Par Han SOETE, Nick DOBBELAERE, Jacques R. PAUWELS
Les causes de la Première Guerre mondiale étaient-elles
l'attentat de l'archiduc d'Autriche ? Ou de nobles motivations de paix, de
démocratie et de liberté ? Non, répond l'auteur et historien Jacques Pauwels.
Depuis longtemps, les grandes puissances mondiales la voulaient, cette guerre.
Pour s'approprier des colonies et pour en finir une fois pour toutes avec les
idées révolutionnaires qui gagnaient de plus en plus toute l'Europe.
« En général, on
explique la Grande Guerre comme ceci : un coup de tonnerre dans un ciel bleu.
On prétend que personne ne l’avait vue venir, que personne ne l’avait voulue...
En réalité, les nuages de la guerre s’accumulaient depuis vingt ans. Une guerre
était nécessaire. Et les élites politiques de l’Europe la voulaient, car elles
estimaient qu’une guerre allait réaliser pour elles des choses fantastiques...
»
Voilà des années que Jacques Pauwels est plongé jusqu’au cou
dans l’histoire des révolutions et des guerres. Il a déjà publié de nombreux
ouvrages sur le sujet. Aux éditions EPO vient de paraître, en néerlandais, son
livre De Groote Klassenoorlog. 1914-1918 (« 1914-1918, la Grande Guerre des
classes », qui sortira en français le 20 septembre, aux éditions Aden ; il sera
donc en vente à ManiFiesta), un ouvrage incontournable sur la Première Guerre
mondiale. Il voit deux causes principales à cette guerre : d’un côté,
l’impérialisme ; ensuite, la peur de la révolution.
« Les grandes puissances industrielles, les grandes banques
et les grandes entreprises voulaient de nouvelles colonies – ou des
semi-colonies sur lesquelles elles auraient exercé un contrôle indirect pour
leurs matières premières, leur main-d’œuvre bon marché et leurs possibilités
d’investissement. Ici réside certainement l’une des principales raisons de la
guerre. » Explications.
Replongeons-nous au début du 20e siècle. Le monde n’avait-il
pas déjà été partagé ?
Jacques R. Pauwels. Pas tout à fait. La Chine, par exemple,
un immense pays faible avec un énorme marché de débouchés, était encore
totalement ouverte.
De plus, tous les pays n’étaient pas satisfaits de leur
part. Sur le plan des colonies, l’Allemagne était le parent pauvre. Elle
pensait pouvoir phagocyter la Belgique. La Grande-Bretagne était d’ailleurs
prête à signer un accord à ce propos. Il ne fallait pas nécessairement en
arriver à une guerre. La concurrence entre les pays impérialistes pouvait
également être résolue par des accords mutuels. Parmi l’élite anglaise, il
existait un groupe assez important qui aurait préféré collaborer avec
l’Allemagne plutôt qu’avec la France. Pour satisfaire les Allemands, ces gens
étaient prêts à céder le Congo belge à l’Allemagne.
Il est donc normal que la Belgique ait été impliquée dans
cette guerre, puisque la Belgique était également un pays impérialiste.
Vous parlez également d’impérialisme social...
Jacques R. Pauwels. En effet. En acquérant des colonies, les
pays pouvaient se débarrasser de leurs citoyens « gênants » : les classes
inférieures qui, aux yeux de l’élite, étaient surpeuplées.
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