Contre toutes attentes, le
républicain populiste Donald Trump remporte l'élection présidentielle
américaine, un séisme politique aux Etats-Unis qui plonge le monde dans
une incertitude vertigineuse.
Les
marchés ont dévissé au fur et à mesure que les informations ont été
distillées par les médias américains lors d'une soirée électorale
complètement folle.
Huit ans après l'élection de Barack Obama, premier président noir
qui avait suscité une immense vague d'espoir à travers le pays, le
républicain populiste de 70 ans, taxé de sexisme et de xénophobie par
ses adversaires, était en passe de l'emporter sur la démocrate Hillary
Clinton qui espérait devenir la première femme présidente des
Etats-Unis.
Il a fait campagne comme l'outsider déterminé à mettre fin à la
corruption des élites politiques qui ont selon lui "saigné le pays à
blanc". En promettant de "rendre à l'Amérique sa grandeur", son slogan
et de la protéger de l'extérieur.
Ce milliardaire imprévisible, que personne n'avait vu venir, avait
promis lundi un "Brexit puissance trois", référence au vote surprise des
Britanniques pour sortir de l'Union européenne.
Il avait durant toute sa campagne galvanisé un électorat blanc
modeste se sentant laissé pour compte face à la mondialisation et aux
changements démographiques, auquel il décrivait un avenir sombre.
Ce développement choc intervient à l'issue de 18 mois d'une
campagne électorale qui a profondément divisé les Etats-Unis et stupéfié
le monde par ses outrances et sa violence.
Plus de 60% des Américains pensaient que Donald Trump n'avait pas
le caractère pour devenir président. Mais il a réussi à capter la colère
et les angoisses d'une partie des Américains.
Ses propositions restent vagues dans un certain nombre de domaines,
comme la politique étrangère. Et elles suscitent l'inquiétude dans
d'autres, comme l'économie.
La possibilité d'une présidence Trump a violemment secoué les
marchés. Le dollar a chuté alors que les investisseurs se précipitaient
sur les valeurs refuges comme l'or et les marchés obligataires.
Au fil de la soirée, le chemin vers la Maison Blanche s'est fait de
plus en plus étroit pour Hillary Clinton, qui depuis des mois était la
favorite des sondages.
Vers 5H30 GMT, l'élection était suspendue aux résultats d'une toute
petite poignée d'Etats -Michigan, Wisconsin, Pennsylvanie, New
Hampshire.
L'homme d'affaires milliardaire, en qui personne ne croyait
lorsqu'il a lancé sa candidature en juin 2015, n'a jamais occupé le
moindre mandat électif.
Outre la Floride, la Caroline du Nord et l'Ohio, deux autres Etats
cruciaux, étaient tombés dans son escarcelle plus tôt dans la soirée.
Preuve de son optimisme, le magnat de l'immobilier a tweeté trois
heures avant sa victoire une photo de lui avec son colistier Mike Pence,
son équipe et sa famille regardant les résultats depuis la Trump Tower
sur la Ve avenue à Manhattan, où il a ses bureaux et son appartement, un
luxueux triplex aux allures de mini-Versailles.
"Je pense que nous allons gagner !", jubilait Brendon Pena, 22 ans,
supporteur de Trump, dans l'hôtel new-yorkais où l'équipe de campagne
du milliardaire avait prévu "une fête de victoire". "J'y ai toujours
cru. Je pense que Donald Trump est un type très intelligent".
"C'est incroyable ! Je pense qu'il va aller jusqu'au bout",
soulignait de son côté Glenn Ruti, 54 ans. "Le pays veut du changement".
Et au fil des résultats, les mines se sont allongées à l'intérieur de la soirée électorale d'Hillary Clinton, 69 ans.
La voix des journalistes de CNN et de CBS, projetées sur des écrans géants, résonnaient dans un étrange silence.
Certains supporteurs choqués, venus parfois de très loin, sont partis en pleurant sans attendre le résultat final.
"C'est tout simplement incroyable", se désolait Anabel Evora, 51
ans. "Je prie et je ne suis pas croyante... Nous avons besoin d'un
miracle. Je suis triste, je sens que je vais pleurer".
Mme Clinton a regardé les résultats avec son mari Bill Clinton,
leur fille Chelsea, son mari et leur deux enfants dans un hôtel de New
York.
"Nous étions confiants ce matin et cet après-midi, rien n'a changé"
affirmait encore en soirée un membre de son équipe de campagne.
Plus de 200 millions d'Américains étaient appelés aux urnes mardi
pour choisir le successeur de Barack Obama, extrêmement populaire, qui
quittera la Maison Blanche le 20 janvier après huit années au pouvoir.
Sa première élection, en 2008, avait nourri l'espoir d'un pays plus uni que la campagne 2016 a profondément divisé.
Pour l'emporter et devenir président de la première
puissance mondiale, les deux candidats devaient franchir le cap crucial
des 270 grands électeurs. A 5H50 GMT, M. Trump disposait de 245 grands
électeurs contre 215 à Mme Clinton, selon un décompte de l'AFP.
Hillary Clinton comptait pour l'emporter sur les minorités, les
jeunes, les électeurs blancs diplômés et sur les femmes qui constituent
la majorité de l'électorat (environ 52% lors des précédentes
présidentielles).
Celle qui a été tour à tour Première dame, sénatrice de New York
puis chef de la diplomatie américaine, présentait un CV impressionnant,
mais sa personnalité suscite peu d'enthousiasme.
Elle était arrivée à New York en début de soirée pour affiner avec
son équipe son discours, dans un centre de conférences au toit de verre,
le Javits Convention Center.
"J'espère qu'il y a plus d'Américains sains d'esprit que fous", y
disait Sharon Jones, 50 ans, venue de Chicago, avant le résultat final.
Et si Donald Trump l'emportait mardi soir ? "Il paraît que le Canada
c'est très beau au printemps", plaisantait-elle, évoquant avant les
résultats la possibilité de quitter le pays.
La campagne, particulièrement violente, faite souvent d'attaques
personnelles, a laissé un goût amer et a accru la méfiance des
Américains envers leur classe politique.
Les Américains votaient aussi mardi pour renouveler 34 des 100
sièges du Sénat à Washington et la totalité de la Chambre des
représentants, dont les républicains ont conservé la majorité mardi.
Le sénateur Marco Rubio, ancien rival de M. Trump aux primaires, a conservé son siège.
Douze des 50 Etats américains élisaient aussi de nouveaux
gouverneurs, et des dizaines de référendums locaux étaient organisés,
sur des questions allant de la légalisation de la marijuana à la
suppression de la peine de mort.
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