Interview - Alors que les députés débattent mardi d'une proposition de loi sur la justice des mineurs et l'introduction de jurés en correctionnelle, Jean-Pierre Rosencsveig, comme nombre de professionnels de la justice, dénonce une "véritable entreprise de démolition" d'un dispositif "performant" et en appelle au Conseil constitutionnel pour réagir.
F1 News : Déjà voté au Sénat, le texte sur la réforme de la justice des mineurs va être débattu à partir de ce mardi à l'Assemblée nationale. Un texte qui suscite une vive inquiétude de la part d'un grand nombre de professionnels de la Justice et de l'enfance. Pourquoi ?
Jean-Pierre Rosenczveig, président depuis 1993 du Tribunal pour enfant de Bobigny : Le premier élément de réponse est que cette réforme ne s'imposait pas. Loi sur loi n'ajoute rien. On a déjà fait 70 réformes de l'ordonnance de 1945. La dernière date du 11 mars 2011 et elle n'a même pas encore été publiée qu'on nous en sort déjà une autre. On voit bien que tout cela n'a rien à voir avec des besoins que l'on aurait. C'est juste que nous sommes en période préélectorale. Et contrairement à ce qui est dit, il n'y a pas une aggravation de la délinquance des mineurs telle que cela justifierait un nouveau projet de loi. Et, qui plus est, que les parlementaires doivent étudier en procédure d'urgence comme si nous étions dans une situation catastrophique. Cela est fait pour éviter les débats.
Enfin, pour répondre fondamentalement à votre question, ce texte est un véritable coup de poignard donné dans le dos du juge pour enfant puisqu'on vient nous dire qu'un adolescent de 16 ans est presque un majeur et qu'il doit désormais être jugé par un tribunal correctionnel pour mineur. Or, il faut continuer à intervenir auprès de ces jeunes. Si les professionnels sont vent debout c'est parce que cette réforme est une véritable entreprise de démolition du dispositif que nous avons mis des années et des années à construire. Un dispositif qui est relativement performant puisque le rapporteur du texte au Sénat a lui-même souligné que dans 86 à 87% des cas un jeune qui est délinquant pendant sa minorité ne l'est plus, une fois majeur, grâce à notre travail. Alors pourquoi nous casser tout un système pour les quelques pourcents les plus durs ?
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