mardi 1 octobre 2019

La fusion des régions de Hollande a entraîné des « surcoûts importants »

La réduction des dépenses publiques est décidément bien difficile. La fusion des 22 régions en 12 entités (sans compter la Corse, à statut particulier) de 2016 voulue par François Hollande l'illustre parfaitement. La Cour des comptes en tire un bilan plus que mitigé. « Trois ans après la mise en œuvre de la réforme, les économies de gestion annoncées ne sont pas encore au rendez-vous », déplorent les magistrats financiers dans leur rapport sur les finances publiques locales 2019. Pire, si la fusion s'est passée sans heurts malgré un délai de préparation très limité, elle a même entraîné « des surcoûts importants », soulignent-ils sur la base de différentes enquêtes menées par les chambres régionales des comptes.


La fusion des régions devait notamment conduire au rapprochement de leurs « satellites », des structures qui bénéficient de concours financiers importants des régions, mais sont indépendantes (agences régionales de développement économique, comités régionaux du tourisme, etc.). Cette « rationalisation reste à ce jour largement inachevée et n'a pas, en conséquence, produit d'économies notables pour les régions », tranche la Cour des comptes.
Les surcoûts, eux, viennent des dépenses de personnel. « Hormis la région Hauts-de-France, qui s'est efforcée de ne pas aligner son régime indemnitaire sur le plus favorable et gère donc huit régimes indemnitaires différents et des indemnités différentielles, les nouveaux régimes indemnitaires régionaux ont été alignés sur le plus favorable des anciennes régions, voire au-delà, détaillent les magistrats. La Nouvelle-Aquitaine a notamment introduit une prime pour les agents travaillant sur plusieurs sites et voté un effort financier particulier pour les agents techniques de catégorie C des lycées. Le coût annuel supplémentaire pour cette région, au terme d'une mise en œuvre échelonnée de 2018 à 2021, représentera plus du double de ce qu'aurait été un strict alignement sur les indemnités des agents titulaires de Poitou-Charentes et des agents non titulaires d'Aquitaine (entre 14,2 millions et 17 millions d'euros, contre environ 8 millions d'euros). »

Des indemnités d'élus augmentées

Entre 2017 et 2018, les dépenses indemnitaires des sept régions fusionnées ont ainsi bondi de… 11,9 % alors que cette hausse a plafonné à 6,1 % pour celles qui n'ont pas fusionné. La facture globale n'est pas anecdotique. Si les effectifs ne sont pas réduits d'ici là, cet alignement par le haut coûtera aux régions, et donc au contribuable, entre 49,35 millions d'euros et 53,35 millions en 2021 par rapport à la situation qui prévalait en 2016, a calculé la Cour des comptes.
Les indemnités des élus ont elles aussi été harmonisées par le haut. Entre 2015 et 2018, elles ont bondi de 8 % en moyenne dans les régions fusionnées, soit un surcoût pérenne de 3,8 millions d'euros. En ajoutant l'augmentation allouée aux membres des conseils économiques sociaux et environnementaux régionaux, dont le nombre a heureusement été réduit en parallèle, la facture monte à 5,1 millions (14 centimes par habitant par an des régions fusionnées).
D'autres surcoûts ont été constatés, notamment pour harmoniser les systèmes informatiques. Ces dépenses supplémentaires d'investissement, difficilement évitables, comme le reconnaît la Cour dans le rapport, ont atteint 30 millions d'euros entre 2015 et 2018 pour cinq régions rapprochées dans lesquelles ce poste a été étudié. Les magistrats financiers soulignent par ailleurs que « les outils de suivi et d'évaluation des coûts de la réforme sont rares et ne favorisent pas leur maîtrise ».

 Une organisation territoriale toujours à revoir
La réforme n'a pas non plus donné aux régions le rôle central qu'elles auraient dû jouer dans l'organisation territoriale. La loi NOTRe du 7 août 2015, qui a renforcé leurs compétences, aurait dû conduire à une meilleure répartition des rôles avec les départements et les communes, souvent redondants. Mais cela n'a pas été suffisamment le cas. « Trois ans après le regroupement des régions, la simplification et la rationalisation des compétences entre niveaux de collectivités restent inachevées », regrette la Cour des comptes. « Ainsi que l'illustre la mise en place des nouvelles régions, la simplification de l'architecture institutionnelle locale et la rationalisation des compétences entre l'État et les différents niveaux de collectivités restent inachevées. En témoignent par exemple le partage des responsabilités en matière de gestion des déchets ou la persistance du débat sur les doublons entre services de l'État et collectivités. Les transferts initialement prévus au titre de la loi NOTRe ont finalement été limités, les collèges et les routes départementales restant de la compétence des départements », illustrent les magistrats.
Un sujet pour la prochaine réforme territoriale, confirmée le 13 juin par le Premier ministre dans son discours de politique générale devant le SénatÉdouard Philippe veut faire voter une nouvelle phase de décentralisation mi-2020 qui devrait être l'occasion, selon la Cour des comptes, d'étendre ou de renforcer le rôle des régions pour qu'elles deviennent plus efficaces.

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