samedi 11 mai 2024

Reconnaissance de l’État palestinien : l’Espagne et Irlande pourraient franchir le pas le 21 mai

Les deux pays devraient être rejoints par la Slovénie, ce qui porterait à 12 le nombre membres de l’Union européenne ayant pris cette initiative. La Belgique et la Norvège pourraient aussi suivre.


 Le prochain 21 mai. Tout indique que c’est à cette date, jour de Conseil des ministres, que le gouvernement espagnol honorera l’engagement pris par son premier ministre, le socialiste Pedro Sánchez, de reconnaître l’État de Palestine.

L’information, avancée mercredi soir par la télévision publique irlandaise – autre pays qui devrait franchir le pas en même temps que l’État ibérique – a été confirmée le lendemain à l’antenne de Radio nationale espagnole par le chef de la diplomatie européenne. « Je le sais parce que le ministre (espagnol des Affaires étrangères José Manuel) Albares me l’a dit », a déclaré Josep Borrell, ajoutant que la Slovénie pourrait aussi rapidement avancer dans le même sens.

Le gouvernement slovène a effectivement annoncé ce jeudi qu’il enverrait la proposition de reconnaissance de l’État palestinien au parlement avant le 13 juin, contrairement à l’Espagne où Sánchez n’a pas besoin d’un vote au Congrès s’agissant d’une compétence exclusive du gouvernement. « Il y aura donc trois pays et probablement encore d’autres postérieurement, car la Belgique était déterminée à le faire, mais a retardé la décision préférant attendre la participation d’autres pays ».

La Moncloa n’a pour l’instant confirmé aucune date, mais Albares a bien corroboré que la décision « était prise », tout en précisant l’indépendance souveraine de son pays à propos de la reconnaissance de l’État palestinien et la réaffirmation que le gouvernement espagnol continuait à travailler avec d’autres pays européens pour y procéder de manière concertée, s’agissant d’une « question de justice et d’humanité ».

Sánchez, fer de lance de la cause palestinienne en Europe

Alors qu’aucun des pays moteurs de l’Union européenne ne figure parmi les neuf qui reconnaissent aujourd’hui officiellement l’existence d’un État Palestinien1, l’Espagne compte bien changer la donne et s’active depuis plusieurs mois à tirer l’Union européenne vers cette direction. Moins d’une semaine après avoir été réélu, mi-novembre 2023, Pedro Sánchez avait promis que le « premier engagement » de son nouveau gouvernement en matière de politique étrangère serait de « travailler à la reconnaissance de l’État palestinien ».

Des mots souvent suivis de prises de position et de paroles fortes, parfois prononcées yeux dans les yeux devant le premier ministre Benyamin Netanyahou comme le 23 novembre 2023, à Jérusalem, qui ont confirmé la place de l’Espagne comme un des pays les plus critiques à l’égard d’Israël au sujet des bombardements sur l’enclave de Gaza. Et ont provoqué plusieurs crises avec Tel-Aviv durant ces derniers mois.

Accompagné du ministre Belge Alexander De Croo, Sánchez – qui occupait alors la présidence du Conseil de l’UE – s’était rendu à Rafah (côté égyptien) le lendemain de sa rencontre avec Netanyahou pour y dénoncer « la tuerie indiscriminée de civils innocents, dont des milliers d’enfants » avant d’appeler à la reconnaissance de l’État Palestinien.

En mars dernier, il a annoncé qu’il impulserait cette reconnaissance au Congrès espagnol avant la fin de son mandat actuel, en 2027 – « par conviction morale (…) mais aussi parce que c’est la seule façon pour que deux États, Israël et la Palestine, puissent coexister et cohabiter dans la paix et la sécurité » – avant de raccourcir cette date au premier semestre de cette année.

« prêts à reconnaître la Palestine »

Fin mars, en marge d’un sommet à Bruxelles, Sánchez avait publié une déclaration commune avec ses homologues irlandais, maltais et slovène dans laquelle tous se disaient « prêts à reconnaître la Palestine ». Puis il s’était compromis auprès du président de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas en faveur de la reconnaissance de la Palestine en tant qu’État et de son entrée en tant que membre à part entière de l’ONU, une position officialisée le 22 avril sur X.

Après une tournée pour faire avancer ce dossier au sein d’une Union européenne (UE) très divisée sur la question – Pedro Sánchez s’était notamment réuni, aussi en avril, avec les dirigeants norvégiens, portugais, slovène et belge – le premier ministre espagnol s’est vu fortement épaulé par le premier ministre irlandais Simon Harris.

Ensemble, les deux chefs de gouvernement ont entrepris le projet commun de reconnaissance de l’état de Palestine tout en continuant la pression diplomatique au sein des différentes instances européennes. L’Espagne a aussi compté sur le soutien du Premier ministre norvégien, Gahr Store (dont le pays n’est pas membre de l’UE), pour faire de la reconnaissance de l’État de Palestine « le point de départ d’un processus de paix au Moyen-Orient ». Ce dernier n’a pas exclu que son pays franchisse le pas en même temps que l’Espagne.

Ces dernières semaines, plusieurs pays des Caraïbes (Trinité-et-Tobago, Bahamas, Jamaïque et Barbade) ont reconnu l’État palestinien, portant à 142 le nombre des 193 membres de l’ONU ayant franchi le pas, auxquels il faut ajouter le Saint-Siège (le Vatican), qui y dispose du statut d’État observateur, comme la Palestine.

Par ailleurs, suite au véto opposé par les États-Unis le 19 avril dernier au Conseil de sécurité à l’adhésion à part entière de la Palestine aux Nations unies, la candidature palestinienne a été soumise ce vendredi au vote de l’Assemblée générale. Celle-ci a adopté par une très large majorité (143 pour, 9 contre, 25 abstentions) une résolution qui recommande au Conseil de sécurité de réexaminer favorablement la question de l’adhésion de la Palestine.

  1. Ces pays sont la Bulgarie, Chypre, République tchèque, Hongrie, Malte, Pologne, Roumanie, Slovaquie – tous depuis 1988, la grande majorité en raison de leur ancienne appartenance à l’Union soviétique – et la Suède depuis 2014. ↩︎

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