«
Ce qui nous rassemble, c’est le soutien à ceux qui sont en lutte » a
souligné Philippe Martinez, secrétaire général de la CGT.
Deux
cent quarante défilés en France et 55 000 manifestants à Paris, selon
la CGT. Contre la politique du gouvernement, cheminots, fonctionnaires
ou manifestants en famille croisés dans le cortège appellent à continuer
la lutte ensemble.
L’eau
continue à monter… et ce ne sont pas les affrontements avec les CRS en
tête de cortège parisien, la manifestation coupée très rapidement, puis
détournée par la gare de Lyon, qui ont empêché le traditionnel défilé du
1er Mai de déferler. Éditocrates et gouvernement reprochaient aux
syndicats de se mobiliser en ordre dispersé : « Ce qui nous rassemble,
c’est le soutien à ceux qui sont en lutte », répliquait hier en début de
cortège le secrétaire général de la CGT, Philippe Martinez. Certes,
« il faut mettre de côté nos différences », reconnaissait-il, soulignant
cependant que « dans 40 % des départements, il y a des rassemblements
avec FO ou en présence de la CFDT (qui n’appelaient pas nationalement à
la manifestation – NDLR) ». « Un tas de choses bourgeonnent, estimait
lui aussi Éric Beynel, porte-parole de Solidaires, en tête du défilé.
Chez les cheminots, dans les finances publiques, parmi les étudiants et
les enseignants… »
«Emmener les enfants en manif, c’est un mode d’éducation »
Comme pour confirmer leur analyse, de nombreux
syndicalistes FO s’étaient rassemblés autour du camion de leur
organisation d’Île-de-France : « Notre mobilisation aujourd’hui a pour
but de souligner la présence de notre syndicat avec les camarades des
autres organisations », insistait Éric Mercier, enseignant en classes
préparatoires scientifiques et syndiqué FO. « À titre personnel, je
manifeste pour les salaires, contre le gel du point d’indice des
fonctionnaires. Sur le plan de l’éducation, il y a beaucoup de choses à
défendre, sur la formation des collégiens et des lycéens, contre un bac
qui se rapproche du contrôle continu et qui va accélérer les disparités
entre établissements au détriment des quartiers les plus défavorisés.
Concernant Parcoursup, on a une lisibilité très faible, des décisions
contradictoires prises rapidement. » Éric Mercier est donc contre la
politique d’Emmanuel Macron et pour la convergence des luttes. Ou
plutôt, pour « l’unité d’actions », comme l’a repris un compagnon
retraité se réappropriant les termes du nouveau secrétaire général du
syndicat Pascal Pavageau, élu la semaine dernière à la tête de
l’organisation, s’affichant volontairement plus combatif que son
prédécesseur Jean-Claude Mailly.
La convergence est compliquée à construire
Sébastien, cheminot en grève Gare de Lyon, s’est syndiqué
ce 1er mai à la CGT, rejoignant sa femme, ex-RH au chômage depuis un an,
à la suite d’un burn-out. Et c’est en famille qu’ils battaient le pavé
hier avec leurs deux filles de 12 et 14 ans. « Les emmener en manif,
c’est un mode d’éducation » affirmait Mélanie, la mère. « Si elles ne
sont pas sensibilisées à leurs âges à l’actualité, aux décisions
politiques, aux projets de loi en cours, que voteront-elles à 18 ans ?
Elles doivent se construire politiquement. » Leur père, cheminot depuis
quinze ans, ex-conducteur travaillant aujourd’hui dans les bureaux
craint « pour mon boulot, mon avenir ». Si la réforme passe, « je serai
remplacé par des sous-traitants et en tant qu’usager je n’aurai plus de
train pour aller travailler car je suis situé sur un tronçon non
rentable que seul le service public peut faire fonctionner. »
La convergence est compliquée à construire reconnaît ce
postier, syndiqué à Sud PTT. Mais, par rapport à l’an dernier, « le fond
de l’air a rougi ». « Au niveau de la Poste, notre mouvement de
mobilisation rappelle le mouvement national global, remarque Eddy
Talbot. Il y a des grèves un peu partout : depuis quatre mois en
Ille-et-Vilaine, en Gironde, dans les Hauts-de-Seine… Mais il n’y a pas
de mouvement global pour faire reculer La Poste. » Pour Eddy Talbot, le
gouvernement, en « montrant les muscles à Notre-Dame-des-Landes, dans
les universités », est conscient de la réaction que cela peut générer.
« Alors, il tente la campagne idéologique comme il l’a fait contre les
cheminots en voulant les faire passer pour des privilégiés. Mais ça n’a
pas marché. Et même les syndicats qui ne sont pas dans une tradition de
lutte de classes commencent à réagir. » Pour ce syndicaliste, face à un
Macron qui veut supprimer les corps intermédiaires, « la mobilisation
est un vrai enjeu pour l’ensemble du mouvement syndical ».
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