts (et blessés) dans cette guerre. Combien en faudra-t-il de plus pour dire « plus jamais ça » ? Cette déclaration est irresponsable, elle pourrait entraîner la France et le Monde dans la guerre », a dénoncé, sur X (ex-Twitter), le candidat du PCF aux Européennes, Léon Deffontaines qui « refuse de faire partie d’une nouvelle génération sacrifiée ».

« En annonçant que l’envoi de troupes occidentales au sol en Ukraine « n’est pas exclu », Macron entraîne la France et l’Europe dans une escalade guerrière terriblement dangereuse ! La France doit agir pour la paix, certainement pas souffler sur les braises de la guerre », ajoute le secrétaire national du PCF, Fabien Roussel.

« L’envoi de troupes en Ukraine ferait de nous des belligérants. La guerre contre la Russie serait une folie », a fustigé, également sur X, Jean-Luc Mélenchon. Pointant qu’une « escalade verbale belliqueuse d’une puissance nucléaire contre une autre puissance nucléaire majeure est déjà un acte irresponsable », le leader insoumis estime que « le parlement doit être saisi et dire non » et qu’il « est plus que temps de négocier la paix en Ukraine avec des clauses de sécurité mutuelle ».

« Ce serait considéré comme une entrée guerre de la France contre la Russie. Le Parlement doit être saisi en vertu de l’article 35 de la Constitution. Il faut refuser cette escalade », a ajouté le député insoumis Antoine Léaument tandis que le coordinateur de la FI, Manuel Bompard estime que « la France doit refuser l’engrenage vers un affrontement généralisé » et que « toutes les initiatives doivent être prises pour trouver le chemin de la paix ».

« Soutenir la résistance ukrainienne oui. Entrer en guerre avec la Russie et entraîner le continent. Folie », a également réagi le premier secrétaire du PS, Olivier Faure qui juge « inquiétante (la) légèreté présidentielle qui au détour d’une conférence de presse se dit éventuellement prêt à engager la France comme nation co-belligérante dans cette guerre ».

L’Elysée annonce un débat suivi d’un vote au parlement

Face au tollé et pour tenter de prendre au piège les oppositions, l’Élysée a annoncé, mardi 27 février après-midi, que « le Président de la République a demandé au gouvernement de faire devant le Parlement une déclaration en application de l’article 50-1 de la Constitution, relative à l’accord bilatéral de sécurité conclu avec l’Ukraine le 16 février 2024 et à la situation en Ukraine, suivie d’un débat et d’un vote ». Jusque-là, députés et sénateurs n’ont pas eu leur mot à dire sur la politique de la France vis-à-vis de l’Ukraine.

« Cet accord, précise le communiqué, fait suite à la déclaration que la France avait adoptée, le 12 juillet 2023, avec ses partenaires du G7 en marge du Sommet de l’OTAN à Vilnius » et « il inscrit notre soutien à l’Ukraine dans la durée pour faire échec à la guerre d’agression de la Russie. Il s’agit d’une démarche collective, puisqu’outre les pays du G7, 25 autres pays ont également décidé de conclure avec l’Ukraine un accord similaire ».

Guerres : Netanyahou ferait passer Poutine pour un homme de paix


 C’est officiel, en deux ans, Poutine a tué autant de militaires ukrainiens qu’Israël a fait de morts civils en 140 jours.

En 2013, le président américain Barack Obama avait évoqué une « ligne rouge », celle que la Syrie ne devait pas franchir. La suite, on la connaît : Bachar el-Assad a massacré les Syriens et anéanti la rébellion. Et les États-Unis n’ont rien fait.

Dix ans plus tard, quasiment au même endroit de la Terre, c’est un autre homme – Benyamin Netanyahou – qui massacre une population. Pas de « ligne rouge » cette fois-ci, les États-Unis sont mêmes au garde-à-vous derrière cette folie meurtrière.

143 jours. Pour parler uniquement du dernier épisode de cette tragique série. 143 jours que le groupe terroriste palestinien a commis le plus meurtrier attentat de son histoire. 143 jours que le pouvoir israélien profite de cette morbide aubaine pour accélérer son projet de destruction de Gaza. Depuis, les esprits fascisants qui gouvernent Israël n’ont plus aucun filtre.

Rarement l’histoire n’avait assisté à une telle offensive militaire. Il suffit de lire le bilan de l’Unicef pour comprendre ce qu’il se passe : 

« Après les attaques du 7 octobre en Israël, l’escalade des hostilités qui dure dans la bande de Gaza est la plus meurtrière depuis 2006. Au 22 février, le bilan faisait état d’au moins 1200 morts dont 36 enfants et plus de 7 500 blessés en Israël. 138 personnes seraient encore retenues en otage. Dans la bande de Gaza, 29 410 personnes, dont plus de 5 350 enfants et au moins 3 250 femmes, seraient décédées. Près de 69 465 personnes auraient été blessées dont 12 300 enfants. Plus de 17 000 enfants sont séparés de leurs parents. Des milliers d’autres sont portés disparus. Les femmes et les enfants représentent 70 % des victimes. Le bilan s’alourdit chaque jour de façon stupéfiante. La bande de Gaza est aujourd’hui l’endroit le plus dangereux au monde pour un enfant. »

Un attentat, le 7 octobre, causa la mort de 1200 personnes en Israël. La réponse militaire – 30 000 morts, quasi-exclusivement des civils – est telle que quasiment toute la bande de Gaza est une ruine. S’ingénier en contorsions intellectuelles pour justifier ce massacre relève de l’ignominie.

Heureux qui comme Vladimir…

Pendant ce temps-là, dans un monde qui semble parallèle, Volodymyr Zelensky évoque un tout autre bilan humain : 31 000 militaires ukrainiens ont été tués dans la guerre avec la Russie, qui dure depuis bientôt deux ans – là aussi, pour ce qu’il s’agit du dernier épisode…

31 000 militaires ukrainiens en deux ans.
29 410 civils palestiniens en 140 jours.

De quoi faire passer Vladimir Poutine pour un chic type. Et pas que lui d’ailleurs.

Avec la guerre à Gaza, Vladimir Poutine peut souffler, tout comme ses homologues turc Recep Tayyip Erdoğan ou chinois Xi Jinping. Les Urkainiens, les Kurdes, les Ouïghours ? Israël leur offre un contre-feu inattendu et inédit, le monde ne pense plus qu’au sort des Palestiniens.

Mieux, les bougres se croient même le droit de donner des leçons à Israëlrefutant son droit à la légitime défense ou encore sommant « la communauté internationale à agir de toute urgence » pour mettre fin à la « catastrophe humanitaire ».

