mercredi 9 avril 2025

Manifeste pour le droit au logement



 Parce que se loger ne doit pas être un privilège, la CGT mesure la nécessité urgente d’agir par des actions concrètes pour faire du logement une priorité syndicale. Il s’agit de mobiliser les outils existants et créer de nouveaux droits pour défendre le principe fondamental du droit au logement et garantir un logement digne à tou·tes les travailleur·ses.

Imagette
Visuel assises du logement

La Déclaration universelle des Droits de l’Homme, l’ONU ou encore la Constitution de certains pays reconnaissent le logement comme un droit humain fondamental. Il est en effet une condition de la dignité, de la santé, de la sécurité et de l’insertion sociale.

La crise du logement en France révèle une fracture sociale grandissante, où l’accès à un habitat décent devient un défi majeur pour une partie croissante de la population, particulièrement les salarié·es. Si l’accès au logement est un droit fondamental, de nombreuses personnes en sont pourtant privées (précarité, expulsions, loyers excessifs, spéculation immobilière). 

Aujourd’hui, dans nos villes et nos campagnes, des millions de personnes vivent sans un logement décent, certaines à la rue, d’autres entassées dans des conditions indignes, tandis que des logements restent vides, pour la seule spéculation. Nous refusons que des personnes soient jetées à la rue par des expulsions arbitraires. Cette situation est inacceptable.

Le droit au logement est ainsi bafoué chaque jour, transformant un besoin essentiel en un luxe inaccessible pour les plus précaires. 
Nous refusons de voir le logement traité comme une marchandise. Nous refusons que des familles, des travailleur·ses, des retraité·es, des étudiant·es soient contraint·es de choisir entre payer un loyer exorbitant ou se nourrir correctement. Nous appelons à faire stopper les logiques financières qui transforment le logement en un outil de profit, au détriment de l’intérêt général. 
Aussi, nous dénonçons l’inaction des gouvernements face à l’urgence sociale du mal-logement. 
Il en va de la responsabilité de l’Etat et des collectivités dans l’accès au logement pour toutes et tous.


UN LOGEMENT DIGNE, UN DROIT INALIÉNABLE.

Le logement est bien plus qu’un toit : c’est la condition première de la dignité, de la sécurité et de l’intégration sociale. Sans logement stable, comment travailler, étudier, accéder aux soins ou tout simplement vivre dignement ?

  • que chaque personne doit pouvoir bénéficier d'un logement stable et abordable.
  • que les pouvoirs publics doivent garantir cet accès en régulant les loyers et en construisant massivement des logements sociaux.
  • que la spéculation immobilière doit être combattue avec fermeté. 

Pour la CGT, l’Etat porte la responsabilité de mettre en place des politiques publiques ambitieuses : construction massive de logements accessibles, encadrement des loyers, taxation des logements vacants, protection contre les expulsions, renforcement des droits des locataires et des mal-logé·es.


1 - L’organisation, le développement et la répartition de la production de logements sociaux, pour répondre aux besoins.

C’est un bien de première nécessité, d’où en France, l’instauration par la loi du 6 juillet 1989 d’un « droit au logement ». 
Cela relève de la responsabilité de l’État qui doit assumer ce rôle garantissant l’égalité d’accès à la proximité de Services Publics de qualité, favorisant l’accès aux transports, aux soins et à la culture. 
Le logement est l’une des « briques » de base de l’espace bâti et le point d’ancrage de la plupart de nos mobilités, en particulier des mobilités domicile-travail. En conséquence, il est un outil pour la mise en œuvre de politiques publiques dans différents domaines : mixité sociale, rénovation urbaine, revitalisation des centres, qualité du cadre de vie, proximité, égalité femmes - hommes…

Nous exigeons : 

  • L’inscription du droit au logement dans la constitution.
  • La création d'un service public de l'habitat et du logement renforçant l’égalité territoriale, la transition écologique, la solidarité et la cohésion sociale.
  • Une loi de programmation-planification de l'aménagement du territoire.
  • Une feuille de route construite démocratiquement à partir d’un livre blanc de l’habitat et du logement, afin d’avoir un diagnostic partagé.


2 - La création d’un pôle public financier sous le contrôle des salarié·es, leur permettant d’imposer des choix répondant aux besoins, et d’exercer un pouvoir sur leur financement.

