jeudi 12 décembre 2024

Arkema Jarrie. Les salariés ne reconduisent pas la grève mais restent mobilisés


 Banderole à l'entrée de la plateforme chimique de Jarrie montrant l'importance du sel pour la pérennité d'Arkema.

Réunis en assemblée générale ce lundi 9 décembre, les salariés d'Arkema Jarrie ont voté la reprise du travail, mettant ainsi fin provisoirement à la grève débutée jeudi 5 décembre. Ils maintiennent toutefois un piquet de grève à l'entrée de la plateforme chimique et prévoient des AG tous les trois jours, sans exclure de relancer le mouvement. Le personnel reste en effet très inquiet de l'arrêt de la partie sud du site, conséquence des difficultés de Vencorex.

Pause ? Repli tactique ? S’il existe différentes façons d’analyser le vote des salariés d’Arkema, ce lundi 9 décembre, en assemblée générale, une chose est sûre : dans leur esprit, la reprise du travail comme la relance d’une partie des activités n’équivalent nullement à un arrêt de la mobilisation. En grève depuis jeudi 5 décembre, les 200 salariés réunis devant la plateforme chimique de Jarrie n’ont finalement « pas reconduit » le mouvement, indique Quentin Morant, représentant CFDT, qui s’exprime au nom de l’intersyndicale (CGT, CFDT, CFE-CGC).

Malgré la reprise du travail, les salariés maintiennent un piquet de grève devant Arkema Jarrie.

Sous les yeux d’une délégation de Vencorex, ceux-ci se sont néanmoins prononcés pour le maintien du piquet de grève à l’entrée du site. Mais pour le reste, « on a annoncé le redémarrage du chlorate, de l’eau oxygénée. Et pour le Sud , on a encore beaucoup d’interrogations », précise le syndicaliste. Le flou persiste ainsi sur cette partie sud de l’usine, que la direction a décidé de mettre à l’arrêt, mercredi 4 décembre. Une mesure qui avait immédiatement mis le feu aux poudres.

Ne pas « rentrer dans une guerre Sud-Nord » et dans « le jeu de la direction »

De fait, lors de la réunion d’information tenue ce lundi matin, les dirigeants d’Arkema « n’ont à aucun moment reparlé du Sud », affirme Quentin Morant. Et ce, malgré les sollicitations en ce sens de l’intersyndicale. « Ils nous ont réexpliqué les projets qu’ils avaient pour le Nord et ils ont apporté des précisions sur le budget, sur les travaux qu’ils voulaient mettre en place à moyen ou long terme », ajoute-t-il.

L’absence de réponse de la direction confirme, selon les syndicats, la fermeture du Sud annoncée la semaine précédente. Une décision liée essentiellement à l’arrêt de l’électrolyse, dû à la rupture de l’approvisionnement en sel par Vencorex, qui fournissait, depuis la plateforme chimique de Pont-de-Claix, le site voisin de Jarrie depuis 1968. Le fameux « effet domino » que la CGT anticipait et craignait déjà au printemps dernier, dans toute l’industrie chimique de la région grenobloise.

Les salariés avaient voté la grève en assemblée générale, jeudi 5 décembre, mais craignaient de faire cette fois le jeu de la direction.

« On s’enterre de plus en plus, ça nous fait peur », avoue Quentin Morant. « On ne veut pas rentrer dans une guerre Sud-Nord, donc on décide de redémarrer pour l’instant », explique-t-il, livrant ainsi la principale raison du vote de l’assemblée générale. Pour l’intersyndicale, il s’agissait en effet de « ne pas aller dans le jeu de la direction », qui espérait certainement « diviser » les salariés. Le représentant syndical décrypte l’équation : « Le Sud ferme, on arrête tout, potentiellement une fermeture du site en entier. »

Un scénario catastrophe que redoutent clairement les salariés d’Arkema. Quentin Morant l’admet d’ailleurs, « l’épée de Damoclès plane » au-dessus du personnel. « Mais on se dit qu’il faut peut-être quand même laisser une chance au Nord. Les projets du Nord sont fiables », souligne-t-il, déplorant que « la direction ne travaille que là-dessus », sans s’en cacher le moins du monde.

Le militant CFDT comme l’ensemble de ses camarades du Sud n’ont « jamais été aussi inquiets », assure-t-il. Soucieux de proposer une alternative à ce funeste pronostic, les élus syndicaux travaillent sur des projets pour cette partie de l’usine. Des pistes qu’ils préfèrent ne pas dévoiler à ce stade.

« Comme si c’était une aubaine » pour la direction d’Arkema

Problème : les salariés ont l’impression que pour Arkema France, les dés sont jetés. Ce qui fait d’eux les dindons de la farce. Car l’intersyndicale a soumis à plusieurs reprises une hypothèse à la direction : « Au cas où Vencorex devait rouvrir avec, dans le meilleur des mondes, cinq ou dix ans de production de sel, est-ce qu’on rouvrirait le Sud ? » Réponse : « Le Sud ne tournera pas, même si Vencorex rouvre. »

Sur la plateforme de Jarrie comme de Pont-de-Claix, les emplois et l’industrie de la chimie partent en fumée.

Des propos sans équivoque, que la direction a répétés à chaque fois. « Comme si la situation de Vencorex était une aubaine pour eux », s’indigne Quentin Morant, qui accuse Arkema de se concentrer exclusivement sur les projets du Nord. Un PSE est-il en préparation par ailleurs ? « Il y a quelques bruits de couloir mais rien d’officiel, donc on reste dans l’inquiétude », confie-t-il.

Quid de la suite maintenant ? « On ne lâchera rien pour le Sud », promet le militant syndical. Les salariés maintiennent ainsi le piquet de grève devant la plateforme de Jarrie, où ils prévoient des assemblées générales tous les trois jours — soit ce jeudi 12 décembre pour la prochaine. Mais d’ici là, de l’eau aura coulé sous les ponts. L’intersyndicale a en effet prévenu à l’AG, rapporte Quentin Morant : « Ce qui se dit aujourd’hui, ce n’est pas forcément ce qu’on dira demain. On aura peut-être un retournement de situation, s’il y a d’autres annonces. C’est au jour le jour… Depuis deux mois ! »

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