vendredi 29 novembre 2024

Face à la censure qui pourrait arriver plus vite que prévu, Michel Barnier agite la menace du chaos

Alors qu’une commission mixte paritaire doit statuer sur le budget de la sécurité sociale, ce mercredi 27 novembre, à 14 heures, le gouvernement Barnier est attaqué tant par ses alliés que par l’opposition. Le vote d’une motion de censure dans les prochaines semaines apparaît de plus en plus plausible. Dans un tel cas, « il y aura une tempête probablement assez grave et des turbulences graves sur les marchés financiers », a menacé le premier ministre sur TF1, mardi 26 novembre au soir.

Plus les jours avancent et plus l’isolement de Michel Barnier influe sur son discours. Après la force tranquille, place au catastrophisme. Invité à s’exprimer sur le plateau du 20 heures de TF1, dans la soirée de ce mardi 26 novembre, le Premier ministre n’a cessé d’être en réaction aux coups de poignards portés par ses « alliés », aux menaces brandies par ses opposants et au manque de confiance affiché par son supérieur.

Le tout alors que la perspective d’une censure de son gouvernement se précise au fur et à mesure de l’avancée des débats sur les budgets de l’État (PLF) et de la Sécurité sociale (PLFSS) de 2025. Prochaine échéance en date : l’examen du PLFSS en commission mixte paritaire (CMP), qui est prévue ce mercredi 27 novembre, à 14 heures, et qui pourrait accélérer les choses. « Pourquoi voulez-vous que je démissionne ? », a lancé le locataire (plus éphémère que prévu ?) de Matignon, interrogé par Gilles Bouleau, présentateur de TF1, n’hésitant pas à jouer la carte du « c’est moi ou le chaos ». Si le gouvernement tombe, « il y aura une tempête probablement assez grave et des turbulences graves sur les marchés financiers », a-t-il ainsi prophétisé.

Un recours à l’article 49.3 sur le vote du budget

Alors qu’elle n’avait pas hésité à adouber le Premier ministre pour empêcher la gauche d’accéder à Matignon, la cheffe de file des députés du Rassemblement national (RN), Marine le Pen, n’hésite plus à brandir la menace d’un vote favorable de son groupe, si jamais le Nouveau Front populaire (NFP) profite d’un recours à l’article 49.3 sur le budget pour faire tomber le gouvernement Barnier. Ce qui pourrait arriver dès la semaine prochaine si la CMP de ce mercredi après-midi sur le PLFSS était conclusive. Après son rendez-vous de lundi avec le chef de l’exécutif, l’ancienne candidate d’extrême droite à la présidence de la République a ainsi estimé que le Premier ministre reste « campé » sur ses positions.

De quoi pousser Michel Barnier à revenir publiquement sur la hausse prévue de la taxe sur l’électricité, ligne rouge édictée par le RN, toujours prompt à se donner l’image d’un parti à l’écoute des Français. « On va voir si on peut faire plus pour préserver [leur] pouvoir d’achat », a annoncé le Premier ministre. Surtout, il a multiplié les signaux à l’intention de l’extrême droite en évoquant « les sujets sur lesquels (il a) envie d’agir (…) : la sécurité au quotidien des Français, la maîtrise de l’immigration et l’interdiction de l’immigration clandestine, sur le travail qui doit payer plus que les allocations, avec une allocation sociale unique, sur la démocratie et peut être le chantier que souhaitent beaucoup de partis à propos de la proportionnelle par exemple ».

Jusqu’ici discret sur la situation politique nationale, ainsi que sur la stratégie de Michel Barnier, Emmanuel Macron ne se fait, selon les informations du Parisien, guère plus d’illusions quant à la durée de vie du gouvernement. Le chef de l’État aurait ainsi clamé à des proches, lors de la cérémonie en l’honneur d’Élisabeth Borne, à qui fut remise la médaille de commandeur de la Légion d’honneur, que le « gouvernement va tomber (…) et plus tôt qu’on ne le pense ». L’Élysée a immédiatement démenti ces propos rapportés dans un article publié par le quotidien, ce mardi 26 novembre.

Un « socle commun » qui ne compte pas que des alliés

Michel Barnier ne peut pas plus compter sur un soutien clair du « socle commun » (LR, Horizons, Modem et Ensemble pour la République), dont les têtes d’affiche n’hésitent pas à sortir les crocs. Laurent Wauquiez, président du groupe Droite républicaine à l’Assemblée nationale, a annoncé, quelques heures avant le passage de Michel Barnier sur TF1, que son groupe et les sénateurs LR vont renoncer à une contribution pour faire travailler tous les actifs sans rémunération pendant sept heures de plus par an.

Celui qui se rêve en représentant de la droite lors de l’élection présidentielle de 2027 a ainsi grillé la priorité à l’ancien commissaire européen. Une habitude pour Laurent Wauquiez, qui avait déjà annoncé la revalorisation des retraites de la moitié de l’inflation, au 1er janvier 2025, en direct durant du 20 heures de TF1.

Sur le même plateau, Michel Barnier n’a d’ailleurs pas hésité à fustiger les « manœuvres » et les « petites phrases ». Une attaque qui vise autant Laurent Wauquiez que son prédécesseur, Gabriel Attal, président du groupe Ensemble pour la République (EPR) dans l’hémicycle. « Jouer à pile ou face avec l’avenir du pays, ce n’est pas à la hauteur des responsabilités », estime l’ancien Premier ministre.

Une très courte majorité

Pour rappel, sept députés et sept sénateurs vont tenter d’aboutir à un compromis sur le budget 2025 de la sécurité sociale. Un texte qui pourrait déboucher sur le 49.3 tant redouté par l’exécutif. Dans le huis clos d’une salle de l’Assemblée, les parlementaires plancheront donc, en début d’après-midi, sur la copie sénatoriale de ce projet de loi de financement. Problème, la coalition gouvernementale ne dispose que d’une très courte majorité (huit voix contre six). Le gouvernement doit convaincre les députés de son propre camp, ceux d’EPR, de ne pas s’opposer à une hausse des cotisations patronales.

Projet difficile, alors que de nombreux macronistes estiment que « dévier de la ligne probusiness menée depuis 2017 serait une erreur fondamentale », comme l’a déclaré, dans un entretien au Parisien, Antoine Armand… ministre de l’Économie au sein du gouvernement Barnier. Signe d’un tiraillement, une première réunion organisée ce mardi 26 novembre, du groupe macroniste pour décider du vote en commission mixte paritaire n’a pas suffi. « On était plutôt à 60/40 pour » voter la CMP, raconte une députée. Le groupe tranchera donc sur sa position au dernier moment.

« On va jouer le jeu », a de son côté annoncé le député socialiste Jérôme Guedj, à propos des débats à venir. Le risque d’une France bloquée par l’absence d’un budget est, de fait, exagéré. « Il n’y a aucun risque de [parvenir] à une situation dans laquelle les fonctionnaires ne sont pas payés ou les services publics ne fonctionnent plus, a ainsi rappelé le coordinateur politique de la France insoumise (LFI), Manuel Bompard, au micro de France Inter, ce mardi 26 novembre. C’est un mensonge pur et simple : le calendrier parlementaire permet tout à fait, dans ce cas-là, de discuter et de mettre en place un autre budget. » Ce qui est sûr, c’est que Michel Barnier y joue en grande partie son poste, alors que le gouvernement peut tomber dès les prochaines semaines.

 

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