La
conférence nationale du PCF a voté, ce samedi, majoritairement en
faveur de la désignation d’une candidature issue de ses rangs qui
pourrait se retirer en cas d’accord pour un rassemblement plus large. Le
dernier mot reviendra aux militants, fin novembre.
Mieux
se faire entendre, ménager les possibilités de rassemblement, refuser
l’attitude de Jean-Luc Mélenchon à leur égard… Les arguments avancés en
faveur d’une candidature communiste à la présidentielle – tout comme,
d’ailleurs, ceux en faveur d’un appel à voter pour le candidat de La
France insoumise – ont été nombreux ce samedi dans l’amphithéâtre de la
Cité des sciences, à Paris, où le PCF organisait sa conférence nationale
sur 2017. Alors que ces deux hypothèses étaient en balance, c’est celle
de la désignation d’un candidat PCF qui a finalement emporté la
majorité avec 274 voix (52,8 %), contre 218 voix (42 %) pour l’autre
option, soutenue par le secrétaire national du parti, Pierre Laurent, et
27 abstentions (5,2 %). Composée des membres du Conseil national, des
parlementaires et de délégués issus des départements, cette conférence
nationale n’aura cependant pas le dernier mot, qui revient à l’ensemble
des adhérents du PCF, appelés au vote du 24 au 26 novembre.
Si, pour l’heure, l’une des deux options tient la corde, «
l’unité des communistes (se fait) autour de (leur) démarche de
rassemblement », a relevé Pierre Laurent en conclusion des travaux
invitant, un peu plus tôt, à « prendre la mesure de la situation ». « Le
danger n’est pas seulement celui d’une alternance comme on en a connue,
ramenant la droite au pouvoir. Ce danger, c’est bel et bien le risque
d’une victoire politique, idéologique, électorale conjuguée de forces de
droite radicalisées, décomplexées dans leurs choix ultralibéraux et
antirépublicains, et de forces d’extrême droite alliées à ce qui se fait
de pire en Europe », a précisé le dirigeant communiste, évoquant le
risque, dans ces circonstances, d’une « marginalisation des forces de
transformation sociale ». Une résolution, adoptée à plus de 90 % par la
conférence nationale, l’engage à la construction d’un « nouveau front
populaire et citoyen » autour d’un double objectif : « Combattre la
droite et l’extrême droite, et les empêcher de conquérir le pouvoir en
2017 » et « porter au pouvoir, au printemps, une nouvelle majorité
politique de gauche alternative à l’austérité, au service des luttes
sociales, pour ouvrir un espoir de progrès et de solidarité pour la
France ».
Pour les communistes, s’il s’agit de trouver la meilleure voie à ce rassemblement.
Le PCF refuse « d’attendre la fumée blanche des primaires socialistes »
Le contexte est difficile, dans un paysage dévasté par les
coups du quinquennat Hollande-Valls. Une partie de la gauche, qui
conteste la politique gouvernementale, est engagée dans ses propres
primaires, à commencer par les « frondeurs » du PS, au risque d’un
ralliement de dernière minute à une candidature contestée. Refusant «
d’attendre la fumée blanche des primaires socialistes », Pierre Laurent a
invité, dès vendredi, les socialistes critiques à quitter le « bateau
ivre » de la primaire, tout en se disant favorable à un soutien de
Jean-Luc Mélenchon comme « première étape du rassemblement ». « Si un
candidat socialiste sortait vainqueur de la primaire en affirmant sa
volonté de rompre avec les politiques d’austérité qui ont été menées
depuis cinq ans, je pense qu’au minimum, ça mériterait une discussion »,
a-t-il toutefois ajouté. Après le vote communiste, Arnaud Montebourg
s’est, lui, montré prudent : « Les partis politiques s’autodéterminent
librement », a-t-il déclaré, tout en se positionnant comme possible tête
de pont de « l’union des gauches », à laquelle il dit travailler.
L’option d’une candidature communiste n’exclut pas cette
possibilité, ni celle de s’allier, in fine, à Jean-Luc Mélenchon. «
Cette candidature pourrait, si la situation l’exige, sur la base d’un
accord politique et après consultation des adhérents, se retirer au
profit d’une candidature commune d’alternative à l’austérité », stipule
le bulletin de vote sur lequel les militants du PCF auront à se
prononcer. Si, pour certains partisans de ce choix, le « tout sauf un
candidat issu des primaires socialistes » prime, comme l’a lancé dans le
débat le secrétaire de la fédération du Pas-de-Calais, Hervé Poly, pour
d’autres la porte reste ouverte. « Le rassemblement peut se faire à
partir d’un candidat communiste. Ce n’est pas se replier, c’est au
contraire ouvrir les bras et porter une conception du rassemblement qui
est historiquement la nôtre », a jugé le chef de file des députés Front
de gauche, André Chassaigne. « Je ne crois pas qu’il y ait deux gauche
irréconciliables. Si, dans une forme de glaciation, on considérait que
c’est complètement à exclure, ce ne serait pas nous qui serions
perdants, en premier, ce serait la population », a ajouté l’élu du
Puy-de-Dôme.
