Pour le philosophe, avec un capitalisme confronté
à des
crises ultra-profondes, les présupposés
du communisme sont là. L’enjeu
anthropologique est posé pour réactualiser la visée communiste.
Lucien Sève, agrégé
de philosophie en 1949, a publié ses premiers travaux au milieu des années 1950,
qu’il consacre
à la philosophie universitaire française, adversaire
impitoyable du matérialisme et de la pensée dialectique. Son engagement
politique
au Parti communiste
lui fermera les portes
de
l’enseignement supérieur en dépit de la notoriété qu’acquièrent ses
recherches qu’il consacre à la question de l’individualité et de
la
personne. Marxisme
et Théorie de la personnalité (Éditions sociales,
1969)
sera plusieurs fois réédité
et augmenté. Durant
les décennies
ultérieures, l’histoire du matérialisme,
la dialectique, les sciences
de la nature et la bioéthique, l’anthropologie, la religion occupent une
part notable de ses recherches, l’autre versant étant consacré
à
l’étude de la philosophie
de Marx dont il traduit nombre de textes,
à
la théorie de l’État et à la question du communisme. Communisme,
quel second souffle ? (Messidor-Éditions sociales, 1990) développe ses
conceptions sur
la nécessité impérieuse d’une « refondation » du
communisme et de l’intervention politique initiée en 1984. Il entend
replacer paradoxalement Marx
à la croisée des interrogations
contemporaines :
le politique, l’anthropologique, le philosophique,
le
communisme. Il s’investit alors dans le projet colossal d’écrire une
tétralogie,
Penser avec Marx, qui devrait lui demander une quinzaine
d’années de labeur. Marx
et nous inaugure la série (2004) aux éditions
la Dispute. Vient ensuite l’Homme (2008). La Philosophie
et le
Communisme
devraient suivre.
« Penser un monde nouveau »,
nous a suggéré cette série
d’été de l’Humanité.
Depuis que vous êtes entré
en philosophie
n’est-ce pas aussi votre propos ? Penser la nouveauté,
le
renouvellement, osons le mot, la révolution ?
Lucien Sève. Oui, osons le mot révolution, il en est
grand besoin, mais pensons la chose à neuf, de cela aussi il est grand
besoin. Quand j’ai commencé à penser, au lendemain de la guerre, il y
avait – ça m’a énormément impressionné – une très grande pensée de la
révolution communiste nécessaire. Marx, Lénine, Rosa Luxemburg, Gramsci,
Jaurès, Lukacs, Mao… La plus ambitieuse action politique coïncidait
avec la plus haute réflexion. Mais la visée communiste était alors
immature, dans les faits et dans les consciences. Et alors
qu’aujourd’hui elle revient plus fort encore à l’ordre du jour, où est
la grande pensée actualisée du communisme ? On la cherche… Or sans cela
comment changer le monde ? C’est mon souci d’origine, et c’est ce que je
cherche à nouveau avec cette tétralogie Penser avec Marx aujourd’hui
– je suis dans la longue écriture du tome 3 sur la Philosophie –, dont
le dernier volume portera sur le communisme…
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