Près de 150 manifestants qui ne sont pas passés inaperçus samedi... Anouchka Comushian
Rassemblés
pour leur camp d’été, les jeunes communistes en ont profité pour mener
une démonstration publique dans la ville dirigée par le maire d’extrême
droite.
«Si
j’avais 20 ans, je serai derrière la banderole avec ces jeunes »,
s’exclame une retraitée qui interrompt sa promenade dans Béziers,
intriguée par un rassemblement massif de jeunes, drapeaux rouges
déployés. Ce samedi, ils sont près de 150 militants du Mouvement jeunes
communistes de France (MJCF) dans les rues de la ville dirigée par le
maire d’extrême droite Robert Ménard. Un rassemblement, en marge du camp
d’été organisé par le mouvement, pour alerter sur la destruction du
Code du travail engagée à coups d’ordonnances par le gouvernement.
« Avec le soutien du maire de Béziers et de sa femme (Emmanuelle Ménard –
NDLR), élue récemment députée », précise Aimé Couquet, élu d’opposition
(PCF) venu apporter son soutien au rassemblement. À deux pas de la
place Jean-Jaurès en travaux, sous les oriflammes au graphisme des
années 1930 encore en place annonçant les festivités du 15 août, le
conseiller municipal rappelle qu’au printemps 2016, Robert Ménard s’est
déclaré « pour la loi travail ».
le MJCF entend démasquer les mesures racistes des élus
Une position qui rend perplexe certains habitants. Fannie,
qui se décrit comme « biterroise d’origine », parcourt le tract qu’un
jeune communiste vient de lui donner. Tout en déclarant « ne pas faire
de politique », celle-ci se félicite des « résultats » obtenus par
Robert Ménard dans la ville… mais reste sans voix quand elle apprend que
ce dernier s’accommode bien de la loi travail. Quant à Emmanuelle
Ménard, devenue députée en juin dernier, elle ne se cache pas avoir une
« attitude constructive vis-à-vis des réformes dont le pays a besoin »,
arguant, dans un entretien au Figaro, que « les entreprises n’en peuvent
plus » et qu’« une réforme du Code du travail est nécessaire ». « S’il
n’y avait pas eu la loi sur le cumul des mandats, c’est Robert Ménard
qui serait député maire », souligne Aimé Couquet pour qui l’édile
d’extrême droite l’est déjà, « par délégation ». Il ajoute que c’est
bien « à la réunification des droites » que travaille le couple Ménard.
Lui-même en a fait l’expérience au conseil municipal lorsqu’à sa
proposition de motion pour dénoncer les coupes budgétaires aux
collectivités ou encore à celle dénonçant la casse des droits des
travailleurs, il s’est vu opposer le refus du maire. « La gestion de la
ville par Ménard, c’est du tape-à-l’œil… Voire du trompe-l’œil ! »
estime Aimé Couquet.
À la tête des jeunes militants qui, tout en se dirigeant
vers l’esplanade du théâtre, s’arrêtent pour discuter avec la population
en distribuant des tracts, Camille Lainé, secrétaire générale du MJCF,
explique que, si les élus d’extrême droite s’illustrent fréquemment par
des positions et des mesures racistes et xénophobes, ils n’en sont pas
moins des libéraux « qui défendent des politiques favorables au
capital ». Un positionnement que le MJCF entend démasquer à travers
l’action menée à Béziers et dans les débats de son camp d’été, qui se
tient à Coursan (Aude), à quelques kilomètres. Avec des délégués venant
de 25 départements différents, l’initiative, qui allie formation
politique, éducation populaire et droit aux vacances, veut être un
catalyseur des luttes en faveur de la jeunesse. « La journée de
mobilisation du 12 septembre contre les ordonnances de Macron et la loi
travail XXL ainsi que la Fête de l’Humanité seront des temps forts de la
rentrée pour aller à l’offensive », annonce Camille Lainé, en écho aux
tracts qui appellent à se rendre aux deux initiatives. De retour au parc
Louis-Aragon de Coursan, qui accueille les 150 participants, l’heure
est à la discussion avec les militants locaux et au partage
d’expériences.
Une extrême droite aux multiples facettes...
Parmi les jeunes communistes présents, certains, venus du
Nord ou encore du Gard, évoquent une extrême droite aux multiples
facettes. Des cinq députés FN élus dans le bassin minier du
Pas-de-Calais aux mairies conquises par l’extrême droite dans les
départements méridionaux, les militants décrivent tous une violence à
l’égard des chômeurs, des précaires et des réfugiés qui, « si elle
s’exprime différemment en prenant parfois des accents sociaux », n’est
en fait qu’une droite libérale, « le mépris et la violence en plus »,
s’accordent-ils à dire.
Nicolas Cossange, secrétaire départemental de la
fédération PCF de l’Hérault et habitant de Béziers, décrit une extrême
droite locale qui s’impose « avec peu de militants », mais qui mène une
« véritable bataille idéologique sur le temps long ». Et tant pis si
l’honnêteté est laissée au placard. Dans les rues de Béziers, qui
s’apprête à commémorer sa libération du joug nazi durant la Seconde
Guerre mondiale, des panneaux montrent un résistant portant un brassard
FTP (Francs-tireurs et partisans) et annoncent la Fête de la Libération
qui veut honorer ceux qui « ont versé leur sang pour le peuple de
Béziers ». Une reproduction d’affiche historique de 1945. Sauf que sur
l’originale était inscrit : « Ceux qui ont versé leur sang pour le
peuple de Paris… » Les rabougrissements identitaires de l’extrême droite
ne semblent pas avoir de limites.
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