Et l’Occident se retrouve le cul entre deux chaises. Alors que le monde s’organise contre les champions du 20ème siècle – c’est le sujet du dernier numéro de notre revue ! –, ceux-ci ne semblent pas prendre la mesure des changements de paradigme en cours. Le veto américain à l’ONU, sauvant encore la barbabie vengeresque israélienne, en est le plus pur symbole.

Et Benyamin Netanyahou de s’insurger contre le « diktat international » qui souhaite l’avènement d’un État palestinien et donc de la paix. Un plan qui n’est pas celui du Premier ministre, qui considère qu’une trève ne serait qu’une perte de temps avant le massacre final de Rafah, dernière ville avant l’Égypte. À côté, Poutine peut bien faire assassiner tous ses opposants, ça paraître toujours plus raisonnable.

mardi 27 février 2024

Pour une coalition internationale pour la paix en Ukraine : reprenons la main sur la défense et la sécurité européennes


 Déclaration de la liste Reprenons la main en France et en Europe conduite par Léon Deffontaines

Il y a deux ans, le régime réactionnaire, autocratique et chauvin du président russe Vladimir Poutine envahissait l’Ukraine. Nous avions alors immédiatement condamné sans réserve cette violation de l’intégrité territoriale de l’Ukraine et du droit international, que rien ne pouvait justifier. Depuis, les bombes ne cessent de s’abattre sur les villes ukrainiennes, faisant chaque jour davantage de victimes civiles. Des millions de réfugiés ont été contraints de fuir leur pays. Des villes et des civils russes sont également victimes de ce conflit abominable. Le coût humain en est effroyable. Cette guerre a des répercussions mondiales, accélérant la militarisation des rapports de force internationaux. La course aux armements est relancée. L’approvisionnement en céréales et en engrais de nombreux pays est instrumentalisé et menacé.

Après plus de 700 jours de guerre, l’évolution de la situation sur le terrain montre qu’en dépit de l’aide militaire massive ayant permis à l’Ukraine de se défendre, l’escalade de la guerre n’apporte de réponse ni à l’aspiration des Ukrainiens à vivre libres et en sécurité, ni à la nécessité de rétablir la paix dans cette partie de l’Europe. Une victoire russe peut ne pas être à exclure. Pire, les risques d’engrenage et de généralisation du conflit sont plus importants que jamais. Le chef d’état-major britannique et le chancelier allemand ont ces derniers jours déclaré qu’il fallait se préparer à une guerre européenne à brève échéance, ce qui revient à menacer une large partie de la jeunesse européenne de se voir prochainement fauchée sur les champs de bataille. De son côté, la Commission européenne, et son commissaire au marché intérieur, Thierry Breton, pousse à l’instauration d’une économie de guerre, laquelle sert en retour de prétexte à un nouveau durcissement de l’austérité européenne. C’est dans ce contexte, et au prix de coupes claires dans les dépenses sociales et les investissements industriels ou écologiques pourtant si indispensables, que l’Allemagne a engagé son réarmement massif et que tous les pays de l’Union ont abdiqué de leur indépendance pour se rallier à l’agenda stratégique des États-Unis et de l’Otan, augmentant démentiellement leurs budgets militaires.

Ce qui explique que, après plus de 700 jours de guerre, l’Union Européenne n’ait pris aucune initiative pour prémunir notre continent d’un authentique désastre.

Ce bilan de la Commission d’Ursula Von der Leyen est terrible. Il devra être sanctionné le 9 juin prochain. Loin d’apporter la prospérité et la paix, la construction libérale de l’UE renforce la pauvreté et aggrave les risques de guerre.

Le gouvernement français a annoncé prendre la tête d’une « coalition artillerie pour l’Ukraine ». Mais l’urgence n’est pas à une coalition pour la guerre, mais à une coalition pour la paix ! L’enjeu est historique. C’est l’avenir même de l’Europe et de ses peuples qui est en cause ! Dernièrement, le Président français et le chancelier allemand ont, tous les deux, signé un accord militaire avec l’Ukraine prenant des engagements lourds de conséquences, sans aucun débat dans les parlements nationaux.

Il est donc urgent de sortir de l’engrenage du militarisme et d’agir en faveur d’un cessez-le-feu et d’une solution diplomatique négociée rétablissant le droit et la sécurité en Europe. La poursuite de l’aide pour que l’Ukraine se défende contre l’agression n’exonère pas d’une démarche politique pour mettre fin au conflit. La France, du fait de sa place au Conseil de sécurité, forte de sa dissuasion nucléaire et de son histoire singulières en Europe, a un rôle essentiel à jouer. Avec les pays de l’UE qui le souhaiteront elle doit prendre l’initiative de former une coalition internationale pour la paix, en toute indépendance de l’OTAN et des Etats-Unis.

La paix n’est pas une capitulation ; elle sera au contraire la défaite des fauteurs de guerre, au premier rang desquels se place le président russe que le pourrissement de la situation militaire en Ukraine renforce, voire lui donne des ambitions de victoire. A l’heure où même aux Etats-Unis l’avenir du soutien à l’Ukraine est incertain, il est temps que l’UE prenne une initiative diplomatique.

Des propositions de paix ont été formulées. Qu’elles soient examinées et débattues devant les citoyens et les citoyennes Elle doit se bâtir sur des principes forts : l’indépendance de l’Ukraine et le retrait des troupes russes ; la neutralité du pays sous garanties de la communauté internationale et de l’ONU ; l’ouverture sur ces bases d’un processus négocié restaurant la paix entre les peuples ukrainien et russe, entre tous les peuples d’Europe.

C’est d’un traité de sécurité collective respectant la souveraineté de chaque pays, fournissant un cadre commun pour une coopération entre Etats et instaurant une réelle autonomie stratégique en dehors de la domination de l’OTAN, dont l’Europe a le plus urgemment besoin. Il permettra de relancer les négociations pour un désarmement global et multilatéral en Europe et dans le monde, en premier lieu dans le domaine nucléaire. Ce traité sera donc placé au service de la sécurité de l’ensemble de ses membres.

Au lieu d’une guerre sans fin, choisissons la voie des solutions politiques.

La paix est le plus grand des combats, disait en son temps Jean Jaurès. Reprenons la main sur la sécurité européenne !

Soyons nombreux·ses le 24 fevrier lors des rassemblements organisés partout en France avec les forces de paix !

Guerre à Gaza : le gouvernement palestinien remet sa démission au président Mahmoud Abbas


 Mohammed Shtayyeh, le premier ministre de l’Autorité palestinienne, a annoncé lundi 26 février avoir remis sa démission au président Mahmoud Abbas, notamment « à la lumière des développements liés à l’agression contre Gaza » et à « l’escalade » en Cisjordanie occupée.

