Il y a deux ans, un démographe donnait une interview choc
dans les colonnes du Nouvel observateur. Contre la droite sarkozyste «
inégalitaire » qui désignait des boucs émissaires (immigrés, jeunes, chômeurs)
comme responsable de la crise, il saluait l’« appréciation très perspicace du
sens de l’histoire » de François Hollande, ainsi que son plaidoyer pour une
présidence « normale ». Il voyait un candidat socialiste « revenu au principe
d’égalité », qui « prend le parti du peuple ». Il pariait sur un « hollandisme
révolutionnaire » qui poserait la question du pouvoir de la finance une fois
aux commandes de l’État, car les circonstances économiques et politiques du
moment « l’amèneraient à se radicaliser ». [1]
N’accablons pas l’auteur de ces fortes paroles : le
pronostic de notre démographe s’est en partie avéré pertinent : d’une part, les
« circonstances » ont effectivement amené le président de la république à se
radicaliser. Seulement c’est une radicalisation à droite, et non à gauche,
qu’il a opérée. D’autre part, le hollandisme est effectivement de nature «
révolutionnaire » dans le paysage politique français : Thatcher avait son
ennemi de l’intérieur, les mineurs, Hollande a désormais le sien : la gauche de
transformation sociale. Deux ans à peine après son élection, je propose une
ébauche topographique du hollandisme présidentiel : où se situe-il et où nous
amène-t-il ?
À droite du New
Labour
Le cap a été fixé dès le lendemain de l’élection
présidentielle. Contrairement à la promesse de campagne, il n’y a eu aucune
renégociation du pacte de stabilité germano-européen qui condamne virtuellement
l’eurozone à des politiques d’austérité ad aeternam. La politique sociale et
économique du gouvernement est uniquement au service des intérêts des
possédants. Le monde de la finance et de l’actionnariat, vivement décrié dans
le discours du Bourget, est choyé. Il n’est pas une semaine sans que le
gouvernement ne lui a octroie de nouveaux abattements fiscaux au nom d’un
surréaliste « ras-le-bol fiscal ». Les patrons du CAC 40 ou de start up
menacent et leurs vœux sont aussitôt exaucés. Le pacte de responsabilité est la
caricature de ce hollandisme antisocial : faire des milliards d’euros
d’économie sur le dos des travailleurs, petits et moyens, pour les redistribuer
aux patrons et actionnaires sans contrepartie économique et sociale. Le
hollandisme révolutionnaire n’est vraiment pas l’adversaire de la finance. Il
est, au contraire, son plus fidèle et dévoué allié.
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