Quand il s’agit de montrer qu’elle ne rechigne devant rien pour reclasser les 1 120 salariés de l’usine de Clairoix (Oise), qu’elle a décidé de fermer au printemps dernier et dont elle délocalise la production en Roumanie ou en Inde, la direction de la multinationale de pneumatiques Continental ne lésine pas sur les moyens. Elle vient d’adresser à 600 licenciés picards une proposition de « reclassement » dans l’une de ses filiales à Bizerte, en Tunisie : Continental cherche à recruter sur la rive sud de la Méditerranée soixante « opérateurs de production » pour un salaire brut de 137 euros sur treize mois. Pour Xavier Mathieu, délégué CGT des « Conti », « c’est du cynisme au moment ou, d’après nos comptages, le cabinet de reclassement qui devait, selon les engagements pris à l’époque, reclasser au moins 80 % des salariés sur des postes pas inférieurs à 80 % de leurs anciens salaires, n’a réussi qu’à reclasser une dizaine d’entre nous ». « Ils font tout pour dégoûter les salariés et les faire sortir du plan social », dénonce Christian Lahargue, lui aussi membre du comité de lutte.
Les patrons du groupe allemand y mettent les formes — ils ont mis un de leurs graphistes sur le coup pour rendre plus alléchante la description du poste — et se paient même le luxe de regretter dans le courrier recommandé d’avoir l’obligation légale de faire une proposition aussi choquante : « Bien que ce poste corresponde à votre qualification professionnelle, nous souhaitons néanmoins attirer votre attention sur le fait que la rémunération mensuelle brut proposée par notre filiale tunisienne s’élève à un montant minimum de 260 dinars, avertit Philippe Bleurvacq, DRH de la division française de Continental. Si cette rémunération est conforme aux standards tunisiens, elle est bien entendu largement inférieure aux minima en vigueur au sein de Continental France. Nous avons cependant l’obligation de vous soumettre cette proposition. » Continental a envoyé à quelques dizaines de salariés une proposition de « reclassement » à Sarreguemines en Moselle, mais, là aussi, malgré le fait que ce soit en France, à des salaires largement inférieurs au ras de la grille conventionnelle. « En acceptant ces postes, on risquerait de perdre jusqu’à 600 euros par mois sur nos anciens salaires de Clairoix », s’indigne un des ouvriers qui a fait ses calculs. (…)
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