La tension subsiste à Grenoble après le décès d’un des deux braqueurs du casino d’Uriage-les-Bains. Depuis vendredi soir le quartier de la Villeneuve est le théâtre de violences nocturnes opposant jeunes et forces de l’ordre. Patrice Voir, conseiller municipal communiste, s’indigne d’une telle violence et évoque le quotidien du quartier de la Villeneuve dans lequel il vit. Il est notamment membre des commissions Solidarité, Développement Économique et Insertion pour la ville de Grenoble.
Après de nombreux actes de violence dans la région et connaissant la sensibilité d’un quartier comme La Villeneuve, pouvait-on anticiper un tel déchainement ?
Patrice Voir. On savait que le climat n’était pas très bon. On avait quelques signes. Par exemple, il y a eu au moment des élections européennes, en 2009, un gymnase transformé en bureau de vote qui a brûlé le jour du vote. C’était pendant le dépouillement des derniers bulletins. Et ça c’était dans un climat qui toute la journée avait été émaillé de petits incidents. La Villeneuve c’est quand-même 12 000 habitants, donc c’est une petite ville, avec 75 % de logements sociaux, avec un taux de chômage qui correspond au taux de chômage dans ce genre de quartiers. On est en attente d’une réhabilitation, on a un contrat Anru (Agence Nationale pour la Rénovation Urbaine) qui devrait démarrer. On est donc dans la phase de programmation. Ce qu’on appelle la Villeneuve c’est presque plusieurs quartiers de plus c'est un quartier stigmatisé. Le projet de La Villeneuve avait été une expérience très en vogue dans les années 1970 avec une conception révolutionnaire de l’urbanisme et qui aujourd’hui se révèle être, avec la crise, en difficulté. Avec notamment une grande difficulté pour maitriser, en gros, l’habitation de ce quartier. Beaucoup de personnes demandent des logements alors qu’il y a un certain nombre d’appartements qui sont vides. Pourtant ce quartier a encore une vie associative très riche, il y a quand même des services publics, des commerces.
Il n’y a donc pas un manque, une absence des services publics ?
Patrice Voir. Ah non, non. Il y a une vie très riche et des services publics qui sont maintenus par la ville, par le conseil général. Il y a quand même un engagement fort des collectivités locales sur ce quartier avec une vie associative qui est restée importante. Il y a quand même 25 % de copropriété et souvent il y en a un certain nombre qui sont des copropriétaires de longue date, qui sont un peu militants.
Mais alors comment comprendre ce climat de violence et ces tensions à la Villeneuve ?
Patrice Voir. Ça je le rattache quand même beaucoup à la crise et au taux de chômage important. Et ça concerne les trois quartiers du Sud de Grenoble, quartiers donc populaires avec un nombre très important de logements sociaux, Mistral, Teisseire et la Villeneuve. Mistral et Teisseire ont été réhabilités ou sans en phase finale de réhabilitation. Villeneuve c’est à venir. Et c’est un quartier qui a quand même une concentration de population importante.
Est-ce que la Villeneuve a toujours été un quartier sensible ?
Patrice Voir. Il y a une paupérisation très nette. C’est pour ça qu’on veut passer de 75 à 50 % sur la part du locatif social. Même ceux qui sont le moins en difficulté, qui ont un travail régulier, des revenus réguliers, refusent d’aller à la Villeneuve maintenant. C’est un quartier qui à été abandonné durant la période 83 – 95, avec Alain Carignon et la majorité UMP, enfin RPR à l’époque.
Quels sont les problèmes au quotidien dans ce quartier ? Notamment par rapport à l’insertion.
Patrice Voir. Il y a des problèmes d’accès à l’emploi c’est sûr. Même avec une politique volontariste d’emploi de proximité, en employant des jeunes de la cité, ça ne répond pas à l’ensemble du besoin d’emploi sur ce quartier c’est bien évident. Ce n’est pas facile pour quelqu’un qui cherche un emploi de trouver quand il vient de Villeneuve comparé à certains autres quartiers de la ville. C’est sûr que de ce point de vue là c’est un quartier qui est connoté. Et puis les événements n’arrangeront pas ça. Moi j’habite du côté des Arlequins, donc juste à côté d’où sont partis les évènements et dans la Villeneuve même il y a quand même des zones assez distinctes. Je pense qu’il y a besoin, c’est sûr, de renforcer la présence des travailleurs sociaux. Et puis il y a la question de l’emploi. Surtout pour les jeunes qui sont déscolarisés et qui sont sans emploi.
Entretien réalisé par Matthieu Windey
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire