mercredi 8 mai 2024

Guerre à Gaza : évacuation de 100 000 habitants et assaut imminent sur Rafah

Alors qu’une réunion d’urgence a été décrétée le 5 mai pour relancer les négociations sur une trêve à Gaza, Benyamin Netanyahou reste déterminé à lancer l’assaut sur Rafah, ville surpeuplée dans le sud de l’enclave, dont 100 000 habitants ont commencé à être évacués. Le Hamas conditionne, de son côté, tout accord à un arrêt définitif des combats. À Gaza, guerre et famine continuent de semer la mort. Un désastre dont Israël s’attache à étouffer l’écho, par sa décision de fermer la chaîne qatarie Al-Jazeera.

 

Déjà infime, l’espoir d’une trêve pour les habitants de la bande de Gaza s’amenuise à mesure que les négociations entre Israël et le Hamas s’enlisent. Signe de l’état critique des pourparlers : une réunion d’urgence a été décrétée par les pays médiateurs, Qatar, Égypte et États-Unis, autour des conditions de cet accord qui prévoit une trêve associée à une libération d’otages retenus dans la bande de Gaza, en échange de prisonniers palestiniens détenus par Israël. Face aux positions irréconciliables des deux camps, l’issue semble fort compromise.

 Positions irréconciliables entre Israël et le Hamas

Alors que le mouvement islamiste persiste à conditionner tout accord à un arrêt définitif des combats, le gouvernement israélien n’en démord pas : il mènera, trêve ou pas, son offensive terrestre contre Rafah, ville au sud de l’enclave palestinienne, dernier refuge pour plus de 1,5 million de Gazaouis. Le premier ministre Benyamin Netanyahou, mettant la réprobation internationale grandissante à l’égard de sa politique sur le compte du « terrible volcan de l’antisémitisme », a de nouveau martelé « qu’aucune pression, aucune décision d’une instance internationale n’empêchera Israël de se défendre ».

Au risque de raidir les États-Unis, son principal allié, qui avait réaffirmé, la semaine dernière, son hostilité à une telle opération. « Nous ne pouvons et ne soutiendrons pas une opération militaire majeure à Rafah sans un plan efficace pour garantir que les civils ne soient pas blessés. Et non, nous n’avons pas vu un tel plan », avait déclaré le 1er mai Antony Blinken, le secrétaire d’État américain, lors de son déplacement dans la région.

 Opération d’évacuation de 100 000 personnes dans l’est de Rafah

L’armée israélienne a entamé lundi l’évacuation temporaire d’environ 100 000 personnes résidant dans l’est de Rafah, les appelant à rejoindre des « zones humanitaires », selon l’AFP. « Nous avons commencé une opération d’ampleur limitée pour évacuer temporairement les personnes résidant dans l’est de Rafah », a ainsi confirmé un porte-parole de l’armée israélienne, lors d’un point de presse. « Les appels à bouger temporairement vers la zone humanitaire seront relayés par tracts, SMS, appels téléphoniques et messages en arabe dans les médias », indiquait un peu plus tôt un communiqué de l’armée.

Au sein de l’enclave palestinienne, l’espoir d’un répit n’a jamais semblé aussi lointain : la nuit dernière, l’armée israélienne a continué de semer la mort parmi les civils, faisant seize victimes au sein de deux familles à Rafah et ses environs.

L’armée israélienne a par ailleurs indiqué à l’AFP que trois de ses soldats avaient été tués et douze autres blessés dimanche par des roquettes tirées par la branche armée du Hamas autour de Kerem Shalom, principal point de passage de l’aide humanitaire depuis Israël vers la bande de Gaza. Les brigades Ezzedine al-Qassam ont revendiqué ces tirs, qui ont conduit Israël à fermer le passage utilisé pour acheminer l’aide vers Gaza, alors qu’une part croissante de la population est confrontée à une situation proche de la famine, selon des rapports de l’ONU. Des alertes face auxquelles le premier ministre israélien persiste à rester sourd. « Si Israël doit rester seul, Israël restera seul », a-t-il asséné.

 Bombardements sur Rafah et condamnations internationales

Si l’offensive terrestre, que préparent les ordres d’évacuation, n’a pas été lancée sur Rafah, l’armée israélienne a intensifié ses bombardements sur la ville du sud de la bande de Gaza. Ils « durent depuis la nuit dernière et se sont intensifiés depuis ce matin », a expliqué à l’AFP Ahmed Redwan, un porte-parole de la défense civile palestinienne, précisant que deux des quartiers visés — al-Shuka et al-Salam — figuraient parmi ceux que l’armée israélienne a demandé aux habitants d’évacuer.

Cet ordre d’évacuation « laisse présager le pire : davantage de guerre et de famine. C’est inacceptable. Israël doit renoncer à une offensive terrestre » à Rafah, a condamné le chef de la diplomatie de l’Union européenne Josep Borrell, ajoutant que « l’UE, de concert avec la communauté internationale, peut et doit agir pour empêcher un tel scénario ». La France a également rappelé lundi sa « ferme opposition » à une telle offensive israélienne et souligné que « le déplacement forcé d’une population civile constitue un crime de guerre au sens du droit international ». Mettant en garde contre « une catastrophe humanitaire annoncée » pour la population civile de Rafah, Berlin a exhorté « toutes les parties (à) faire un maximum d’efforts afin d’arriver à une situation où les habitants de Gaza peuvent être approvisionnés le mieux possible en biens humanitaires et où les otages peuvent être libérés ».

 Israël coupe le signal à Al-Jazzeera

La position inflexible du gouvernement israélien a trouvé une nouvelle illustration à travers sa décision de fermer le bureau en Israël de la chaîne Al-Jazeera, basée au Qatar. Le signal de la chaîne, qui accorde une large couverture à la guerre à Gaza, avait été coupé dimanche 5 mai et son matériel a été saisi, selon des informations recueillies par des journalistes de l’AFP, à Jérusalem.

Ses chaînes en arabe et en anglais d’Al-Jazeera ont affiché un message sur fond noir disant : « Conformément à la décision du gouvernement, la diffusion de la chaîne Al-Jazeera a été suspendue en Israël. » La chaîne a dénoncé une décision « criminelle ».

Le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme a également réagi à cette décision, en déplorant la fermeture de la chaîne qatarie en Israël, dans un contexte où les entraves s’accumulent dans le travail d’information à Gaza« La liberté d’expression est une clef des droits humains », a conclu l’HCDH.

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