Le tour de vis budgétaire imposé par Bercy n’épargnera pas le quotidien des personnes malades. Les patients devront désormais, pour les trajets entre l’hôpital et leur domicile, se résoudre à partager taxis sanitaires et ambulances… quitte à faire 30 km de détour, soit 10 km possibles par personne. C’est ce que stipule le projet de décret publié dans les prochains jours, selon les informations de franceinfo.
Considérant que « les petits ruisseaux font les grandes rivières », Bruno Le Maire s’était indigné, dans une interview accordée au Monde, de devoir « continuer à dépenser 5,7 milliards d’euros par an pour le transport médical des patients ».
S’il se soucie des « petites » économies, tout en refusant d’admettre la cure d’austérité imposée à la population, le ministre de l’Économie se montre peu regardant quant à l’ampleur de leurs effets sur le quotidien des personnes vulnérables, auxquelles cette mesure viendra ajouter son lot de contraintes.
Au-delà de la longueur des trajets, ce décret fait notamment l’impasse sur les conséquences d’une cohabitation dans un espace exigu de plusieurs personnes malades, en ne prévoyant aucune mesure barrière ni masques lors de ces voyages. Seul bémol : un avis du médecin spécifiant sur l’ordonnance une incompatibilité de l’état de santé du patient pourra lui épargner le transport partagé. Mais pour cette année, obligation sera tout de même faite d’avancer les frais.
« Vous créez un problème sur le transport médical des patients ! »
« Vous pensez franchement que c’est comme ça qu’on va résoudre les problèmes de notre société ? », s’était indigné le sénateur communiste Pascal Savoldelli, lors d’un échange tendu, en mars 2024 en commission des Finances, avec le ministre de l’Économie, qui avait tenté de justifier sa proposition sur le transport partagé, en affirmant : « Avoir vu des chefs de service, (…) des directeurs d’hôpitaux, (…) des responsables des services d’urgence qui en ont ras le bol de signer des bons de transport, et qui se disent, c’est de l’argent jeté par les fenêtres, qui serait plus utile pour acheter un scanner pour le CHU. »
Un argument « abscons » selon le sénateur communiste, qui lui avait rétorqué : « Vous divisez les gens en créant un problème sur le transport médical des patients ! »
Le nouveau dispositif avait également suscité une crispation générale de la part des professionnels du transport sanitaire, notamment les taxis conventionnés. Ces derniers avaient organisé en début d’année plusieurs opérations escargots sur les routes de France, en protestation contre cette mutualisation des trajets des patients médicalisés, qui les obligera à prendre plusieurs malades par course.
Inscrite dans l’article 30 de la nouvelle loi de finance de la Sécurité sociale, adoptée le 4 décembre dernier, cette loi vise à imposer des coupes sur le transport médicales dans le budget de la Sécurité sociale, à hauteur de 100 millions d’euros par an entre 2025 et 2027.
Les transports médicaux ont représenté des remboursements de près de 5,5 milliards d’euros en 2022, et 65 millions de trajets ont été réalisés sur l’année pour les seuls taxis et véhicules sanitaires légers (VSL), selon les chiffres mis en avant par les auteurs du texte de loi et relayés par l’AFP.
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