Par
Antoine Dumini,
Nicolas Hirth
Contre l’impôt sur le revenu, au fil d’un siècle, la bourgeoisie a
usé de toutes les armes : les fusils si nécessaire, la dictature
pourquoi pas, le Sénat qui traîne des pantoufles, les campagnes de
presse calomnieuses… Au nom de « la morale » et de « l’honneur », bien
sûr.
Le 16 mars 1914, Henriette Caillaux, la femme du ministre des
Finances, se fait conduire au Figaro. Elle demande à voir le rédacteur
en chef, Gaston Calmette. Reçue en tête-à-tête, elle vide le chargeur de
son revolver et l’éditorialiste meurt dans la soirée.
C’est le premier mort, pourrait-on dire, de la Grande Guerre.
C’est surtout le dernier mort d’une bataille séculaire, d’une féroce opposition des possédants à l’impôt sur le revenu.
Inventer dans l’urgence
« Le meilleur moyen de répartition de l’impôt consisterait à
obliger chaque particulier à faire une déclaration exacte de tout ce
qu’il possède, faire une masse de tout et répartir la masse des
impositions proportionnellement. »
C’est à
Saulchery, dans l’Aisne, près de Château-Thierry, qu’on trouve, en 1788,
cette proposition de réforme fiscale assez radicale. Et la date ne doit
rien au hasard : certes, sous l’Ancien Régime, cette idée était parfois
émise, ici ou là. Mais c’est avec la Révolution française qu’elle
allait germer pour de bon.
Dès l’été 1789 d’ailleurs, la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen énonce, dans son article 13 :
" Pour l’entretien de la force publique, et pour les
dépenses d’administration, une contribution commune est indispensable ;
elle doit être également répartie entre tous les citoyens, en raison de
leurs facultés."
Ça restait flou, un joli principe. Bientôt, en lutte
contre toute l’Europe, avec des soldats à nourrir, vêtir, armer, la
France va réclamer des décisions plus vigoureuses.
Le 20 mai 1793, la Convention vote, par décret, un emprunt forcé d’un milliard sur les riches.
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