« J’ai présenté la démission du gouvernement à monsieur le Président le 20 février et je la remets aujourd’hui par écrit. » Par ces mots, Mohammed Shtayyeh, le premier ministre de l’Autorité palestinienne, qui siège en Cisjordanie occupée, a annoncé lundi 26 février avoir remis sa démission au président Mahmoud Abbas. Une décision qui intervient notamment, précise-t-il, « à la lumière des développements liés à l’agression contre Gaza » et à « l’escalade » en Cisjordanie occupée.

Benyamin Netanyahou poursuit, en effet, sa fuite en avant meurtrière. Sur la chaîne américaine CBS, il a annoncé que la trêve actuellement en cours de négociation ne ferait que « retarder » l’offensive terrestre de l’armée israélienne à Rafah, contre laquelle met en garde la communauté alors que près de 1,5 million de Palestiniens ont fui les combats dans la ville du sud de l’enclave.

« L’impuissance » de l’Autorité palestinienne critiquée

Le premier ministre israélien a également fait savoir, dans un communiqué ce lundi, que son armée « a présenté au cabinet de guerre un plan pour l’évacuation des populations des zones de combat dans la bande de Gaza, ainsi que le plan d’opérations à venir », sans fournir de précisions sur les modalités d’une évacuation ni sur les endroits d’une éventuelle relocalisation. En parallèle, les attaques se sont multipliées ces dernières semaines dans des territoires occupés de Cisjordanie, à l’instar de Jénine.

Dans ce contexte, et alors que 29 692 Gazaouis sont morts depuis le 7 octobre à Gaza, selon le dernier bilan du ministère de la Santé du Hamas, « l’impuissance » de l’Autorité palestinienne et de son président, dont le pouvoir limité s’exerce en Cisjordanie, alors que le Hamas est aux commandes à Gaza, est critiquée. La démission du gouvernement Shtayyeh intervient également alors que des pays de la région, occidentaux et des opposants à Mahmoud Abbas plaident pour une Autorité palestinienne réformée qui serait à terme en charge de la Cisjordanie et de la bande de Gaza et ce, sous la bannière d’un État palestinien indépendant.

Dans un entretien la semaine dernière avec l’AFP, l’opposant Nasser al-Kidwa, neveu du défunt Yasser Arafat, avait appelé à un « divorce à l’amiable » avec Mahmoud Abbas et à une nouvelle unité du leadership politique palestinien, incluant certains membres du Hamas.

lundi 26 février 2024

Les européennes déclenchent une crise à Génération.s


 Les dirigeants du mouvement fondé par Benoît Hamon se déchirent sur les alliances à nouer pour le scrutin de juin. La querelle éclate au grand jour à la suite d’un vote des militants contesté, et la suspension des deux coordinateurs du parti, Léa Filoche et Arash Saeidi.

À l’approche des élections européennes, le mouvement Génération.s, fondé par Benoît Hamon, se déchire au sommet. Jeudi 22 février au soir, les deux coordinateurs du petit parti dont les députés siègent avec les écologistes à l’Assemblée nationale ont annoncé le résultat d’un vote des militants en faveur d’une alliance avec la France insoumise aux élections européennes. Aussitôt, un communiqué signé du bureau exécutif de Génération.s a annoncé la suspension des deux dirigeants, Arash Saeidi et Léa Filoche, et indiqué qu’aucunes de leurs communications n’engageaient le mouvement…

Deux jours plus tard, la situation n’est pas encore clarifiée. La députée Sophie Taillé-Polian confirme la position du bureau exécutif à l’Humanité : « c’est un conflit interne né d’une décision frauduleuse des coordinateurs ». À savoir, l’organisation même du vote qui n’aurait pas selon elle respecté la procédure statutaire, et dont l’intitulé de la question serait « biaisé »« L’instance délibérative (le parlement de Génération.s) a annulé le scrutin et le bureau exécutif suspendu les coordinateurs. Comme ils avaient changé les codes, on n’a pas réussi à l’arrêter ».

59 % des adhérents pour une alliance avec la FI, selon un vote contesté

Selon Arash Saeidi, l’un des deux dirigeants suspendus du mouvement, « 59 % des 450 votants » ont opté pour rejoindre la liste conduite par Manon Aubry, et les 6e et 13e place leur seraient réservées. Il réfute toute irrégularité du processus de vote. « Apparemment des gens chez nous ne voulaient pas trop prendre le risque d’interroger des militants », tacle-t-il. « Notre responsabilité de coordinateurs c’était de redonner la parole à nos militants. On ne concevait pas que le débat puisse leur être confisqué ». Il concède que les avis au sein du mouvement était très partagés sur les choix d’alliance. Et se dit lui-même « surpris » par le résultat du vote, largement en faveur de l’alliance avec la France insoumise. Sophie Taillé-Polian, à l’inverse, ne lui reconnaît aucune légitimité. « Personne n’a participé à cette mascarade », accuse la députée Génération.s. « Et je n’ai aucune garantie sur le corps électoral. Les résultats je ne les considère même pas. Tous les militants que je connais n’ont pas voté ».

La nouvelle direction du mouvement annonce donc une nouvelle délibération de son parlement, qui sera ensuite suivie d’un nouveau vote des adhérents. Le résultat sera-t-il différent ? Pour Arash Saeidi, le verdict du 22 février semble définitif. « J’ai envie de suivre l’avis largement majoritaire de nos adhérents », explique ainsi le coordinateur suspendu de Génération.s, qui pourrait donc rejoindre la liste conduite par Manon Aubry. « Qu’ils le reconnaissent ou pas, le résultat est là », renvoie-t-il à ses camarades de Génération.s.

Sophie Taillé-Polian appelle les insoumis à ne pas faire « d’ingérences »

Cet épisode est d’ailleurs conforme à la stratégie de la France insoumise pour les européennes, depuis l’éclatement de la Nupes et la fin de non-recevoir des autres partis à la proposition du mouvement de Jean-Luc Mélenchon de faire liste commune. Manon Aubry a lancé à plusieurs reprises des appels aux « orphelins de la Nupes » à rejoindre la liste qu’elle conduit. Les arguments d’Arash Saeidi semblent en phase avec la députée européenne. « La liste conduite par Manon Aubry est la seule qui se revendique du programme et de la dynamique de la NUPES. Il y a donc une cohérence sur le fond et sur la stratégie », ajoute l’ex coordinateur, qui rappelle que Génération.s aurait « bien aimé un groupe unique de la Nupes à l’Assemblée nationale ». Cette pression en faveur d’une « union par le bas » lancée par les insoumis amène d’ailleurs Sophie Taillé-Polian à interpeller la France insoumise. « Je les appelle à être responsable, à ne pas faire d’ingérence dans les processus des autres organisations, et à attendre qu’ils arrivent à leur terme », averti la députée, qui indique également une « préférence » personnelle dans ce débat. Elle plaide ainsi pour que son parti ne participe à aucune liste, et fasse campagne en faveur d’une mobilisation des électeurs de gauche pour la liste de leur choix…

Enrayer la spirale de la guerre et agir pour la Paix


 Oui, nos libertés, notre sécurité sont menacées, en France, en Europe.

