La
Mairie de Paris n’a pas l’intention de faire marche arrière. Objectif :
préserver la mixité sociale dans cette ville parmi les plus chères du
monde. François Perri/REA
Au
terme d’une intense bataille juridique, 46 appartements situés dans le
16e arrondissement de la capitale vont être transformés en HLM.
Et
si finalement tout se passait bien ? En visitant hier certains des
46 appartements situés dans le très chic 16e arrondissement de Paris,
vendus par la ville au bailleur Elogie-Siemp pour en faire des logements
sociaux, Ian Brossat, adjoint PCF en charge du logement, s’est montré
optimiste. « Nous faisons souvent une expérience paradoxale. Nous
rencontrons des oppositions fortes au départ, mais, une fois les
locataires installés, la cohabitation se passe bien et les a priori
finissent par tomber. » À l’image du tollé déclenché par le projet de
centre d’hébergement pour personnes à la rue, installé aux abords du
bois de Boulogne, la décision de créer des appartements HLM dans deux
immeubles années 1930 de ce quartier cossu n’a pas été sans soulever de
résistances. Dès le vote du Conseil de Paris, autorisant en septembre
2015 à vendre à un bailleur social ces logements appartenant au domaine
privé de la ville, les syndics des deux copropriétés concernées ont
lancé une guérilla juridique. Chacun a attaqué la décision du Conseil,
l’un au tribunal administratif, l’autre au tribunal de grande instance.
Contestation du choix municipal de céder les logements évalués à 7 500
euros le m2 au prix de 3 500 euros le m2, mise en avant du règlement de
copropriété qui précise le caractère « bourgeois » de l’immeuble,
évocation des risques de « dégradation des conditions de vie » : au fil
des appels et contre-appels, les syndics ont fait valoir tous les
arguments possibles pour tenter d’empêcher l’opération. Sans succès. Le
23 novembre dernier, la Cour de cassation, dernière instance judiciaire
dont la mission est de veiller à la bonne application de la loi, a
rejeté l’ultime pourvoi des copropriétaires, ouvrant la voie à la
réalisation du projet.
éviter les ghettos… de pauvres, comme de riches
Balcon
filant avec vue dégagée sur l’hippodrome d’Auteuil, hauteur sous
plafond, grande terrasse de 45 m2 : l’appartement de l’avenue du
Maréchal-Lyautey est un des fleurons de l’opération. Une fois rénovés,
ses 84 m2 seront loués pour 614 euros, auxquels il faudra ajouter 226
euros de charges, élevées dans cet immeuble avec concierge, tapis rouge
et cage d’ascenseur en fer forgé. « Sur les 46 logements, 27 seront en
Plai, le type de HLM le moins cher, et les 19 autres en Plus. Aucun en
PLS, la catégorie la plus chère des HLM », explique Valérie de Brem,
directrice générale d’Elogie-Siemp, le bailleur social choisi en raison
de son expérience dans la gestion de logements sociaux au sein de
copropriétés privées. Pour l’heure, seuls 21 appartements sont
disponibles. Bénéficiant d’un droit au maintien dans les lieux, les
locataires des autres garderont leurs loyers actuels jusqu’à leur
départ, la Siemp proposant même une réduction à ceux dont les revenus
sont inférieurs aux plafonds HLM.
« La
décision de la Cour de cassation a ouvert la voie, commente Ian
Brossat. Si elle avait invalidé l’opération, cela aurait créé un
précédent. » C’est que la Mairie de Paris n’a pas l’intention de faire
marche arrière. Pour préserver la mixité sociale dans cette ville parmi
les plus chères du monde, l’objectif est de se doter de 30 % de
logements sociaux d’ici à 2030. « Mais il s’agit aussi de rééquilibrer
entre les quartiers de l’Est, qui ont jusqu’à 35 % de HLM, et des
arrondissements comme le 16e, qui n’en abrite que 2 % », explique encore
Ian Brossat. Ces opérations réalisées en secteur diffus ont un autre
avantage. Elles évitent les ghettos… de pauvres, comme de riches.
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