En visite officielle aux États-Unis, le président du Brésil acte son alignement sur Washington dans le cadre de la guerre commerciale avec la Chine
La diplomatie brésilienne avait la réputation d’être aussi discrète qu’efficace. Mais ça, c’était hier, avant l’élection de Jair Bolsonaro. Avec l’avènement de l’extrême droite à la présidence, la voix originale du Brésil fait désormais place à un alignement total sur Washington, comme l’avait d’ailleurs annoncé Jair Bolsonaro au mépris de ses partenaires commerciaux chinois et argentin. Son premier déplacement officiel à l’étranger a confirmé ce virage, en montrant que sa visite aux États-Unis marquait une « nouvelle ère » et la fin d’un cycle des « présidents (brésiliens) antiaméricains ». Avant de rencontrer Donald Trump à qui il voue une « admiration », Jair Bolsonaro s’est fait voir en compagnie de Steve Bannon. Ce suprémaciste, qui entend fédérer les extrêmes droites en Europe, fut l’ancienne éminence grise de Donald Trump durant sa campagne électorale, et a activement participé à l’ascension de Jair Bolsonaro. Ce dernier s’est même payé le luxe de visiter le siège de la CIA, dont l’implication dans les sales guerres du sous-continent donne la mesure du rapprochement sécuritaire à l’œuvre.
Félicitations de Bolsonaro pour le mur
Lundi soir encore, le locataire du palais du Planalto a félicité son homologue états-unien et son action pour ériger un mur à la frontière avec le Mexique. « L’immense majorité des immigrants potentiels n’ont pas de bonnes intentions (…). Ils ne souhaitent pas du bien aux Américains », a-t-il osé déclarer sur les plateaux de Fox News.
Son entrevue avec Donald Trump à la Maison-Blanche, mardi, a été le point d’orgue de ce séjour. À cette occasion, les deux hommes ont rappelé leur souhait de déloger Nicolas Maduro, la « marionnette cubaine », du pouvoir au Venezuela, le locataire du bureau ovale allant jusqu’à réitérer que « toutes les options étaient sur la table ».En matière de coopération, les États-Unis pourraient à l’avenir utiliser la base d’Alcantara, dans l’État de Maranhão, afin de procéder au lancement de satellites civils.
Le Brésil bientôt partenaire de l’Otan ?
Dans le domaine économique, Brasilia est pour ainsi dire repartie bredouille, son second partenaire commercial se taillant la part du lion des accords souscrits. Le géant latino pourrait certes faire son entrée à l’OCDE, selon le calcul des États-Unis, qui entendent ainsi fragiliser la Chine au sein de l’OMC dans le cadre la guerre commerciale que se livrent Washington et Pékin. D’une pierre deux coups, la première puissance mondiale espère ainsi ébranler le multilatéralisme des pays émergents, et particulièrement des Brics (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud).
Preuve de l’asymétrie des échanges commerciaux convenus : le Brésil prévoit une nette augmentation des importations de farine états-unienne de l’ordre de 750 000 tonnes dans un pays pourtant considéré comme un grenier du monde. La nouvelle a d’ailleurs été fraîchement accueillie par le puissant lobby de l’agrobusiness, qui a pourtant joué un rôle clé dans l’élection de Bolsonaro, mais voit d’un mauvais œil cette pression sur les prix nationaux. Autre signe du tournant suiviste : le Brésil est pressenti pour devenir un pays partenaire de l’Otan, au même titre que le fidèle allié militaire colombien dans la région. « C’est un problème international, s’inquiète le diplomate chevronné Celso Amorim. Le Brésil a toujours été un membre des groupes des non-alignés dans la Conférence du désarmement, qu’il a présidée à deux reprises. »
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