Menacées par la montée des nationalismes incarnée autant par Poutine à l’Est, par les partis d’extrême-droite en Europe que par Trump à l’Ouest.

Allons-nous laisser les dynamiques nationalistes emporter le monde sans retenir les leçons de l’histoire ?

10 millions de morts en 1918. 60 millions de morts en 1945.

À chaque fois, nous avons crié : plus jamais ça !

Face à la menace d’une troisième guerre mondiale, avec des puissances nucléaires en jeux, je veux dire dès aujourd’hui : surtout pas cela !

Deux ans après l’ignoble invasion de l’Ukraine par le régime nationaliste de Poutine, le nombre de familles endeuillées reste tabou. On parle de plus d’un demi million de morts. En Ukraine comme en Russie, les mères pleurent leurs fils.

Cette Europe, née dès le lendemain de la seconde guerre mondiale, qui devait être celle de la Paix et de la prospérité, est de nouveau endeuillée, en échec. Il y a aujourd’hui un pays occupé. Et un occupant qui gagne du terrain. Le conflit peut s’embraser, se généraliser à tout moment.

Il y a aussi tous ces chefs d’Etat européens qui, depuis 1945, ne savent compter que sur les États-Unis et l’OTAN pour garantir la sécurité de l’Europe. Fatale erreur à l’heure où le risque d’une réélection de Trump nous fait mesurer la fragilité d’une telle stratégie. Cet homme, allié des partis de l’extrême-droite européenne, est un milliardaire qui pense « dollars » et facturera cher le coût de cette protection. Comme un service de sécurité. Payez ou débrouillez-vous !

Il y a enfin, en Europe, les faucons, ces chefs d’Etat prêts à précipiter nos peuples contre le peuple russe. L’histoire nous a enseigné que les classes dirigeantes qui appellent à faire la guerre ne sont que très rarement ceux qui la mènent réellement. Celles et ceux qui feront la guerre seront nos enfants et les travailleurs en âge de prendre les armes.

La guerre est une source de malheur, d’appauvrissement et de privations pour les peuples. L’implication de la France dans le conflit, nous le payons déjà lourdement. Elle a déjà provoqué une vague inflationniste. L’armement va engloutir 275 milliards d’euros. Pendant ce temps, les industriels de la guerre comptent leurs bénéfices.

Alors oui, il faut tout tenter pour enrayer la spirale de la guerre. Tout a-t-il été fait en ce sens ? Non.

L’égoïsme des classes dirigeantes, la montée des nationalismes, la paresse de nos diplomaties, comme les dénonçait déjà Jean Jaurès en son temps, sont tristement à l’œuvre. Alors, il est urgent d’agir et d’emprunter les chemins d’une paix durable entre les nations européennes.

Ayons au moins ce débat ! Ayons l’ambition d’ouvrir des négociations permettant d’accéder à un cessez-le-feu et au retrait des troupes russes, tout en continuant à aider l’Ukraine à se défendre contre l’agression dont elle fait l’objet. Imaginons ce qui pourrait conduire l’Ukraine à retrouver l’intégralité de son territoire et la Russie à ne plus s’estimer menacée. Mobilisons l’ONU et ses casques bleus pour protéger les populations.

Plutôt que d’appeler à une coalition pour la guerre, mettons sur pied une coalition des diplomaties pour la Paix. Face aux divisions au sein de l’Union européenne, rassemblons les forces de bonne volonté prêtes à y travailler. Mettons sur la table la possibilité d’une neutralité de l’Ukraine plutôt que d’appeler, avec beaucoup de provocation et d’hypocrisie, à son intégration dans l’OTAN et dans l’Union européenne. Travaillons enfin à une véritable autonomie stratégique de l’Europe capable de s’émanciper des États-Unis avant que ceux-ci ne se détournent du Vieux Continent ou ne lui imposent ses décisions !

Cela implique de construire notre propre traité de sécurité collective, notre propre alliance d’entraide mutuelle avec des armées nationales capables de coopérer et de s’entraider. Notre place au Conseil de Sécurité comme notre dissuasion nucléaire nous donnent une responsabilité particulière pour y travailler. Construisons l’après OTAN.

Ouvrons ce débat plutôt que de s’empresser à conclure des accords avec l’Ukraine, comme viennent de le faire la France et l’Allemagne, sans aucun débat dans les parlements nationaux.

Les peuples d’Europe, la jeunesse européenne doivent s’emparer de ces questions et porter cette exigence de Paix avant que la machine guerrière actuellement à l’œuvre ne s’emballe et ne les précipite à leur tour dans la guerre. Les peuples, dans l’histoire, ont toujours été les moteurs de la Paix. En France, ils ont su agir pour en finir avec les guerres coloniales. C’est aujourd’hui à eux et particulièrement aux jeunes de France et d’Europe de s’emparer de cette question.

La guerre, c’est la haine. Il faut déjouer tout ce qui la nourrit.

Et de s’inspirer de Missak Manouchian qui écrivait quelques heures avant sa mort : « je n’ai aucune haine contre le peuple allemand. Le peuple allemand et tous les autres peuples vivront en Paix et en fraternité après la guerre qui ne durera pas longtemps. Bonheur à tous ».

Aussi, n’ayons aucune haine contre le peuple russe et souhaitons que les peuples russes, ukrainiens et tous les peuples européens vivent en paix et en fraternité après cette guerre qui doit cesser au plus vite. Bonheur à tous.

Fabien Roussel, secrétaire national du PCF et député du Nord,

Le 23 février 2024.

dimanche 25 février 2024

Indonésie – Un criminel de guerre accède à la présidence

C’est un homme au passé redoutable qui accède à la présidence de l’Indonésie à l’issue du scrutin du 14 février. Élu dès le premier tour avec plus de 57 % des voix, selon une estimation encore provisoire, Prabowo Subianto succédant à Joko Widodo est désormais à la tête d’un pays de 280 millions d’habitants à majorité musulmane, répartis sur quelque 17 000 îles sur une zone aussi vaste que les États-Unis. Ce résultat des urnes, entaché selon ses opposants de fraudes massives, suscite maintes inquiétudes et interrogations.

