Le 29 décembre 1920, à Tours, une majorité des délégués du XVIIIe Congrès de la SFIO vote l’adhésion du parti à la IIIe Internationale, l’Internationale Communiste, fondée à Moscou en mars 1919. Une minorité du parti s’y oppose. C’est la scission – et l’acte de naissance du Parti Communiste Français (Section Française de l’Internationale Communiste). Les débats politiques qui animaient le mouvement ouvrier français de l’époque sont toujours d’une grande actualité, 90 ans plus tard. Le programme et les idées fondamentales qui ont déterminé la scission de Tours n’ont rien perdu de leur force et de leur pertinence. Tous ceux qui veulent lutter contre le capitalisme ont intérêt à étudier cette période, et en particulier les textes fondateurs de la IIIe Internationale.
La faillite de la IIe Internationale
La scission de Tours ne fut ni un accident, ni une surprise. Partout, en Europe, la profonde crise de la social-démocratie donnait jour à des Partis ou des courants communistes qui cherchaient à rompre avec les dérives réformistes et opportunistes des dirigeants socialistes. Le Congrès de Tours fut la conséquence directe de deux événements grandioses : la Première Guerre mondiale et la Révolution Russe de 1917, ces deux bouleversements historiques étant eux-mêmes étroitement liés.
En 1905, sous l’impulsion de Jean Jaurès et Jules Guesde, le mouvement socialiste français s’unifiait dans un seul parti, la SFIO, membre de la IIe Internationale. Mais à peine neuf ans plus tard, en août 1914, quelques jours après l’assassinat de Jaurès, les dirigeants du parti succombaient à la grande épreuve de la guerre impérialiste. A l’exception des Bolcheviks russes et du petit Parti Socialiste serbe, toutes les directions des partis de la IIe Internationale rallièrent le camp de leur bourgeoisie nationale, à laquelle ils livrèrent les travailleurs pour qu’ils aillent tuer un maximum de leurs frères, sur les champs de bataille. Toutes les résolutions adoptées en Congrès Internationaux, les années précédentes, qui se prononçaient pour la « grève générale », en cas de guerre impérialiste, firent place à une virulente propagande patriotique et chauvine. En France, les socialistes Jules Guesde, Albert Thomas et Marcel Sembat entrèrent dans le gouvernement d’Union Sacrée. La direction de la CGT capitula, elle aussi. Lors des obsèques de Jean Jaurès, le 4 août 1914, le secrétaire général de la CGT, Léon Jouhaux, déclara : « je crie devant ce cercueil que ce n’est pas la haine du peuple allemand qui nous poussera sur les champs de bataille ; c’est la haine de l’impérialisme allemand ». Ainsi Jouhaux justifiait-il son soutien à l’impérialisme français, qui n’était pourtant pas moins réactionnaire et haïssable que l’impérialisme allemand.
La dégénérescence de la IIe Internationale reposait, en dernière analyse, sur la longue phase de croissance économique qui précéda la Première Guerre mondiale. Les classes dirigeantes étaient en mesure de faire des concessions à la classe ouvrière, et en particulier à ses couches supérieures. Graduellement, presque imperceptiblement, un fossé se creusait entre les conditions de vie, les aspirations et la psychologie de la masse des travailleurs – et celles de la mince couche d’officiels (dirigeants syndicaux, parlementaires, etc.) qui formaient les sommets du mouvement ouvrier. La routine syndicale et parlementaire absorbait et émoussait les esprits. Certes, les dirigeants parlaient encore de « révolution socialiste », mais surtout les jours de fête. Des théories révisionnistes émergeaient qui s’efforçaient de donner une base doctrinale à l’abandon des idées marxistes. Le cas le plus connu est celui du théoricien réformiste allemand Edouard Bernstein, auquel Rosa Luxembourg répliqua avec vigueur dans son livre : Réforme ou révolution.
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