Le sociologue, auteur de l’Enjeu des retraites
et de l’Enjeu
du salaire, propose une alternative offensive pour le travail ainsi que
pour le financement des retraites et de la Sécurité sociale.
Spécialiste des politiques du salaire et de l’emploi,
Bernard Friot a
commencé sa carrière en 1971 comme assistant puis maître
de
conférences en économie à l’IUT de l’université
de Lorraine. En 2001,
il est élu professeur
de sociologie à l’université de Paris-Ouest
Nanterre, avant de devenir professeur émérite en 2009.
Sa thèse d’État
d’économie porte sur la construction
de la Sécurité sociale
en France
de 1920 à 1980. Il y conteste l’interprétation de 1945 qui fait de
« la
Sécurité sociale
un élément nécessaire
à la période fordiste
du
capitalisme ». Il insiste au contraire sur « le caractère
anticapitaliste des institutions de socialisation
du salaire ». Au
moment
où la souveraineté populaire est mise à mal par les banques et
le patronat,
ses réflexions l’amènent
à développer « une approche du
salariat comme voie de sortie du capitalisme ». Chercheur à l’IDHE
(Institutions et dynamiques historiques de l’économie),
il participe
aux travaux
de l’Institut européen
du salariat. Son parcours
universitaire se double
d’un engagement politique,
il est militant du
PCF
depuis près de quarante-
cinq ans. En 2010,
alors que la réforme
des retraites Fillon est très contestée, il propose
une autre issue,
en publiant, à La Dispute, l’Enjeu
des retraites, puis,
en 2012,
l’Enjeu du salaire et Puissances du salariat. En 2013 est paru chez
Peter Lang, avec Bernadette Clasquin, The Wage Under Attack : Employment
Policies in Europe. Il fonde
en 2011 une association d’éducation
populaire, Réseau Salariat (reseausalariat.info). C. R.
Avec plus de 10 % de chômeurs
en France, un marché du
travail
en crise, vous préconisez « la révolution par le salaire »,
alors que le salariat est considéré par beaucoup comme une aliénation…
Bernard Friot. Le salaire implique bien davantage
qu’un lien de subordination et du pouvoir d’achat. S’en tenir là nous
empêche de lire les dimensions anticapitalistes conquises dans le
salaire entre les années 1930 et 1970, à savoir la qualification de la
personne dans la fonction publique et la cotisation qui socialise déjà
45 % du salaire. Ces conquêtes, gagnées sous l’impulsion de la CGT et
des communistes, sont des tremplins considérables pour une autre
définition de la valeur économique et donc du travail. 40 % du PIB sont
déjà produits dans le cadre des services publics et de la Sécurité
sociale par les fonctionnaires, les retraités, les soignants, les
parents et les chômeurs. Autant de personnes qui ne relèvent ni du
marché du travail ni de la valorisation de la propriété lucrative par la
production de marchandises. Cela ouvre un possible pour sortir du
capitalisme. Le salariat, c’est la classe révolutionnaire en train de se
construire en assumant ses conquêtes, en poussant plus loin
l’affirmation de cette alternative. Une alternative au marché du travail
par la généralisation du salaire à vie des fonctionnaires et des
retraités. Mais aussi une alternative à la propriété lucrative et au
crédit par la généralisation de la cotisation, pour financer
l’investissement, et de la copropriété d’usage de tous les outils de
travail. Enfin, une alternative à la mesure de la valeur par le temps de
travail, par la généralisation de sa mesure, par la qualification des
producteurs, comme c’est déjà le cas pour l’administration et la
Sécurité sociale.
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