mercredi 16 novembre 2016

"On sait combien la situation financière des départements est précaire du fait de l’explosion des dépenses sociales"

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Concernant la politique social des départements et l’avenir de la protection de l’enfance Michel Le Scouarnec (groupe CRC) a écrit à la Ministre des Familles, de l’enfance et des Droits des femmes :
"Madame la Ministre,
Je souhaite attirer votre attention sur la politique sociale des Départements, et précisément sur la protection de l’enfance.
Dans l’histoire des réformes territoriales, c’est par la loi « Defferre » du 22 juillet 1983 que le département s’était vu confier la compétence de l’aide sociale à l’enfance, puis la loi du 5 mars 2007 réformant la protection sociale avait réaffirmé le rôle central du Département, notamment dans le recueil des informations, créant des observatoires départementaux de la protection de l’enfance.
L’importante réforme territoriale engagée par votre Gouvernement, si elle modifie l’architecture territoriale de la République et réorganise les compétences des Régions, Départements, Collectivités locales, ne marque pas une réorganisation d’ampleur de la compétence sociale.
Ainsi La loi du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, dite « loi MAPTAM », fait des Départements le niveau de collectivité chef de file en matière d’action sociale et de développement social. La loi NOTRe, du 7 août 2015 précise que « les Départements sont compétents pour mettre en œuvre toute aide ou action relative à la prévention ou à la prise en charge des situations de fragilité, au développement social, à l’accueil des jeunes enfants et à l’autonomie des personnes ».
Si le texte supprime la clause générale de compétence pour les Départements et les Régions, il réaffirme que « le Département reste responsable des compétences de solidarité dont les politiques relatives à la protection de l’enfance et à l’adoption. »
Malheureusement on sait combien la situation financière des Départements est précaire du fait de l’explosion des dépenses sociales.
Dans sa dernière enquête annuelle sur les dépenses sociales des Départements, en date du 21 juin 2016, l’Observatoire National de l’Action Sociale (ONAS), note que celles-ci représentent toujours 65% des dépenses totales de ces collectivités.
Le rapport révèle également que la charge nette relative aux dépenses sociales a augmenté, sur la période 2010-2015, deux fois plus vite que l’ensemble des autres dépenses des collectivités : +25% contre +11%. Concernant les dépenses en faveur de l’aide sociale à l’enfance en 2015, elles étaient de 7,2 milliards hors personnel (+ 2,7).
Face à ce constat, Les Départements sont contraints de revoir à la baisse, voire abandonner, d’autres politiques (soutien aux communes, subventions aux associations…), y compris dans le domaine social, notamment sur les politiques de prévention.
A ce sujet, les équipes de professionnels qui exercent au sein de services de l’Aide Sociale à l’Enfance (éducateurs, psychologues, gestionnaires, assistants familiaux etc.) sont aujourd’hui très inquiets pour l’avenir de la Protection de l’Enfance.
J’ai moi-même été alerté par le personnel de l’Aide Sociale à l’Enfance au centre Médico-Social d’Auray, de la décision du Président du Conseil Départemental du Morbihan, au 31 août 2016, de ne pas renouveler le contrat de certains psychologues du Services de l’Aide Sociale à l’Enfance, une restructuration plus générale des postes de psychologue de ce même service étant également envisagée.
D’autres Conseils départementaux voisins auraient déjà pris des décisions similaires, contraints de poursuivre leurs efforts de rationalisation dans la gestion des compétences sur lesquelles ils peuvent agir. Pourtant, les fonctions exercées par les psychologues au sein des services de l’Aide Social à l’Enfance jouent un rôle primordial dans la prévention qui seule, à terme, viendra atténuer les besoins en action sociale.
En France, chaque année, près de 150 000 enfants sont confiés à l’Aide Sociale à l’Enfance des départements suite à une décision de placement prononcée en raison de maltraitance, de problèmes sociaux et éducatifs. Depuis la décentralisation des progrès incontestables ont été réalisés : diversification des services offerts aux familles, respect du droit de l’enfant et des parents, développement d’un travail social de proximité … Mais le système de protection de l’enfance est fragile ; ce qui a été construit en plusieurs décennies pourrait être déconstruit par des choix de politique publique.
Je sais pouvoir compter sur tout votre engagement à œuvrer en faveur d’évolutions institutionnelles qui consolident la mission publique d’aide sociale à l’enfance et contribuent à bâtir une société qui avance dans le sens du progrès social.
Dans l’attente d’une réponse de votre part, je vous prie de croire, Madame la Ministre, en l’expression de mes meilleurs sentiments."

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