Ex-officier des Kopassus (forces spéciales indonésiennes), Subianto est accusé de crimes durant les sanglantes répressions au Timor oriental, dans les années 1980/1990, au terme d’une enquête de l’ONU réalisée en 2001. Il sévit encore en 1998 contre le mouvement populaire qui mit à bas la dictature suhartiste, faisant enlever et torturer des militants dont une dizaine n’a jamais réapparu. À la chute de Suharto dont il était le gendre, il est limogé de l’armée et s’exile durant cinq ans. De retour à Jakarta, l’ancien boucher du Timor, tout en reprenant des activités politiques, bâtit un empire commercial florissant grâce à ses connexions militaires et familiales. Il est à la tête du Groupe Nusantara qui possède des intérêts dans divers secteurs, tels que l’énergie, les ressources naturelles et l’agroalimentaire.

Longtemps privé de visa par les États-Unis et par l’Australie, il connaît un retour en grâce en 2009 lorsque le président Joko Widodo le nomme ministre de la Défense, lui offrant ainsi une nouvelle virginité politique et un statut international. On voit aujourd’hui les objectifs de la manœuvre. Widodo a imposé son fils comme colistier de l’ancien général après quelques manipulations juridiques. Le rejeton Widodo, n’ayant pas l’âge requis pour accéder à la vice-présidence, a bénéficié d’un petit coup de pouce de la Cour constitutionnelle présidée… par son oncle. Ce jeu de pouvoir en famille et entre amis a balisé la voie vers la victoire électorale du ticket ainsi constitué. Au cours de la campagne, l’ancien général a poli son image médiatique en s’affublant des habits neufs d’un grand père sympathique et a particulièrement courtisé la jeunesse. Plus de la moitié des électeurs indonésiens ont moins de 40 ans, et le silence entretenu sur les années noires de la dictature a escamoté les responsabilités de ses dirigeants.

Si, en janvier 2023, Widodo avait du bout des lèvres exprimé des regrets pour « la réalité des crimes » commis contre les communistes et l’ensemble des forces progressistes depuis le coup d’État de 1965, l’adoption en décembre 2022 par le Parlement d’un nouveau code pénal était de nature à nier les droits civils fondamentaux. Outre les restrictions de la liberté d’expression (interdiction des manifestations, restrictions des libertés académiques, etc.), ce code proscrit l’enseignement et la diffusion d’opinions politiques contraires à l’idéologie de l’État (Pancasila) et prévoit une peine de quatre ans de prison pour toute personne reconnue coupable de propagande « marxiste ou communiste ». Le Parti communiste d’Indonésie est toujours interdit et son activité strictement prohibée.

Dans ce carcan idéologique la « démocratie » indonésienne reste dominée par les mêmes figures puissantes et riches qui ont prospéré sous Suharto. Ce qui n’empêche nullement nombre de commentateurs de qualifier l’archipel de « troisième grande démocratie » mondiale et de célébrer son modèle de développement économique capitaliste particulièrement attirant pour les investissements étrangers. Ils ont atteint des sommets en 2022 avec 44 milliards de dollars, puis en 2023 avec 47 milliards de dollars. Près de la moitié d’entre eux se situant dans les secteurs des mines et de la métallurgie.

Dans le sillage de Widodo, Subianto, partisan de l’ordre, ne compte pas en rester là. Évoquant le choc provoqué par la pandémie de la Covid dont le pays ne s’est pas encore relevé - aggravation de la pauvreté et des inégalités -, de nouvelle lois anti-ouvrières criminalisant les militants et les grèves sont dans les tiroirs. Déjà en octobre 2020, le gouvernement s’est attaqué au droit du travail, aux salaires, à l’emploi et à l’environnement, provoquant une grève générale massive, suivie par un soulèvement en Papouasie et dans les universités.

D’autres interrogations subsistent quant à la tournure que prendra la présidence Subianto sur les questions internationales peu abordées au cours de la campagne électorale. En tant que ministre de la Défense, il a soigné ses relations diplomatiques et stratégiques avec les pays occidentaux - notamment par l’acquisition d’armes, de technologies militaires et la formation des forces armées indonésiennes. La France, qui cherche à renforcer sa position dans la région, en a notamment profité et a signé avec Jakarta, en 2022, un contrat portant sur la vente de quarante-deux avions Rafale. Restera-t-il dans les pas de son prédécesseur qui, au cours de ses deux mandats, s’était officiellement positionné sur une diplomatie multisectorielle ?

Dominique Bari

Article publié dans CommunisteS, n°984, 23 février 2024.

 

Ne renouvelez pas les fréquences de CNews et C8, foyers de sexisme et de racisme !


 « La télévision n’est pas une zone de non-droit » : dans cette tribune, des organisations féministes et femmes politiques féministes ayant de longue date boycotté CNews et C8, interpellent l’Arcom.

8 février : énième saisine par de nombreux téléspectateurs de l’Arcom, le régulateur de l’audiovisuel, après une séquence profondément choquante sur TPMP : alors que Loana, première lauréate de « Loft story », raconte en direct et probablement en état de stress post-traumatique, son viol, l’animateur Cyril Hanouna glousse hors champ et une des chroniqueuses de l’émission, Kelly Vedovelli, est manifestement hilare.

CNews et C8 sont régulièrement sanctionnées pour avoir enfreint les obligations qui leur incombent en vertu de la loi du 30 septembre 1986 (qui prohibe l’incitation à la haine ou à la violence fondée sur les origines, la religion ou la nationalité et punit les propos antisémites, racistes ou homophobes ainsi que ceux faisant l’apologie de crimes contre l’humanité dans les programmes mis à disposition du public), mais aussi pour les infractions à la convention signée avec l’Arcom. En effet, les fréquences d’émission font partie du domaine public, elles appartiennent au peuple français et sont mises à disposition de chaînes privées en contrepartie d’une convention qui stipule notamment que les programmes n’encouragent pas « les comportements discriminatoires en raison de la race ou de l’origine, du sexe, de l’orientation sexuelle, de la religion ou de la nationalité » et assurent « le pluralisme de l’expression des courants de pensée et d’opinion ».

