Répondant
à la crise humanitaire toujours en cours en Méditerranée centrale,
l'Aquarius, le navire affrété par SOS MEDITERRANEE et opéré en
partenariat avec Médecins Sans Frontières (MSF), a secouru 141 personnes
vendredi 10 août. Les deux organisations exhortent désormais les
gouvernements européens à désigner de toute urgence le lieu sûr le plus
proche, comme le prévoit le droit maritime international, afin de
pouvoir y débarquer les rescapés et continuer à fournir une assistance
humanitaire d'urgence en mer.
Vendredi
10 août dans la matinée, l'Aquarius a procédé au sauvetage de 25
personnes, retrouvées à la dérive à bord d'une petite embarcation en
bois et sans moteur. Elles erraient probablement en mer depuis près de
35 heures. Quelques heures après, l'Aquarius a repéré un second canot
en bois, dans lequel s'entassaient 116 personnes, dont 67 mineurs non
accompagnés. Parmi les rescapés, sept sur dix sont originaires de
Somalie et d'Erythrée. Si l'état de santé global des rescapés est stable
pour l'instant, beaucoup sont très affaiblis et dénutris. Nombre
d'entre eux ont également fait part aux équipes des conditions
inhumaines dans lesquelles ils ont été détenus en Libye.
L'Aquarius fait route vers le Nord, sans avoir obtenu confirmation d'un lieu sûr où accoster
Au cours des deux opérations de sauvetage, l'Aquarius a informé
l'ensemble des autorités compétentes de son activité, y compris les
Centres de coordination des secours maritimes italien, maltais et
tunisien (MRCCs) et le Centre conjoint de coordination des secours
(JRCC) libyen. Celui-ci a confirmé qu'il était l'autorité en charge de
la coordination de ces sauvetages. Le JRCC libyen a toutefois informé
l'Aquarius qu'il ne lui indiquerait pas de lieu sûr pour le
débarquement, et lui a enjoint de s'adresser à un autre Centre de
coordination des secours (Rescue coordination centre, RCC). L'Aquarius
fait donc à présent route vers le Nord et va solliciter la désignation
d'un lieu sûr de débarquement auprès d'un autre RCC.
« Nous suivons les dernières instructions du JRCC et allons, comme
il se doit, contacter d'autres RCCs afin qu'un lieu sûr nous soit
désigné pour débarquer les 141 rescapés qui sont à bord de l'Aquarius »,
a confirmé Nick Romaniuk, Coordinateur des secours pour SOS
MEDITERRANEE à bord de l'Aquarius. « L'essentiel est que les rescapés
soient débarqués sans délai dans un lieu sûr, où leurs besoins
fondamentaux seront respectés et où ils seront à l'abri d'abus ».
« Les gouvernements européens ont concentré tous leurs efforts à la
création d'un JRCC en Libye, mais les événements de vendredi illustrent
bien l'incapacité de ce dernier à coordonner intégralement une
opération », a souligné Aloys Vimard, coordinateur de projet pour MSF à
bord de l'Aquarius. « Un sauvetage n'est pas terminé tant qu'un lieu sûr
de débarquement n'a pas été indiqué. Or, le JRCC libyen nous a
clairement signifié qu'il ne le ferait pas. Il ne nous a pas non plus
informés des signalements de bateaux à la dérive dont il avait
connaissance, alors que l'Aquarius se trouvait sur zone et avait offert
son assistance. En réalité, ces embarcations en détresse ont eu de la
chance que nous les repérions par nous-même », conclut le coordinateur
de projet de MSF.
Le déploiement d'une assistance humanitaire en Méditerranée est à nouveau entravé
Fait troublant, les rescapés ont indiqué aux équipes à bord
qu'avant que l'Aquarius n'intervienne, cinq navires différents ne leur
avaient pas porté secours. « Le principe même de l'assistance portée à
toute personne en détresse en mer semble désormais menacé », s'inquiète
Aloys Vimard. « Des navires pourraient être tentés de ne pas répondre
aux appels de détresse en raison du risque de rester bloqués en mer,
sans qu'aucun lieu sûr où débarquer ne leur soit désigné. Les politiques
visant à empêcher à tout prix que les gens n'atteignent l'Europe ne
font qu'accroître la souffrance et le danger des traversées
qu'entreprennent ces personnes, pourtant déjà fort vulnérables ».
MSF et SOS MEDITERRANEE se déclarent, une nouvelle fois,
extrêmement préoccupées par les politiques européennes actuellement
menées. Celles-ci constituent une véritable entrave au déploiement
effectif d'une assistance humanitaire efficace, et n'ont eu pour effet
que de faire exploser le nombre de morts en mer ces derniers mois.
L'Aquarius est désormais l'un des deux derniers navires humanitaires de
recherche et sauvetage présents en Méditerranée centrale. La
criminalisation et l'obstruction du travail des organisations
humanitaires sont le reflet d'un système européen de l'asile en échec,
et de la défaite des Etats membres de l'Union européenne à relocaliser
les demandeurs d'asile qui arrivent en Europe.
SOS MEDITERRANEE et MSF exhortent une nouvelle fois tous les
gouvernements européens ainsi que les autorités maritimes compétentes à
reconnaître la gravité de la crise humanitaire qui sévit en
Méditerranée, à garantir un accès rapide à des lieux sûrs où débarquer
les rescapés, et à faciliter plutôt qu'entraver le déploiement d'une
assistance humanitaire essentielle en Méditerranée centrale.
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