Longtemps venus du Maroc et de la Tunisie, les saisonniers agricoles
n’ont commencé que récemment à réclamer justice pour les abus dont ils
ont été victimes en France. Mais la « migration circulaire de travail »
prônée par l’Union européenne change la donne. Transitant par
l’Espagne, les travailleurs temporaires latino-américains remplacent peu
à peu la main-d’œuvre maghrébine.
par Patrick Herman
« Monsieur Leydier, le dossier que j’ai entre les mains est accablant de preuves contre vous !
Je vous donne l’occasion de retrouver un peu de dignité et de cesser de
vous comporter comme un voyou. Je vous demande une dernière fois de
répondre à ma question : maintenez-vous que Mme Naïma Es-Salah ne
travaillait pas chez vous comme employée de maison ? » En ce 12 décembre 2012, le tribunal de grande instance d’Aix-en-Provence résonne des paroles cinglantes de la présidente.
L’arboriculteur de Grans (Bouches-du-Rhône) baisse la tête et garde
le silence. Son ancienne salariée marocaine, déclarée comme « ouvrière agricole »,
attendait ce moment depuis le dépôt de sa plainte au pénal, en
septembre 2003. Dès 2001, elle avait osé dénoncer à la télévision le
sort fait à ceux que l’on nommait alors les « contrats OMI (1) », les travailleurs saisonniers.
Ce mercredi, à quoi pense-t-elle ? A ses douze à quinze heures de travail par jour, huit mois par an, pendant dix ans ? A l’interdiction de sortir et de parler aux voisins ? Aux menaces de mort ? Le verdict tombe : un an de prison avec sursis et 1 euro symbolique de dommages et intérêts pour « faux et usage de faux » et « travail dissimulé ».
« La drogue dure des producteurs méditerranéens » :
il y a trente ans déjà, M. Jean-Pierre Berlan, directeur de recherche
honoraire à l’Institut national de la recherche agronomique (INRA),
qualifiait ainsi le recours systématique à l’emploi de saisonniers
étrangers dans le sud de la France.
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