Nous exigeons : 

  • Le financement du logement social en lien avec la caisse des dépôts et consignations (CDC) pour casser le monopole des majors du bâtiment-travaux publics (BTP), pour faire baisser les loyers et les charges, lutter contre la spéculation du sol, et inciter à la construction de logements sociaux.
  • De redonner aux organismes HLM les moyens de développer et de rénover leur parc par la relance de logements abordables et répondant aux besoins, en ac¬cession et en locatif.
  • De poursuivre le développement d'outils d'accession à la propriété dont le fonctionnement limite les possibilités de spéculation, tels que le BRS (bail réel et solidaire).
  • De retravailler les différents régimes fiscaux liés au logement de façon à favoriser la propriété occupante et la location longue durée.
  • Une TVA à 5.5% pour les organismes HLM sur toutes leurs opérations d’investissements et d’entretien du patrimoine et cela pour l’ensemble de la production et de la rénovation du parc social.
  • L’encadrement des prix des matériaux sur la partie construction, intégrant la dimension rénovation et réhabilitation de l’habitat (à titre d’exemple : à Mayotte, les prix sont 50% plus élevés qu’en métropole).

 

3 - Pour une politique d’aménagement du territoire et des politiques publiques à la hauteur.

Le droit au logement ne peut se déployer qu’en cohérence avec une politique de droit à la ville, repensée au regard notamment du phénomène de métropolisation.

Nous exigeons :

  • Une production suffisante de logements et bien répartie sur les territoires, prenant en compte les évolutions de construction pour un développement durable, à hauteur de 500 000 par an dont 250 000 logements sociaux.
  • Face à l'objectif de sobriété foncière, la nécessité d'un renouveau de l'aménagement du territoire, une loi de programmation du logement qui permettrait de s’inscrire dans une stratégie de long terme, pour éviter les écueils liés au changement de gouvernement.
  • Que la question du logement intègre la nécessité de la réindustrialisation du pays et fasse le lien avec les services publics, l’emploi, et les transports.
  • Le renouvellement urbain (quartiers, centres bourgs, villes moyennes...) via le rôle de l’ANRU (Agence Nationale pour la Rénovation Urbaine) financé par l’Etat.
  • De permettre aux organisations syndicales d'être associées à l'élaboration des politiques locales de l'habitat, aux études liées et de participer à la concertation préalable à leurs définitions et aux conventions de mise en œuvre.
  • L’intégration d'une part du budget des collectivités territoriales consacrée à la construction des logements _ hors loi SRU (Solidarité Renouvellement Urbain).


4 - Afin d’engager des politiques publiques qui intègrent l’urgence des enjeux environnementaux.

Nous exigeons : 

•    Un plan spécifique de rénovation énergétique des logements du parc HLM, traitant en priorité les logements les plus énergivores et les passoires thermiques, conformément aux objectifs de la trajectoire zéro carbone. 

Pour : 

  • Limiter l'étalement urbain, qui promeut des modes de vie reposant sur des déplacements automobiles pour le lien domicile-travail ou l’accès aux équipements et services, ainsi que sur l’allongement des réseaux techniques et routiers, émetteurs de Gaz à Effets de Serre..
  • Éviter la consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers, dont le rôle est central pour la protection de la biodiversité.
  • Contribuer à la résilience face à certains phénomènes naturels, comme les inondations ou les fortes chaleurs.
  • Construire prioritairement sur des terrains déjà artificialisés (par la densification, la surélévation, la transformation de bureaux en logements ou la conversion des zones industrielles et commerciales en déprise).
  • Remobiliser le parc de logements vacants ou inoccupés pendant une partie de l'année, ce qui implique de limiter les résidences secondaires et meublés de tourisme (type Airbnb). Tout en améliorant l’attractivité des logements touchés par la vacance de longue durée (du fait de leur état, de leur morphologie ou de leur localisation).
  • Améliorer l'occupation du parc existant en organisant des dispositifs, forcément en partie non-marchands, permettant de faire correspondre les typologies de logements (en nombre de pièces) et les typologies de ménages (en nombre, trajectoires et âge des occupant·es), voire les lieux de travail et de domicile.


5 - Pour l’accessibilité au logement de toutes et tous.

Le logement constitue aujourd’hui le premier poste de dépense des ménages en France, représentant en moyenne 27 % de leurs revenus, et pouvant atteindre jusqu’à 50 % pour certains foyers, en particulier pour les locataires, dans les zones tendues, selon l’INSEE (2023).

Nous exigeons : 

  • L’augmentation du SMIC et des grilles de salaire pour financer les conditions de logement, et pour stopper l’écart entre l’évolution des prix du logement et celle des revenus des ménages.
  • Le plafonnement des dépenses liées au logement (loyer chargé) à 20 % des revenus.
  • La suppression du supplément de loyer de solidarité qui est un frein à la mixité sociale.
  • L’accessibilité pour tous types de situation de handicap ou de perte d'autonomie.
  • La prise en compte des enjeux d'égalité femmes - hommes et de lutte contre les violences sexistes et sexuelles.
  • La relance de l'accession sociale à la propriété avec des dispositifs plus efficaces et mieux sécurisés comme le prêt social de location accession (PSLA) en s’appuyant sur des établissements spécialisés comme Action Logement.

 

6 - La revalorisation de la PEEC à 1% et l’abaissement des seuils aux entreprises de + de 11 salarié·es.

Aujourd’hui, seules les entreprises de plus de 50 salarié⋅es y sont assujetties. La PEEC (Participation de l’employeur à l’effort de construction) versée à Action Logement Services (Ex 1% logement) correspondant à 0,45% des rémunérations de l’année N-1. Le taux de la contribution a été plus que divisé par 2 depuis sa création en 1953, passant de 1% à 0,45% de la masse salariale. Le taux a été abaissé régulièrement au rythme suivant : 0,9 % en 1978 ; 0,77 % en 1986 ; 0,72 % en 1988 ; 0,65 % en 1990 ; 0,45 % en 1992.

La CGT réaffirme sa position sur le 1% logement afin de repenser le financement des APL et revenir sur la clé de répartition de 0.55% aujourd'hui, affecté au financement des APL.

Nous exigeons : 

  • Des moyens supplémentaires au dispositif PEEC, (Participation des employeurs à l’effort de construction) pour répondre en priorité aux besoins des salariés, en élargissant la contribution à toutes les entreprises privées.
  • Le rétablissement du taux réel de 1% de la masse salariale affectée au logement des salariés (aujourd’hui à 0,45 %).
  • La mise en place d'un dispositif spécifique, s'inspirant du 1% logement (PEEC) pour les trois versants de la Fonction publique.


7 - Une représentation des salarié·es dans les territoires et les lieux institutionnels

Les droits des salarié·es en matière de représentation associative sont très limités et ne sont définis qu’en terme de «congés». Il en existe principalement deux :

  • Congé de représentation pour un·e représentant·e d’une association pour siéger au Conseil national de l’habitat, à la Commission nationale de concertation, au Conseil départemental de l’habitat, dans une Section des aides publiques au logement. D’une durée de, 9 jours ouvrables, par an, il est accordé à un·e bénévole d’une association désigné·e comme représentant·e de celle-ci pour siéger dans ces instances.
  • Congé engagement, 6 jours par an non rémunérés (avec maintien partiel ou total du salaire si un accord de branche ou d’entreprise le prévoit) pour préparer toute activité liée à des responsabilités associatives.


Nous exigeons : 

  • Le maintien de salaire pendant le congé de représentation et le congé d'engagement, pour permettre aux mandaté·es l’exercice plein et entier de leur mandat.
  • L’élargissement de ces droits à congés rémunérés aux représentant·es des organisations syndicales, sur le modèle de représentation des locataires.
  • L’abaissement du seuil aux entreprises de + de 50 salarié·es pour la création d’une Commission d’Information et d’Aide au Logement (aujourd’hui à 300 minimum).
  • Des prérogatives du CSE (Comité social et économique) afin qu’il soit associé et en capacité de faire des propositions quant aux affectations prioritaires du 1% dont une obligation d’information/consultation annuelle des CSE sur le logement (attribution des logements, montant de la contribution PEEC, affectations du 1% logement et disposer d’un droit de contrôle sur leur périmètre).
  • Le renforcement du droit des CSE, droits interprofessionnels pour les mandaté·es dans les CA des bailleurs sociaux à minima le contrôle de l’application du code du travail pour disposer des congés prévus dans ce cadre.
  • Des prérogatives élargies pour la commission logement du comité social et économique en matière de contrôle et d’attribution (en lien avec la politique RSE).
  • Le respect des libertés publiques, individuelles et collectives, syndicales pour interpeller les citoyen·nes, les associations et les décideurs. Associations, citoyen·nes, travailleur·ses, étudiant·es, retraité·es doivent pouvoir s’organiser, manifester, interpeller les pouvoirs publics. Nous refusons de rester spectateurs d’un système qui laisse des milliers de personnes sans logement.
Le droit à encourager la mobilisation : pétitions, manifestations, actions collectives pour exiger un changement, construire une société où le logement est un droit, et non un privilège.

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