En 2017, une sanction de 3 millions d’euros contre C8 venait sanctionner un canular homophobe sur le plateau de Cyril Hanouna. La même année, une interdiction de diffuser de la publicité pendant deux semaines était infligée à la chaîne pour les comportements sexistes constatés dans la même émission, Touche pas à mon poste. En mars 2021, 200 000 euros de sanction pour incitation à la haine envers les mineurs étrangers isolés dans l’émission « Face à l’info » sur CNews après qu’Eric Zemmour y a déclaré qu’ils étaient « tous des voleurs, tous des assassins, tous des violeurs ».

Quant au pluralisme, 36 % des invités politiques de CNews sont classés à l’extrême-droite, sans compter, comme le souligne Le Monde, que les prises de parole plus que conservatrices des présentateurs et chroniqueurs, tels que l’essayiste Mathieu Bock-Côté ou encore Pascal Praud, ne sont pas décomptées à ce jour : c’est ce que le Conseil d’État vient de demander à l’Arcom de faire dans son évaluation du respect du pluralisme des expressions sur CNews.

Bien sûr, nous considérons que les conséquences politiques d’une telle désinhibition de la parole sexiste et raciste sont dramatiques (alors même que la loi encadre la liberté d’expression dans notre pays en prohibant l’appel à la haine). Olivier Mannoni, traducteur d’une version de « Mein Kampf » en français, explique de la manière suivante comment l’indicible horreur du IIIe Reich a pu survenir dans l’Histoire : « C’est arrivé aussi par le langage, une manière de faire sauter aussi les tabous du langage. Quand on dit « tu ne diras pas ça », c’est que le fait de le dire ouvre des portes et qu’une fois qu’on a ouvert les portes, il n’y a plus aucun contrôle ».

Mais le sujet ici est un sujet légal plus qu’un sujet politique : chercheuse spécialiste des médias Julia Cagé soulignait le 18 janvier devant la commission d’enquête parlementaire sur les chaînes de la TNT que « le non-respect des obligations conventionnelles par CNews n’est pas un problème idéologique mais un problème entièrement légal. (…) Si cela avait été fait par un actionnaire qui avait une ligne beaucoup plus marquée à gauche, cela poserait exactement les mêmes difficultés ».

Enfin, selon le sémiologue et spécialiste des sciences de l’information et de la communication François Jost, CNews ne peut même plus être considérée comme une chaîne d’information, contrairement à ce qu’indique sa convention avec l’Arcom. Une observation des programmes du 31 janvier au 4 février 2022 lui a permis de noter que dans les émissions Midi News et Soir Info« l’information stricto sensu, comme énonciation de faits, occupe 13 % du temps ».

En deux ans, ce sont ainsi 34 interventions et sanctions de la part de l’Arcom qui ont été recensées à l’encontre de C8 et CNews pour « des faits de désinformation, de racisme, de sexisme, d’incitation à la haine, de non-respect du pluralisme, d’un manque « d’honnêteté dans l’information » comme le souligne la lettre ouverte de la députée Sophie Taillé-Pollian et de l’ex-journaliste Latifa Oulkhouir.

La télévision n’est pas une zone de non-droit. Au-delà des séquences ayant abouti à des sanctions effectives, nous ne pouvons plus accepter les propos racistes d’un Jean-Claude Dassier qui explique en toute impunité que « tant qu’on s’adressera à des classes qui comprennent 75 % de noirs, d’arabes, j’en passe et des meilleurs, on n’y arrivera jamais » ; qu’un Zemmour déclare qu’il est du côté du général Bugeaud quand celui-ci massacre les musulmans et les juifs en Algérie, qu’un Pascal Praud multiplie propos et comportements sexistes à l’antenne. La réalité, c’est que ces « dérapages » n’en sont pas et sont devenus la marque de fabrique de chaînes qui fonctionnent à coups de buzz et de comportements et propos racistes et sexistes de ses animateurs et chroniqueurs vedettes, repris sur les réseaux sociaux et qui essaiment dans le reste du paysage audiovisuel français. Ces chaînes paient les sanctions, quand sanction il y a, et rien ne change, mis à part la qualité du débat public et la crédibilité des régulateurs qui se dégrade. Elles seront certainement prêtes à signer les prochaines conventions élaborées par l’Arcom, avant de s’asseoir allègrement dessus comme elles le font depuis des années.

Dans ce contexte, nous, organisations féministes et femmes politiques féministes ayant de longue date boycotté CNews et C8, appelons l’Arcom à ne pas renouveler l’attribution de fréquence à ces chaînes.

À l’initiative de

Autrices :

  • Gabrielle Siry-Houari, autrice de « La République des hommes », Maire-adjointe du 18e arrondissement de Paris
  • Ursula Le Menn, porte-parole d’Osez le féminisme

Co-signataires :

  • Marie-Noëlle Bas, présidente des Chiennes de garde
  • Céline Thiebault Martinez, présidente de la coordination pour le lobby européen des femmes (CLEF)
  • Monique Dental, présidente du réseau féministe « Ruptures »
  • Suzy Rojtman,  porte-parole du Collectif National pour les Droits des Femmes (CNDF)
  • Nicole Chartier, Association pour le développement des initiatives économiques de femmes (ADIEF)
  • Jocelyne Andriant Mebtoul, Femmes du monde et réciproquement (FMR)
  • L’assemblée des femmes
  • Ensemble contre le sexisme

samedi 24 février 2024

Panthéonisation de Missak Manouchian - Hommage des communistes – Discours d’ouverture, Igor Zamichiei, 21 février 2024


 Vive le front des ouvriers, avec tous nos frères étrangers !

Le 21 février 1944, Missak Manouchian tombe au Mont-Valérien, fusillé par les nazis. Ce soir, quatre-vingts ans plus tard - enfin ! - Missak et Mélinée Manouchian entreront au Panthéon.

Et à leurs côtés, une plaque nommera chacun des vingt-deux membres (1) des Francs-tireurs et partisans de la Main-d'œuvre immigrée (FTP-MOI) exécutés comme lui, « vingt-trois amoureux de vivre à en mourir », comme l’écrira Aragon, ainsi que le chef des FTP de la région parisienne, Joseph Epstein.

C’est la reconnaissance de la Résistance communiste. Et celle de la Résistance d’étrangers morts pour la France, pour la liberté et la paix.

À l’heure où certains font couler le venin dans leur plume comme aux heures les plus sombres de notre histoire ;

À l’heure où les assignations identitaires grandissent, la vie même de Missak Manouchian est l’éclatante preuve que l’identité est toujours multiple : ouvrier, arménien, apatride, communiste, poète, sportif… Missak Manouchian n’était réductible à aucune de ces identités prises isolément, il était toutes ces identités à la fois.

