jeudi 30 novembre 2023

Inflation : quatre associations interpellent Emmanuel Macron et demandent une « transparence totale » sur les prix alimentaires


Quatre organisations de défense des consommateurs ont adressé, ce mercredi 19 novembre, une lettre au président de la République pour demander une « transparence totale » sur les marges des industriels et distributeurs et sur la construction des prix alimentaires.

Les signataires rappellent que l’inflation alimentaire a atteint plus de 20 %, le prix d’un litre de carburant a régulièrement avoisiné les 2 euros, et celui de l’énergie s’est envolé. Photo by Thibaut Durand/ABACAPRESS.COM

« Ces 2 dernières années ont été particulièrement éprouvantes pour le budget de nombreux ménages. » Ainsi commence la lettre écrite par les associations Foodwatch, UFC-Que Choisir, Familles Rurale et la CCLV (Consommation Logement Cadre de Vie), et adressée au président de la République.

Les signataires rappellent que l’inflation alimentaire a atteint plus de 20 %, le prix d’un litre de carburant a régulièrement avoisiné, voire dépassé les 2 euros, et celui de l’énergie s’est envolé. Partant de ce constat, et alors que certaines entreprises enregistrent des profits records, les associations exigent que « toute la lumière sur la construction des prix alimentaires » soit faite et de « mettre fin au plus vite aux marges excessives ».

Le 23 novembre, l’Insee publiait son étude annuelle, « France, portrait social », qui détaille les impacts économiques du système socio-fiscal et de l’inflation. Bilan : la hausse du niveau de vie ne permet pas de compenser les dépenses supplémentaires liées à l’inflation. Et évidemment, surtout pour les foyers les plus modestes.

« Comment tolérer qu’un français sur trois saute un repas ? »

Les profits des entreprises alimentent, depuis plusieurs mois, cette flambée des prix et c’est le FMI qui le dit dans une étude qui a fait couler beaucoup d’encre cet été : les bénéfices des entreprises de la zone euro ont contribué à hauteur de 49 % à la hausse des prix au premier trimestre 2023, devant les salaires, les coûts de l’énergie, etc. Le FMI ne s’intéresse pas spécifiquement à l’Hexagone, mais l’Insee nous apprend que le taux de marge des sociétés non financières y a atteint le chiffre stratosphérique de 33,2 % au deuxième trimestre 2023. Entre 1950 et 2022, jamais un tel niveau n’avait été atteint. Benoît Cœuré, président de l’Autorité de la concurrence, estime même que deux tiers de l’inflation, dans la zone euro, seraient le fait des entreprises.

Alors, « comment tolérer qu’en France, au XXIsiècle, face à cette flambée organisée des prix, près d’un Français sur trois (29 %) déclare devoir sauter un repas par manque d’argent et 43 % (55 % en milieu rural) affirment avoir déjà renoncé à acheter des aliments et produits alimentaires, faute de moyens ? », demandent les associations. Les entreprises du CAC 40 sont évidemment les grandes gagnantes de la période. Selon les données de Scalens (une entreprise de data spécialisée dans les sociétés cotées) transmises à l’Humanité, 24 sociétés du CAC 40 voient flamber de 20 % leurs marges opérationnelles au premier semestre 2023. Si les patrons s’étaient contentés de répercuter sur leurs prix la hausse de leurs coûts de fabrication, ces marges auraient stagné.

Foodwatch, l’UFC-Que choisir, Familles rurales et la CCLV dénoncent ensuite l’inaction du gouvernement, en pointant certaines déclarations non suivies d’effets, comme celle du ministre de l’Économie Bruno Le Maire – « C’est le rôle de l’État de garantir l’ordre public, économique, qu’il n’y a pas de profits qui soient excessifs, de rentes faites par certains et que l’argent soit rendu aux consommateurs » –, ou celle du président de la République Emmanuel Macron – « Personne ne doit profiter de cette crise ».

Contrôler les marges

Mais les quatre associations ne s’arrêtent pas là. Après avoir dénoncé cet état de fait, elles proposent des « solutions urgentes » et exigent : « L’obligation de transparence totale et immédiate sur les marges nettes par produits réalisées par les géants de l’industrie agroalimentaire et de la grande distribution, des mesures concrètes pour rendre impossibles les marges excessives sur les produits alimentaires essentiels, sains et durables, tant par les industriels que par la grande distribution, et la suppression de la marge minimale garantie de 10 % pour la grande distribution. »

Au rang des solutions pour lutter contre l’inflation et ses conséquences, imposer un contrôle sur les marges arrive dans le classement de tête. Mais d’autres mesures, défendues par les syndicats et la gauche, elles aussi ignorées par l’exécutif, sont tout aussi urgentes, comme la réindexation des salaires sur l’inflation, l’augmentation du Smic à 2 000 euros brut, la taxation des superprofits pour financer des politiques de justice, ou encore de reprendre le contrôle sur les grandes multinationales de l’énergie.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire