17 octobre 2011. Il y a cinquante ans, les forces de police, agissant sous les ordres du préfet Maurice Papon, se livraient à une véritable chasse à l'homme: plus de 14000 manifestants, qui s'étaient rassemblés pacifiquement à l'appel du FLN pour protester contre le couvre-feu raciste qui leur était imposé depuis le 5 octobre, furent arrêtés -presque un sur deux-, frappés souvent et détenus parfois pendant plusieurs jours.
En français, n'en déplaise à ceux qui ont longtemps usé ou usent encore d'un langage délicatement euphémisé dès qu'il s'agit d'atténuer les exactions commises par l'Etat français au cours de cette période, de telles pratiques portent un nom précis: rafles. Par leur ampleur et les moyens matériels et humains mobilisés pour les mener à bien, ces rafles, soigneusement préparées et qui s'étendent sur plusieurs jours, sont sans précédent depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale.
Décidées à tout faire pour interdire une démonstration de force des Algériens à Paris et en banlieue, les autorités politiques et policières ont en effet mis en place un imposant dispositif répressif, réquisitionné plusieurs lieux dont elles savaient avoir besoin pour parvenir à leurs fins, sans oublier les bus de la RATP dans lesquels les manifestants furent entassés et battus avant d'être rassemblés dans différents centres de détention de la capitale et de la région parisienne.
Sans précédent aussi, le nombre de personnes assassinées à Paris au cours de ces journées d'octobre, puisque les forces de l'ordre commirent un véritable massacre; au vrai, le plus important de l'après-guerre perpétré à l'encontre de civils puisque le nombre de victimes s'élève à plusieurs centaines. Aucune, par contre, du côté des forces de l'ordre, qui n'ont pas essuyé un seul coup de feu contrairement aux rumeurs forgées et colportées par la police elle-même pour justifier les exécutions sommaires au moment même où elles se déroulaient.
Des hommes furent tués par balles, d'autres froidement assassinés dans la cour même de la préfecture de police de Paris, certains jetés vivants dans la Seine ou encore frappés à mort après leur arrestation et leur transfert au palais des Sports, au parc des Expositions et au stade Coubertin devenus, pour l'occasion, autant de lieux de détention. Là, dans des conditions effroyables, des milliers de «Français musulmans d'Algérie» furent parqués, battus et longtemps laissés sans nourriture et sans soin au milieu des excréments qui s'accumulaient. Quoi qu'ils fassent, les policiers se savaient couverts par le préfet qui, peu de temps auparavant, leur avait tenu ce langage: «Pour un coup reçu, nous en porterons dix.»
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