dimanche 24 septembre 2017

François de Rugy lance un long chantier pour l’Assemblée

Le président de l’Assemblée nationale a associé hier tous les groupes politiques à son projet de réforme du Parlement. Nombre d’élus craignent un affaiblissement du rôle du député.
François de Rugy s’est voulu rassurant hier en lançant son projet de « Parlement du XXIe siècle ». Devant de nombreux députés, le président de l’Assemblée nationale était attendu au tournant, tant le programme d’Emmanuel Macron sur la question inquiète des élus de tous bords. Le président de la République veut en effet diminuer d’un tiers le nombre de parlementaires, faire voter les lois en commission et réduire le temps législatif à trois mois par an. Autant de mesures, soutenues par François de Rugy, qui risquent d’affaiblir le Parlement, et qui s’ajoutent au profond mépris de l’exécutif envers les députés, du recours aux ordonnances pour réformer le Code du travail cet été à l’entrée en vigueur, aujourd’hui même, du Ceta sans que la représentation nationale ait eu son mot à dire.

La crainte d’un énième écran de fumée

C’est dans ce contexte que François de Rugy a soigné les formes, hier, en présentant le plan adopté pour « passer en revue, en cinq ans, l’ensemble des procédures et de l’organisation » du Palais-Bourbon. Sept groupes de travail composés de dix députés de toutes sensibilités politiques, hormis les non-inscrits, ont été créés. Une présidence a même été attribuée à chaque groupe politique de l’Assemblée. Problème : les sept rapporteurs des sept groupes de travail sont tous membres de la majorité (six LREM et un Modem). « C’est assez incompréhensible, sachant que c’est le rapporteur qui aura un lien direct avec le président de l’Assemblée nationale et qui sera chargé de rédiger le rapport final. C’est l’un des aspects qui nous fait craindre un énième écran de fumée. Nous serons donc très attentifs et veillerons à défendre le rôle et la place du Parlement dans notre République », mesure Elsa Faucillon, députée PCF et présidente du groupe de travail « ouverture de ­l’Assemblée nationale à la société ».
Après s’être octroyé tous les postes de questeurs, la majorité récidive donc. « Ce qui m’interroge surtout, c’est que, pour nombre de mesures que nous soumettrons, c’est le bureau de l’Assemblée qui décidera. Au lieu de laisser les députés légiférer comme il se doit, on leur retire de nouveau leurs prérogatives », confie Michel Larive, député FI qui préside le groupe « conditions de travail à l’Assemblée et statut des collaborateurs ». D’autres conclusions devraient toutefois être soumises à un vote dans l’Hémicycle, et les réformes à caractère constitutionnel devront obtenir l’assentiment des trois cinquièmes du Congrès, qui réunit l’ensemble des députés et des sénateurs.
Il faudra notamment en passer par là au sujet du vote des lois en commission. « Nous sommes résolument opposés à cette mesure, prévient Elsa Faucillon. Les députés ne sont pas élus pour siéger dans une commission ou une autre, et pour voter uniquement sur les sujets qui s’y rapportent. Non, nous sommes élus pour voter toutes les lois, dans un même hémicycle qui doit réunir tous les membres de la représentation nationale. » La suppression d’un tiers des parlementaires devrait elle aussi être examinée lors du Congrès à venir. « La majorité dit vouloir renforcer le lien entre les élus et les citoyens, mais elle veut diminuer le nombre d’élus. C’est assez contradictoire. François de Rugy dit vouloir baisser le nombre de députés afin d’augmenter le nombre de collaborateurs par député. Pourquoi opposer les deux ? Il s’agit d’une vision purement comptable qui me laisse perplexe. L’Assemblée nationale n’est pas une entreprise mais doit être le cœur battant de la République et avoir les moyens conséquents », argumente Michel Larive.
François de Rugy a annoncé qu’une « conférence des réformes » sera tenue tous les six mois pour faire un point sur l’état des travaux. Il a assuré que l’action des députés sera respectée. « Le résultat n’est pas connu à l’avance. Personne ne verra sa propre vision s’imposer. Même pas la mienne. Nous ferons tous avancer cette réforme », a-t-il lancé, avant de prévenir : « S’il n’y a pas de consensus, cela ne m’empêchera pas d’agir. » Au nom de l’« efficacité », il a appelé à diminuer les navettes parlementaires entre l’Assemblée et le Sénat, et à accélérer le temps législatif, « trop long pour les citoyens ». « Si l’efficacité, c’est de ne pas prendre le temps de la démocratie, la défiance ne pourra que croître », prévient Elsa Faucillon. 
Rôle de contrôle du parlement
François de Rugy veut renforcer le rôle de contrôle du Parlement « dans l’après-vote de la loi ». « Il ne faut pas opposer temps législatif et temps de contrôle, mais nous avons ici beaucoup à faire. L’exécutif a sa part dans le retard d’application des lois, de décrets non pris en décrets dénaturés. Le déséquilibre entre les pouvoirs législatif et exécutif est ici criant », analyse Cécile Untermaier, élue PS et présidente du groupe « démocratie et numérique ».

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