Monsieur le député maire,
Madame Odette Niles Présidente de l’Amicale de Châteaubriant-Voes-Rouillé.
Mesdames et Messieurs les élus,
Monsieur le Recteur,
Madame l’Inspectrice d’Académie,
Monsieur le directeur de l’Office National des Anciens Combattants,
Mesdames et Messieurs les représentants d’associations,
Mesdames et Messieurs les enseignants,
Mesdemoiselles et Messieurs, les lycéens,
Mesdames et Messieurs,
Je m’adresse à vous, Mesdames et Messieurs, en tant que Président du groupe des communistes élus à la ville de Grenoble. Grenoble, ville compagnon de la Libération, ne pouvait, en aucun cas, faillir à un tel rendez-vous. La mémoire de Guy Môquet a été quelque peu galvaudée voire, disons le franchement, instrumentalisée à des fins politiciennes par le Président de la République qui prend l’habitude de pervertir tous les symboles des valeurs de notre République.
Grenoble qui reste et restera une terre de résistance se doit d’honorer et de faire connaître la mémoire des femmes et des hommes, qui nous permettent de vivre libres aujourd’hui.
A cette époque, la France et l’Angleterre refusent le libre passage des troupes soviétiques en cas d’agression de la Pologne ce qui engendrera la naissance du pacte germano-soviétique le 29 août 1939. Ce dernier servira de prétexte à l’interdiction du PCF, à déchoir les mandats des élus communistes. Le gouvernement fait arrêter les militants communistes jusque dans leur régiment. Le général De Gaulle dira plus tard : « certains milieux voulaient voir l’ennemi plutôt dans Staline que dans Hitler. Ils se souciaient des moyens de frapper la Russie soit en aidant la Finlande, soit en bombardant Bakou, soit en débarquant à Istanbul beaucoup plus que de la façon de venir à bout du Reich ». Fin de citation.
Guy Môquet a été arrêté puis fusillé parce qu’il était communiste et donc résistant. Bien plus qu’une leçon de courage, il nous donne un exemple de civisme.
Ses valeurs de paix, solidarité, liberté, il les avait acquises dès son plus jeune âge auprès de son père Prosper Môquet cheminot communiste, militant syndical, élu député en mai 1936 au moment du front populaire. Guy a très tôt milité pour la paix en soutenant les républicains espagnols face à Franco, déjà là un engagement antifasciste.
Pendant l’année 1936, il accompagne son père dans les usines en grève et distribue des tracts. En 1938, il adhère aux jeunesses communistes où il milite contre les injustices et contre les accords de Munich du 29/09/38 signés par Hitler, Mussolini, Daladier et Chamberlain, avec la bénédiction de Pie XII, livrant une partie de la Tchécoslovaquie à l’Allemagne nazie. 75 députés dont 73 communistes, 1 socialiste et un de droite, voteront contre ces accords de la honte. Par son action, Guy s’opposera à Vichy, à Pétain et à ses sbires collabo. C’est là toute la différence entre le patriotisme et le nationalisme.
Lorsque les armées hitlériennes défilent à Paris les 13 et 14 juin 1940 sous l’Arc de Triomphe, il participe activement à la résistance (tracts, manifestations, sabotages). C’était un résistant de la première heure. Le 03/09/1939, le PCF est déclaré hors la loi. Son père Prosper, alors député, est déchu de son mandat et sera arrêté le 10/10/1939 lors d’une visite qu’il rend à sa famille. Guy tiendra les propos suivants à sa maman : « Papa est arrêté, je dois le remplacer, c’est mon devoir. » Il fera scandale dans le bureau du juge d’instruction jusqu’à ce qu’il puisse voir son père à la prison de la Santé.
Le plus jeune des fusillés à Châteaubriant, il n’avait que 17 ans, avait déjà compris que la lutte contre les injustices, les inégalités, le racisme, le fascisme, l’avilissement de l’être humain par la privation de ses droits était un combat à mener au quotidien. Il n’a pas eu le bonheur de voir émerger le programme du Conseil National de la Résistance que certains s’acharnent à vouloir démanteler méthodiquement, mais au regard de son engagement, il est évident qu’il y aurait adhéré pleinement. Il n’a pas vécu longtemps mais jusqu’au bout il est resté debout dans la dignité et fidèle à ses idéaux.
A l’adresse des plus jeunes, je tiens à souligner que vous avez l’âge de Guy Môquet. Les jeunes de la résistance étaient issus de tous milieux sociaux et avaient des tempéraments différents. Quelles que soient leurs origines ethniques, religieuses ou philosophiques, ils ont su se rassembler pour une cause juste. Les résistants n’étaient ni des êtres exceptionnels, ni des héros. Ils étaient comme vous, ils aimaient la vie. A leur place, vous n’auriez pas accepté, vous non plus, d’être colonisés, réduits à la famine, à l’esclavage et d’être condamnés aux travaux forcés dans les usines de guerre en Allemagne. Comme eux, vous n’auriez pas accepté de perdre votre liberté, votre dignité d’être humain. Vous n’auriez pas accepté de voir votre culture piétinée, vos livres brûlés et votre pays asservi par une nouvelle race de seigneurs. Oui, la Résistance, vous l’auriez faite comme d’autres l’ont faite.
Une nouvelle mode est arrivée en France : la stigmatisation de certaines populations et celle de notre jeunesse. Non, Mesdames et Messieurs, les jeunes ne sont pas des inconscients, non les jeunes ne sont pas des voyous. Ils savent d’ailleurs se mobiliser aux moments opportuns : rappelez-vous les manifestations de l’entre-deux tours de 2002. Ils étaient là pour dire non à la montée en puissance d’un parti qui ne fait qu’exacerber la haine raciale et qui hiérarchise les individus.
Si Guy était encore de ce monde, que penserait-il des atteintes répétitives à la République ? Que penserait-il de l’expulsion massive des Roms ? Que penserait-il de la perte récurrente des acquis sociaux, pour lesquels lui et tant d’autres ont donné leur vie ? Que penserait-il de la traque des individus ou de ce qu’on a l’habitude d’appeler le délit de « sale gueule » ?
Lui, comme tous les autres Résistants, nous a ouvert le chemin du respect des droits de l’homme. Ne laissons pas leur œuvre être anéantie par des êtres peu scrupuleux, cupides et avides de pouvoir.
Mesdames, Messieurs, les Résistants, vous forcez notre reconnaissance et notre admiration. Notre devoir est de nous inscrire dans votre œuvre en portant haut et fort le flambeau des valeurs fondées sur la Liberté, l’Egalité, la Fraternité.
C’est le plus bel hommage que nous puissions rendre à Monsieur Guy Môquet ainsi qu’à tous les Résistants.
Patrice VOIR
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