Avec des estimations entre 2,3 % et 2,7 % des voix, la liste conduite par Ian Brossat, malgré des points marqués dans le débat public, n’obtiendra pas d’élus.
Avec des estimations donnant sa liste entre 2,3 % et 2,7 % des voix, le PCF devrait recueillir un score situé dans l’étiage que lui accordaient les sondages avant le scrutin. Malgré la campagne remarquée de sa liste « L’Europe des gens contre l’Europe de l’argent », conduite par Ian Brossat, la formation ne franchissait pas le seuil des 3 % qui donne droit au remboursement de ses frais, ni a fortiori celui des 5 % nécessaires pour obtenir des députés au Parlement européen. Les communistes n’y enverront ainsi aucun représentant pour la première fois depuis la création de cette élection en 1979. Avant de se présenter avec le Front de gauche pour les européennes en 2009 (6,48 %) et 2014 (6,61 %), le PCF avait recueilli 5,25 % des voix en 2004 (5,88 % avec la liste du Réunionnais Paul Vergès).
« En dépit de nos efforts, il arrive que la marche soit parfois trop haute pour être franchie du premier coup. Ce soir, nous n’atteignons pas encore nos objectifs », a réagi Ian Brossat à l’annonce des résultats. « Ces élus manqueront pour conduire les combats plus que jamais indispensables. Ce combat ne s’en poursuivra pas moins avec nos partenaires du Parti de la gauche européenne (PGE) et de la Gauche unitaire européenne (GUE), dans les luttes qu’il faudra mener contre le néolibéralisme et le nationalisme qui menace l’Europe et la France », a ajouté le secrétaire national du PCF, Fabien Roussel, reprochant à Emmanuel Macron d’avoir « offert à l’extrême droite un boulevard ».
Si les résultats ne lui permettent pas d’avoir des élus, la campagne du PCF, elle, a marqué les esprits. « C’est une belle campagne qui s’achève, après douze années d’absence à une élection nationale. C’est une campagne que nous avons voulue sincère, combative, fidèle aux combats et aux valeurs de la gauche », a salué la tête de liste. « Révélation » de ces européennes, pour de très nombreux observateurs, Ian Brossat a redonné, ces derniers mois, des couleurs à son parti et à ses militants, ravis de mener campagne sous leur drapeau. Dès l’annonce du nom de ses premiers colistiers – notamment de la numéro 2, Marie-Hélène Bourlard, ouvrière du textile pendant quarante-trois ans et figure du film Merci Patron ! –, le ton est donné : « Le monde du travail s’est emparé du micro », prévient l’élu parisien. « Sur notre liste, il y a des cols bleus, des blouses blanches, des robes noires, des stylos rouges, elle est à l’image de la société française. Au Parlement européen, sur 751 eurodéputés, il y a trois ouvriers. C’est dire si on est loin du compte », explique-t-il encore au moment de déposer les candidatures au ministère. Une idée martelée jusqu’au dernier meeting, à Martigues (Bouches-du-Rhône), où Hella Kherief, l’aide-soignante licenciée pour avoir témoigné dans Envoyé spécial, est l’invitée d’honneur.
De multiples initiatives «contre l’Europe du fric»
À l’issue de la campagne, selon une étude publiée par le Journal du dimanche, Ian Brossat est identifié comme le candidat ayant le plus parlé du social et de l’emploi. Il faut dire que, au fil des semaines, les initiatives se sont multipliées « contre l’Europe du fric », des maternités victimes de l’austérité au siège parisien de Google, où fleurissent les pancartes « Payez vos impôts en France », en passant par les bureaux d’Amazon envahis de colis aux messages explicites (« Des bracelets pour les fraudeurs fiscaux, pas pour les salariés »)… À chaque étape, une proposition « pour l’Europe des gens » à la clé, à l’instar de la « clause de non-régression sociale ». En parallèle, le comité de soutien, présidé par Lassana Bathily, le « héros de l’Hyper Cacher », s’étoffe de personnalités comme la comédienne Josiane Balasko, ou encore d’une liste de plus de 300 syndicalistes, tandis que les « punchlines » de Ian Brossat offrent à sa campagne un tournant médiatique dès le 4 avril et le premier débat sur France 2.
Les chausse-trapes ne disparaissent pas pour autant. Sur le plateau des Grandes Gueules, les poncifs anticommunistes sont à nouveau de sortie, avec un Daniel Riolo qui va jusqu’à accuser les communistes d’avoir collaboré avec les nazis. Dans la dernière semaine, France 2 se refusera, malgré deux chaises vides, à inviter le candidat du PCF en première partie de soirée, le reléguant avec ceux que la chaîne considère comme des « petits » candidats. Sur le terrain, en revanche, de mémoire de militant, la mobilisation est au plus haut niveau : « Il y a un climat que je n’ai pas vécu depuis longtemps », confie notamment Pascal, fin avril, lors d’un meeting à Rennes. « Red is the new green ! » lance aussi l’équipe de campagne, à la veille du meeting parisien de Japy, où Ian Brossat met l’accent sur l’environnement.
«Écoutons-nous, respectons-nous, travaillons ensemble»
Las, pour le PCF, l’argument du « vote rentable », défendu par les communistes en fin de campagne, n’aura pas décidé assez d’électeurs. « Le socle de voix obtenu est le point de départ d’une longue reconquête de notre électorat », s’est engagé, hier, le secrétaire national du PCF.
Dès mercredi dernier, en conclusion du débat de France 2, Ian Brossat pointait un deuxième défi, celui de la reconstruction de la gauche. « Ce soir, la gauche est affaiblie, tout est à reconstruire. J’ai l’intime conviction que l’avenir passe par l’humilité, le travail collectif, le respect mutuel, le refus de la tentation hégémonique. Écoutons-nous, respectons-nous, travaillons ensemble », a-t-il invité hier soir. Et Fabien Roussel d’insister dans la foulée : « Il convient maintenant de travailler au rassemblement. C’est le sens de l’appel solennel que nous lançons ce soir à l’ensemble des forces de gauche et à tous nos concitoyens, orphelins d’une vraie politique de gauche. » Avec le rapport de forces dessiné par ces élections, il y a urgence.
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