par Julian Mischi
&
Olivier Pasquiers
&
Caroline Pottier
&
Nicolas Renahy
Malgré la désindustrialisation et la crise toujours plus aiguë des
anciennes places fortes de l’industrie, les ouvriers demeurent un groupe
incontournable de la société française. Les photographies et le texte
présentés ici racontent les mutations de leur travail et la recomposition des territoires et du groupe ouvrier, qui nourrissent son affaiblissement politique.
Le groupe ouvrier a joué un rôle central dans la mise en forme et la
représentation des intérêts des classes populaires au cours du
XXe siècle. Derrière l’apogée de l’usine de masse, qui regroupait la
majorité des travailleurs subalternes et unissait leur condition de vie,
le peuple avait une figure bien identifiée, tant par ses « ennemis de
classe » que par ses alliés – artistes, intellectuels ou élus des partis
de gauche. Après 30 ans de désindustrialisation continue et de casse
des collectifs constitués, les classes populaires semblent avoir perdu
leur fer de lance. Les ouvriers font-ils définitivement partie d’une
histoire française révolue ? Les bâtiments à sheds (toits en dents de
scie) ne sont-ils voués qu’à disparaître ou à être, au mieux,
réhabilités en espaces culturels, transformés en patrimoine d’un passé
révolu ? Rendre compte du monde ouvrier contemporain demande de se
départir tant d’un ethnocentrisme de classe qui oublie qu’un actif sur
cinq est encore aujourd’hui un ouvrier, que d’un passéisme regrettant
les grandes mobilisations fédératrices des années 1960 et 1970.
Déclin des places fortes de l’industrie et mutations du travail ouvrier
De fait, après les secteurs du textile et des mines touchés dès les
années 1950, les grandes restructurations se sont accélérées dans les
années 1970 avec la désindustrialisation des vieux bassins d’emploi
industriels, en particulier du nord et de l’est de la France. Ce sont
les places fortes du monde ouvrier organisé, les secteurs économiques de
travail industriel stabilisé, ancien et qualifié qui entrent en déclin,
entraînant souvent celui de zones entières : la faillite d’une grande
entreprise métallurgique ou sidérurgique entraîne la décadence
économique de la région qu’elle faisait vivre. Pour les salariés qui
sont toujours en activité, la peur de perdre son emploi s’est
généralisée, les ouvriers étant la catégorie la plus affectée par le
chômage.
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