Les cortèges ont partout rassemblé plus de manifestants que les 2 octobre et 23 septembre. Les taux de grévistes sont à la hausse. La journée est marquée par l’entrée en scène des jeunes et des grèves reconductibles. La France a la réputation d’être un des pays où la contestation sociale est capable de tout emporter sur son passage. Hier, les touristes en visite à Paris ont eu un aperçu de ce que la colère peut déclencher : la Tour Eiffel a dû fermer en début d'après-midi en raison de la grève d'une partie du personnel. Voilà qui donne le ton d’une journée de mobilisation exceptionnelle contre la réforme des retraites, en tous points plus importante que les précédentes, les 2 octobre, 23 et 7 septembre. Les manœuvres du gouvernement et de l’UMP, qui se sont empressés de faire voter au Sénat le recul de l’âge de départ, n’y ont rien fait : les cortèges ont été partout plus gros, déterminés et joyeux, confiant dans la possibilité, devenue réelle, de gagner. Petit dialogue pris sur le vif dans le cortège parisien : « Pensez vous que Sarkozy va céder ? ». « Oui ». « Qu’est ce qui vous rend si sûr ? ». « On est forts ». Une certitude, qui a gonflé les cortèges et montre que le gouvernement ne parviendra plus à convaincre du bien fondé de sa réforme. « Le pouvoir avait comme tactique d’user le mouvement social. Aujourd’hui c’est le mouvement social qui est en train d’user le gouvernement », constate Pierre Laurent, secrétaire national du PCF.
Le ministère de l’intérieur est, du reste, obligé de reconnaître que la vague de manifestants a été bien plus puissante. Le gouvernement comptait à midi, « environ 500.000 personnes », soit, une « participation légèrement supérieure due à la forte présence de lycéens ». Les syndicats eux, parlent d’un total supérieur de 20 à 25%, soit entre 3,5 et 4 millions de personnes. Les chiffres livrés par les syndicats sont tous en hausse : Marseille bat un nouveau record (230.000), de même que Toulouse (140.000), Grenoble compte plus de 70.000 manifestants, ils étaient 10.000 de plus à Lyon (45.000), 60.000 à Rennes, là aussi un record, 20.000 au Puy en Velay en Haute Loire, alors que la ville, dirigée par Laurent Wauquiez compte…. 20.000 habitants. A Paris, la préfecture de police a évoqué 85.000 manifestants contre 40.000 le 23 septembre dernier. Les syndicats eux, en ont compté 330.000, soit 30.000 de plus. IL s’agit de "la plus grosse journée depuis le début du processus", s’est réjouit Bernard Thibault, secrétaire général de la CGT. « On n’est pas dans un baroud d’honneur, la mobilisation monte d’un cran », a assuré le président de la CFTC Jacques Voisin.
Une des forces du mouvement tient précisément dans cet ancrage démocratique
Les taux de grévistes ont été quasiment partout plus importants que la 23 septembre. C’est le cas à la SNCF (53,75% pour la CGT, 40,4 pour la direction), dans le réseau de transports urbains en province, à Marseille, Montpellier, Clermond-Ferrand, Rennes ou Nantes. Dans ces deux villes, les routiers ont organisés des blocages. A la RATP, la plupart des assemblées générales ont, à mi journée, largement reconduit la grève pour demain.
Dans la fonction publique, la CGT a recensé près de 35% de grévistes, un niveau qualifié de « très haut » par Jean-Marc Canon, secrétaire général de l’UGFF. Les enseignants, à La Poste ou encore à EDF, les taux de grévistes s’annonçaient à peu près similaires au 23 septembre. La grande différence réside dans l’organisation partout d’assemblées générales pour décider des suites du mouvement. Beaucoup sont d’ailleurs organisées dans le secteur privé, dans la métallurgie, les raffineries etc. Le gouvernement se tromperait à ne communiquer que « sur la base des grévistes dans le public », avertit Bernard Thibault pour qui « la caractéristique c'est le nombre d'entreprises privées touchées par le mouvement de grève ».
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