Ouverture à la concurrence oblige, l’exploitation des barrages
hydroélectriques va être privatisée. Un premier appel d’offres sur une cinquantaine de barrages sera lancée après les élections. Cahier des charges flou, tentation de spéculer sur la production d’électricité, gestion des cours d’eau privatisée, incertitudes sur le statut des salariés, questions autour de l’entretien et de la sécurité des ouvrages… Les conséquences de cette privatisation rampante pourraient être lourdes. Enquête.
« Quand un arbre déboule vers une turbine, au moment d’une crue, c’est à l’œil que l’on s’en aperçoit, détaille Fabrice Coudour. Notre métier, ce n’est pas simplement de gérer une une grosse retenue d’eau. Nous devons aussi gérer les crues et limiter les montées des eaux trop importantes. » Fabrice Coudour est technicien d’exploitation sur un groupement d’usines hydroélectriques dans les Alpes. Comme lui, en France, 6 000 personnes travaillent dans la surveillance et l’entretien des nombreux ouvrages hydrauliques que comptent le pays, dont certains sont imposants [1].
Leur quotidien : guetter l’apparition des fissures, s’assurer que les vannes et les turbines ne présentent aucun défaut, vérifier que les centaines de kilomètres de conduites qui acheminent l’eau sont en bon état… Ces barrages sont principalement exploités par EDF (à 80 %) et par deux filiales de GDF-Suez, la Compagnie nationale du Rhône et la Société hydroélectrique du Midi (Shem). L’énergie hydraulique fournit ainsi les trois quarts de l’électricité d’origine renouvelable consommée en France [2]. Mais les conditions de travail de ces 6 000 salariés pourraient bien se dégrader.
Les salariés, grands oubliés de l’appel d’offres
Une partie de ces milliers d’agents craignent les conséquences de la privatisation des barrages qui doit commencer en 2015. L’ouverture à la concurrence pour la gestion de ces ouvrages a été actée en 2008 par la majorité UMP à l’Assemblée. Le lancement des appels d’offres est attendu pour cette année, sans doute après les élections. 49 ouvrages hydroélectriques, regroupés en 10 concessions, sont concernés. Les nouveaux exploitants en hériteront pour trente à quarante ans. « On entre dans un système de recherche de profit, on risque de réduire le personnel compétent, avec un recours accru à la sous-traitance et à l’externalisation », craint Robert Gérenton, animateur du collectif hydraulique de la CGT.
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