Par Nasser Mansouri Guilani, responsable du pôle économique
de la CGT
Dans la société capitaliste, le capital ne représente pas
une chose, un objet, mais bien un rapport social. Par conséquent, la
rémunération du capital dépend des rapports de forces entre le capital et le
travail et de l’évolution du système. La phase actuelle du développement du
capitalisme, appelée « capitalisme financiarisé », se caractérise par une
ponction de plus en plus forte des valeurs créées par les travailleurs au
profit des actionnaires qui se comportent comme des financiers. Contrairement
au postulat libéral, le développement des marchés financiers ne permet pas de
réduire le coût du capital, au contraire. Lorsqu’on fait la somme des intérêts,
des dividendes et des rachats d’actions, on arrive à un coût nettement plus
élevé. Ainsi, le montant des dividendes versés comparé à la valeur ajoutée a
été multiplié par quatre depuis trente ans.
Dans leur étude (1), les chercheurs du Clersé de
l’université de Lille-I introduisent la notion de « surcoût du capital »,
estimé à 100 milliards d’euros. En dépit de ses vertus analytiques et
pédagogiques, cette notion mérite clarification. Certes, les valeurs créées par
les travailleurs ne peuvent pas leur être attribuées totalement. Il faut
affecter une partie au renouvellement et au développement des capacités productives
et au financement des biens et services publics. Mais la rémunération du
capital relève d’une logique d’exploitation : au nom de « l’esprit
d’entreprise » et des risques associés, les propriétaires et actionnaires
revendiquent un prélèvement sur les valeurs créées par les travailleurs. Or,
une caractéristique majeure du capitalisme financiarisé est que le risque est
reporté sur les travailleurs, alors que la rémunération du capital devient de
plus en plus onéreuse. Ce renchérissement du coût du capital est systémique,
inhérent au capitalisme financiarisé. Il représente les conditions
d’exploitation des travailleurs aujourd’hui. En d’autres termes, le surcoût du
capital fait partie intégrante du coût du capital dans une économie
financiarisée.
Il ne suffirait pas de reprendre le surcoût du capital et de
le redistribuer pour mettre fin à la financiarisation.
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