À l’heure où la guerre fait rage sur le continent en Ukraine, au-delà en Israël-Palestine et dans tant de pays du monde ;

À l’heure où la nuit tombe sur l’Europe, où la Méditerranée se transforme en cimetière pour les migrants et où des forces héritières du nazisme élaborent des plans de déportation de millions d’étrangers et de citoyens allemands en raison de leur origine ;

À l’heure où leurs amis, ici, héritiers du régime de Vichy, portent la priorité nationale en étendard et osent se présenter au Panthéon, le combat de ces résistants doit être connu pour ce qu’il a été, reconnu et prolongé car le devoir de mémoire est aussi un devoir de combat quotidien contre ces forces.

Si Missak Manouchian avait demandé deux fois la nationalité française, nationalité qui lui fut refusée, ce n’était pas pour exalter une identité mythifiée, mais pour faire vivre concrètement les idéaux des Lumières, de la Révolution française, de la Commune de Paris et faire avancer le projet communiste en France.

*

Pour saisir toute la portée de l’événement que nous vivrons ce soir, il faut comprendre que la Résistance de la main-d’œuvre immigrée (MOI) n’est pas un moment d’engagement à part, mais bien une étape dans la longue histoire du mouvement ouvrier qui n’a pu être possible que par l’expérience accumulée de plus de quinze ans de combat de la MOI pour le progrès social et la liberté.

Ce combat de nos frères étrangers commence bien avant la Seconde Guerre mondiale. C’est d’abord sur cette histoire que je voudrais m’arrêter en ouverture de cet hommage.

Cette histoire de la MOI a une double source. L’appel à une main-d’œuvre extérieure après l’horreur de la Première Guerre mondiale qui fit plus d’1 300 000 morts pour la France, autant d’hommes qui manquent alors pour répondre aux besoins du pays. Et aussi l’exil d’étrangers, rescapés du génocide des Arméniens de 1915, comme c’est le cas de Missak et Mélinée, ou fuyant des régimes autoritaires, fascistes et nazi, dans les années 20 et 30, de la Hongrie sous Horthy à l’Espagne sous Franco, en passant par l’Italie dirigée par Mussolini, la Pologne par Pilsudski et bien sûr l’Allemagne par Hitler.

La France passe d’un million d’étrangers avant la guerre en 1910 à trois millions en 1931.

Dès lors chacun comprend l’importance pour les communistes de s’adresser à ces travailleurs étrangers. L’objectif est de construire l’unité du monde du travail de l’époque, « un front des ouvriers » pour s’opposer au capitalisme.

Quoi de plus important quand nous savons, comme l’a dit avec force Jean Jaurès, que ce capitalisme porte en lui la guerre comme la nuée l’orage. C’était le cas hier. C’est malheureusement plus que jamais d’actualité.

Pour les communistes, paix et progrès social sont deux combats indissociablement liés.

Construire ce front des ouvriers nécessitait une organisation qui fasse converger l’action des travailleurs français et immigrés dans la lutte contre la politique patronale et du bloc national au lendemain de la Première Guerre mondiale.

Après la fondation de la Main-d’œuvre étrangère (MOE) en 1923 par la CGTU en janvier 1924, le PCF fonde des groupes de langues pour organiser les travailleurs immigrés venant principalement de l’immigration italienne, polonaise, espagnole, juive (yiddishophone), arménienne, hongroise, yougoslave et ukrainienne.   

Ses groupes de langues ont eu un rôle très important pour notre parti, pour connaître la réalité du travail et organiser les travailleurs dans des secteurs professionnels à forte composante immigrée, pour diffuser et partager notre projet, pour lutter contre la xénophobie dans le mouvement ouvrier, en particulier après la crise de 1929.

Certains de ces groupes, je pense aux Italiens, étaient la base même de l’organisation communiste dans certains secteurs professionnels. Sans les communistes italiens, nous serions restés à l’écart de toute une partie du monde ouvrier de l’époque.

En 1932, la Main-d’œuvre étrangère change de nom pour devenir la Main-d’œuvre immigrée.

Au début des années 1930 et jusqu’en 34-35 la répression est forte. Le simple fait de participer à une réunion syndicale ou politique pouvait conduire à une arrestation. Il y avait bien sûr le risque de perdre son emploi, et cela arrivait fréquemment lors des grèves, ou d’être expulsé du territoire. Certains membres de la MOI, qui avaient fui des régimes autoritaires et connu la clandestinité ou la prison, étaient les mieux préparés.

Au début de l’année 1934, Manouchian écrit dans un carnet son « désir infini d’adhérer au Parti communiste et de se consacrer à la lutte sociale ». Il le fera à l’heure où les ligues d’extrême droite marchent à Paris et où notre parti engage une nouvelle stratégie visant la construction de larges fronts pour riposter au fascisme.

Cette année, il rencontrera Mélinée au sein du comité de secours pour l’Arménie.

1934, c’est aussi l’année où Brecht, après l’accession d’Hitler au pouvoir, écrit la chanson du front uni du mouvement ouvrier allemand qui appelle à la constitution de ce front des ouvriers dont l’ambition est à l’origine de la création de la MOE.   

1934, c’est encore l’arrivée de Giulio Ceretti, aussi connu sous le pseudonyme de Paul Allard, à la tête de la MOI. Le dirigeant communiste italien jouera un rôle clé. Je pense à la bataille pour un statut juridique des étrangers qui visait à faire progresser leurs droits. La proposition de loi n’aboutira pas, mais une grande campagne est menée et aura un retentissement important.

Cette bataille pour les droits nous la poursuivons aujourd’hui, nous l’avons fait ici à Paris, aux côtés de femmes étrangères, coiffeuses, victimes de traite au cœur de la capitale et nous avons gagné. Et nous continuons de la mener avec tous les travailleurs sans-papiers pour leur régularisation.

Giulio Ceretti agira aussi pour la coordination des Brigades internationales qui se constituent pour aller combattre en Espagne contre Franco.

La guerre d’Espagne joue un rôle décisif dans l’histoire de la MOI. Les 4 détachements des FTP-MOI à Paris en 1942 ont tous à leur tête d’anciens brigadistes. C’est le cas d’Epstein lui-même qui les dirige à partir de janvier 1943.

Après les années 34-35, avec le Front populaire, les effectifs du Parti vont décupler. La progression est bien moindre mais tout de même significative au sein de la MOI qui doublera son nombre d’adhérents. Au-delà de leur implication dans la lutte contre Franco, les militants de la MOI participent pleinement aux grands combats sociaux du Front populaire.

Puis la situation va radicalement changer avec l’arrivée en 1938 du gouvernement Daladier et l’action de son ministre de l’Intérieur Albert Sarraut, très répressive à l’encontre des immigrés. Et en août 1939, le pacte germano-soviétique sera très mal vécu au sein de la MOI, en particulier par les militants juifs.

