En dépit de plus de 7 000 avis défavorables, le pétrolier français a obtenu l’autorisation de forer au large de la Guyane. Les opposants s’organisent.
Et donc, Total pourra forer : le pétrolier français a obtenu, en début de semaine, l’arrêté préfectoral lui permettant de commencer les exploitations dans les eaux territoriales de Guyane. Et il entend bien ne pas traîner à s’en saisir. « Nous sommes mobilisés pour préparer la campagne de forage que nous souhaitons démarrer d’ici à la fin de l’année », expliquait, mercredi, une porte-parole du groupe interrogée par l’AFP. Visé, au plus tard début 2019 : le forage d’un puits d’exploration dans la partie centrale de son permis, dit permis Guyane maritime. D’autres suivront. De même que d’autres l’ont précédé.
Cinq recherches avaient déjà été réalisées entre 2012 et 2013 dans la partie sud-est de cette même zone d’extraction, sans grand succès. Total fonde à présent ses espoirs sur la zone centrale de la partie nord-ouest du périmètre, qui n’a, quant à elle, jamais été explorée.
«Les risques de pollution liés aux forages sont nombreux »
Le pétrolier croit cependant savoir qu’elle s’affiche prometteuse. « Les études menées par Total entre 2014 et 2015 permettent de mettre en évidence un potentiel d’exploration intéressant dans la zone centrale du permis », notait, fin septembre, le rapport d’une commission d’enquête publique relative à cette nouvelle demande d’ouverture de travaux miniers offshore. Ce n’était cependant pas son seul constat. Au cours de l’enquête conduite en juillet et en août dernier, elle avait pu recueillir 7 183 avis, soit « un record en matière d’enquête publique en Guyane », notait-elle. Mais le vrai record se niche surtout dans le résultat obtenu : 2 de ces avis seulement s’affichaient favorables à ces nouveaux forages en mer, contre 7 173 – 99,8 % – qui s’y disaient défavorables.
Le 24 septembre, malgré tout, la commission d’enquête avait émis un avis favorable à cette demande de campagne de forages, l’accompagnant, toutefois, de trois recommandations visant à renforcer les contrôles et cahiers des charges pour limiter les risques de pollution.
Rien de convaincant aux yeux des organisations environnementales. « Cette décision est incompréhensible ! » s’indigne ainsi Greenpeace dans un communiqué, taclant « un gouvernement soi-disant champion du climat » et notant qu’« entre fuites d’hydrocarbures, boues de forage toxiques et marée noire, les risques de pollution liés aux forages sont nombreux » à proximité de l’écosystème pourtant vulnérable qu’est le récif de l’Amazone.
Total avait déjà réussi à passer entre les mailles de la loi
Ce n’est pas la première fois que le pétrolier échappe de peu à l’interdiction de forer. L’an dernier, déjà, Total avait réussi à passer entre les mailles de la loi sur l’interdiction des hydrocarbures. Car si le texte, voté en septembre 2017, interdit bien l’attribution de nouveaux permis d’explorer et d’exploiter le pétrole, il ne revient pas sur ceux déjà acquis. Or, Total avait obtenu son permis Guyane maritime en 2001. Renouvelé en 2007 et 2011, celui-ci avait été reconduit une troisième fois… au lendemain de l’adoption de la loi par le Parlement.
À l’époque, Les Amis de la Terre avaient dénoncé la façon dont les lobbys industriels avaient pesé dans la rédaction de cette loi qui, à l’origine, devait prohiber également tout renouvellement de permis. Elle « s’est vue considérablement réduite dans sa portée à la suite d’un avis du Conseil d’État », notait l’ONG en préambule d’un rapport étayé sur le sujet. Lequel Conseil, poursuivait-elle, est devenu « ces dernières années (un des) lieux importants de lobbying pour les milieux économiques ». L’organisation a enchaîné en déposant, au printemps dernier, un recours contre la prolongation même du permis Guyane maritime accordée à Total. L’affaire est en cours. D’autres pourraient suivre. Mardi, les maires d’une quinzaine de villes et plusieurs ONG intimaient au groupe pétrolier Total d’agir pour limiter le réchauffement climatique à 1,5 °C. Faute de quoi ils pourraient l’attaquer en justice.
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