Par Christophe Ventura
Le choix d’Alexis Tsipras de maintenir le référendum de dimanche prochain a conduit ses homologues européens à suspendre les négociations et attendre le résultat du vote. Finalement, est-on en train d’assister à une guerre idéologique en Europe ? Selon vous, un gouvernement d’extrême gauche peut-il actuellement survivre en son sein ?
Je pense qu’effectivement, les rebondissements des dernières heures révèlent bien la vraie nature du problème rencontré actuellement. Nous sommes confrontés à une question bien moins économique et financière que politique. Rappelons d’abord qu’on peut s’interroger fortement sur le terme même de « négociation » lorsqu’il s’agit de décrire ce qui vient de se dérouler entre la Grèce et la troïka (Banque centrale européenne, Commission européenne, Fonds monétaire international [FMI]) depuis six mois. Depuis le départ, les créanciers de la Grèce n’ont nullement cherché à prendre en compte l’expression du peuple grec lors des élections du 25 janvier. Ils ont voulu imposer d’emblée à Alexis Tsipras un cadre austéritaire rigoriste en guise de cadre de « négociation » : l’austérité, à prendre ou à laisser. L’Europe et le FMI ont privilégié, à dessein, une approche punitive envers le nouveau gouvernement de la Grèce. Dans ces conditions, Alexis Tsipras, loin d’appliquer une stratégie unilatérale et un programme radical – il a revu ses exigences à la baisse par rapport à son programme de Thessalonique –, a accepté de s’inscrire dans la logique imposée. Plus précisément, il a tenté, face au front de l’hostilité, de négocier en navigant dans le périmètre des grands principes austéritaires professés par la troïka. Il l’a fait dans le but d’obtenir, dans un premier temps, des compromis et des aménagements pour ouvrir la voie, dans une seconde étape, à une discussion portant sur la redéfinition du modèle économique de la Grèce dans l’Europe. Pour ce faire, il n’a cessé, jusqu’au bout, d’adopter un profil relativement modéré et à chercher la construction de compromis, quitte à accepter toujours plus de mesures d’austérité sans toutefois violer intégralement ses propres « lignes rouges ». Il n’a jamais voulu remettre en cause sa ligne stratégique initiale issue de sa campagne électorale : « rejeter l’austérité tout en restant dans l’euro ». Mais il s’est confronté à l’autisme des créanciers et à leur refus absolu de céder le moindre centimètre pendant ces six derniers mois. A la fin, c’est la capitulation pure et simple de Tsipras qu’exigeaient les créanciers. C’est ce qui a amené le Premier ministre grec à prendre la décision d’organiser ce référendum puisque, même en adoptant une posture de négociation et de conciliation plus que de rupture, il n’a obtenu aucune marge de manœuvre de la part de l’Eurogroupe et des dites « institutions », terme qui a remplacé la troïka à la demande du gouvernement grec.
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