*

Ce qu’il faut retenir de la période qui suit, avant la résistance à l’occupant, c’est que dès septembre 1939, 83 000 étrangers se déclareront volontaires pour s’engager dans l’armée française. Alors même qu’il est arrêté début septembre, c’est le cas de Missak Manouchian qui demande tout de suite à participer aux combats contre l’Allemagne. Sa demande est acceptée, mais il ne sera pas envoyé au combat, chargé de l’entraînement de recrues, puis affecté à une usine, dont il s’échappera avant d’être à nouveau arrêté puis libéré en 1941.

Dès l’été 1940, avec les premières actions de Résistance, de nombreux dirigeants de la MOI joueront un rôle majeur. Louis Grojnowski, juif polonais, qui œuvre à la reconstitution clandestine de la MOI au cours de l’été 40, alors même que les premières lois antisémites sont mises en œuvre par le gouvernement de Vichy. Et Adam Rayski qui constitue l’organisation « Solidarité » qui vient apporter une aide concrète aux familles juives menacées.

C’est le début d’actions de Résistance, qui commencent avec l’impression de la presse clandestine comme Naïe Presse - née en 1934 puis interdite en octobre 1939 -, désormais éditée sous le titre Unzer Wort, et les actions de solidarités envers les juifs. Les jeunes communistes seront particulièrement actifs, lançant des papillons pour diffuser les positions du Parti et participant à diverses actions de Résistance.

Il faut bien sûr citer nos camarades Henri Krasucki et Paulette Sarcey, d’origine juive polonaise, qui joueront un rôle important dans la résistance des jeunesses communistes de l’est-parisien, avec également Roger Trugnan, entre 1941 à 1943, avant leur déportation commune en juin 1943 avec une cinquantaine de leurs jeunes camarades. Ou encore Robert Endewelt qui échappa au coup de filet des brigades spéciales et continua son action dans la Résistance.

Je pense aussi à Boris Holban, juif roumain, qui prendra la direction des FTP-MOI à leur naissance en mai-juin 1942. Marcel Rajman, juif polonais, qui tuera l’officier SS Julius Ritter. Ou encore Joseph Boczov, juif hongrois, chef du détachement des dérailleurs.

En un an et demi, jusqu’à leur chute en novembre 1943, les FTP-MOI de la région parisienne réaliseront plus de 200 actions contre l’occupant. D’autres seront très actifs en 1943 et 1944 comme le groupe « Carmagnole » à Lyon, « Liberté » à Grenoble, « Marat » à Marseille, la 35e Brigade de Toulouse, les groupes du Nord-Pas-de-Calais.

Au total, ce sont des centaines d’actions - assassinat d’occupants, déraillements, sabotages d’usines…

Les FTP-MOI prendront toute leur part dans tout le pays, y compris dans les maquis, dans les combats de la Libération.

Les partisans sont nombreux à avoir perdu la vie dans toute la France dans ce combat, fusillés ou déportés dans les camps de concentration et d’extermination. Parmi eux, beaucoup mourront aux cris de « Vive la France » et « Vive le Parti communiste français ».

Au-delà des combattants, des centaines d’autres résistants leur apportaient une aide concrète et très risquée. Les femmes en particulier ont joué un rôle majeur, trop peu mis en lumière, alors même qu’elles faisaient passer des messages essentiels à la Résistance, diffusaient la presse clandestine, transportait du matériel et des armes, soignaient les blessés.

Je pense évidemment à Olga Bancic et Cristina Boico, toutes deux juives roumaines, la première participant à de très nombreuses opérations en passant des armes, la seconde responsable du renseignement pour les FTP-MOI.

*

Il y aurait tant de noms à citer pour rendre hommage à la Résistance de la MOI qui tiendra une place si importante dans la Résistance communiste et bien au-delà dans la Résistance française. Les noms de celles et ceux qui y ont laissé leur vie, autant que les noms des survivants.

Nous leur devons des avancées sociales, la paix et la liberté.

Et plus personnellement, comme beaucoup de Français, moi-même, petits-fils d’un immigré italien jeune résistant déporté à Buchenwald à 21 ans, je sais ce que je dois à leur action qui contribuera, avec des milliers d’autres, à vaincre l’occupant et à permettre le retour de mon grand-père en vie en 1945.

À ceux qui de l’extrême-droite à la droite extrême exaltent aujourd’hui le droit du sang dans la lignée des collaborateurs du régime de Vichy, la mémoire de ces hommes et femmes de la MOI vient leur rappeler que des étrangers ont versé leur sang pour la France, pour que nous puissions toutes et tous, Français et étrangers, vivre libres sur le sol français.

En 1933, dans un beau poème intitulé Course, Missak Manouchian écrivait que dans le combat quotidien contre les ténèbres,

Mon âme renaît du mouvement d’espérance

Et toujours s’envole vers l’infini

Ce soir Missak, ton entrée au Panthéon, accompagné de tes camarades de la main-d’œuvre immigrée, est un signal d’espérance pour les travailleurs et les peuples qui pourront puiser dans ton histoire la force d’agir pour de nouveaux jours heureux.

Nous continuerons de te rendre hommage et nous ranimerons sans fin le feu de ton implacable combat pour que vive le front des ouvriers avec nos frères étrangers et que triomphe la grande paix humaine !

 

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1. Celestino Alfonso, Espagnol, 27 ans ; Olga Bancic, Roumaine, 32 ans ; Joseph Boczor, Hongrois, 38 ans, Georges Cloarec, Français, 20 ans, Rino Della Negra, Français d'origine italienne, 19 ans, Thomas Elek, Hongrois, 18 ans, Maurice Fingercwajg, Polonais, 19 ans, Spartaco Fontanot, Italien, 22 ans, Jonas Geduldig, Polonais, 26 ans, Emeric Glasz, Hongrois, 42 ans, Léon Goldberg, Polonais, 19 ans, Szlama Grzywacz, Polonais, 34 ans, Stanislas Kubacki, Polonais, 36 ans, Cesare Luccarini, Italien, 22 ans, Missak Manouchian, Arménien, 37 ans, Armenak Arpen Manoukian, Arménien, 44 ans, Marcel Rajman, Polonais, 21 ans, Roger Rouxel, Français, 18 ans, Antoine Salvadori, Italien, 24 ans, Willy Schapiro, Polonais, 29 ans, Amedeo Usseglio, Italien, 32 ans, Wolf Wajsbrot, Polonais, 18 ans, Robert Witchitz, Français, 19 ans.