Ont sans doute aussi pesé les fins de non-recevoir
envoyées par le candidat de La France insoumise aux demandes, notamment
des signataires de l’appel. « En 2017, faisons front commun » favorable à
sa candidature, de renoncer à imposer le mouvement qu’il a lancé et qui
s’est doté de son propre programme, mi-octobre, comme seule bannière du
rassemblement. « Ce cadre-là (celui de la France insoumise – NDLR), ils
n’arrêtent pas de le répéter, il ne bougera pas. Ils disent bienvenue
aux communistes insoumis, mais en aucun cas, ce n’est une démarche de
rassemblement », a jugé Pierre Lacaze, responsable du PCF en
Haute-Garonne. « La déclaration solitaire de candidature, la création
d’un mouvement dont il tente d’imposer les règles à tous les anciens
partenaires du Front de gauche, sans succès… Ce ne sont pas des actes
qui ont favorisé le rassemblement. Mais, je le répète, le débat n’est
pas clos », a constaté Pierre Laurent à l’issue des débats. Pour ceux
qui ont plaidé en faveur d’un soutien à Jean-Luc Mélenchon, samedi, il
est cependant possible de faire entendre la voix du PCF. « La situation
économique et sociale implique que les communistes, sans renoncer à ce
qu’ils sont, entrent en campagne. Il n’est pas incompatible de faire une
campagne communiste autonome et de se servir de l’outil Mélenchon en
lucidité, en mesurant ses limites », a expliqué Sébastien Jumel, le
maire de Dieppe, proposant de réunir les parrainages d’élus PCF pour
qu’ils constituent une « contribution lisible » à la campagne. D’autant,
selon Frédérick Genevée, que « depuis des décennies, notre courant est
toujours réduit du fait du vote utile (face à la droite et l’extrême
droite – NDLR), pour la première fois on a la possibilité d’inverser »
la tendance.
Côté FI, après un silence radio appuyé vendredi et samedi,
Alexis Corbière, le porte-parole de Jean-Luc Mélenchon, a estimé que le
vote des communistes « ne change rien à la dynamique » autour de son
candidat. Et d’ajouter : « Si des gens pensent qu’il faut absolument
qu’ils soient présents à cette élection après avoir dit qu’il fallait le
rassemblement. Bon courage, ce n’est pas mon problème. » Reste aussi
l’épineuse question des élections législatives. Un scrutin majeur pour
le PCF : « Nous appelons les Français à reconsidérer toute l’importance
de ce scrutin. La France a besoin qu’une majorité des députés élus en
juin prochain s’engage à porter pendant cinq ans des propositions de
lois qui répondent aux exigences populaires », est-il écrit dans la
résolution. Mais les conditions posées par La France insoumise
inquiètent. Le mouvement de Jean-Luc Mélenchon a annoncé mi-octobre
vouloir présenter des candidats « labellisés » FI dans toutes les
circonscriptions. À la clé une « charte » comprenant des conditions
politiques et financières à l’obtention de l’investiture.
Pour les législatives, le PCF met sur la table un autre « label »
« S’il est sûr qu’aucun candidat communiste ne ratifiera
(cette) charte, nous n’avons aucune garantie que si nous ne le faisons
pas, il n’y aura pas partout, y compris là où nous avons des sortants,
de candidats de La France insoumise », a relevé Igor Zamichiei,
secrétaire du PCF parisien, pointant également des désaccords de fond
avec Jean-Luc Mélenchon, notamment sur l’Europe. « Quel que soit notre
choix, l’échéance sera difficile. Si nous provoquons la division nous ne
serons pas compris », a argué, pour sa part, Patrice Bessac. Et le
maire de Montreuil d’ajouter : « Je n’aime pas les ultimatums et les
coups de menton des responsables de La France insoumise mais j’aime
encore moins que mon parti sans préparation se lance dans une aventure
qui ajoute au désordre. » Toujours est-il que, pour les législatives, le
PCF met sur la table un autre « label », « unis pour l’humain d’abord
», dans l’espoir de réunir largement autour d’un « pacte d’engagement
pour une nouvelle majorité » (lire ci contre). « Aucune force, a insisté
Pierre Laurent, ne peut prétendre constituer seule une majorité à
l’Assemblée nationale. »
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire