Des spectres hantent l’Europe. Alors que le capitalisme n’en
finit plus de faire la preuve de sa dangerosité meurtrière, la gauche radicale
est en tête en Grèce et en Irlande. Partout ailleurs qu’en Allemagne, le
néolibéralisme ne produit plus qu’échec sur échec pour les partis de la
bourgeoisie. Celle-ci se tourne vers des extrêmes droites regonflées pour
verrouiller sa domination dans la violence. En France, la gauche entre dans une
phase de reconfiguration forcée : alors que le PS est en phase terminale s’ouvre
le moment d’un possible grand retour du Parti Communiste. Enregistrant depuis
2012 un regain militant en même temps que le « communisme » connaissait une
nouvelle expansion dans le champ intellectuel, le parti, définitivement sorti
des aventures de liquidation, a montré qu’il était capable de gagner des villes
importantes aux dernières municipales. Il appartient désormais aux militants de
faire de ce frémissement le premier pas d’un réarmement général du PCF, seul
parti français brandissant le communisme dans son nom, pour l’égalité et le
partage des richesses au bénéfice de tous.
Mort du huïsme
« Les partis sont
morts mais ils ne le savent pas encore », écrit Robert Hue, ancien dirigeant du
PCF passé au social-libéralisme, dans un livre récent. Une thèse loin d’être
nouvelle, partagée par la gauche « mouvementiste » comme par les opportunistes
promoteurs d’un « dépassement » des partis dans des rassemblements citoyens
(sur le modèle de Podemos en Espagne). Mais si le même Robert Hue, du temps de
la « mutation » (1994-2001), s’est en effet ingénié à lancer une grande
procédure de liquidation de son propre parti, sa tentative, dans un
retournement dialectique caractéristique, a au contraire paradoxalement
participé à la reviviscence du PCF. En effet, « l’érosion » et la « mutation »
des dernières décennies n’ayant finalement pas débouché sur une liquidation,
elles ont été suivies, par leur échec même, de contreparties positives et de
recommencements de tous ordres : rajeunissement, démocratisation importante des
procédures internes, dépersonnalisation du pouvoir, reconstitution des réseaux
du MJCF et de l’UEC, « Enterrement de l’enterrement du PCF »… Le ratage de la
mutation aura donc fini par faire muter le parti dans le sens inverse du projet
huïste, de telle sorte que cette crise de désorganisation peut se lire après
coup comme ayant rendu possible, partiellement et malgré elle, le rebond «
positif » ultérieur.
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