par Olivier Pironet
Edson Arantes do Nascimento, dit Pelé, ancienne gloire
brésilienne du football, ambassadeur international de la Coupe du monde 2014 et
de la marque Coca-Cola, a récemment jugé « normale » la mort d’un ouvrier sur
le chantier du nouveau stade de São Paulo, le 24 mars (1). L’ex-meneur de jeu
français Michel Platini, désormais président de l’Union des associations
européennes de football (UEFA), a enjoint aux Brésiliens d’« attendre un mois
avant de faire des éclats un peu sociaux (2) » alors que perdure un mouvement
de contestation lancé en mars 2013 contre les dépenses engagées pour le tournoi
au détriment des services sociaux, de la santé et de l’éducation...
Ces propos emblématiques témoignent du mépris des
représentants du football mondial pour les conséquences de raouts sportifs tels
que la Coupe du monde, organisée sous l’égide de la Fédération internationale
de football association (FIFA), comme l’explique l’ouvrage collectif La Coupe
est pleine ! (3).
Déclarée en Suisse en tant qu’association à but non
lucratif, la FIFA s’apparente davantage, selon les auteurs, aux « holdings
transnationales ou [aux] cabinets d’affaires (...) gé[rant] le capital sportif
et sa marchandisation » : 998 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2013,
52,2 millions de ce que la FIFA même appelle des bénéfices, plus de 1 milliard
de réserves financières. Peu lui importe qu’en Afrique du Sud, hôte de
l’édition 2010, la dette extérieure soit « passée de 70 milliards de dollars
[50,3 milliards d’euros] (avant la Coupe du monde) à 135 milliards de dollars
[97 milliards d’euros] aujourd’hui ». Les surcoûts liés à l’organisation de la
compétition atteignent 1 709 % ! Pretoria a réduit de façon drastique les
programmes sociaux, alors que 52 % des habitants vivent sous le seuil de
pauvreté. La FIFA, quant à elle, a engrangé 2,7 milliards d’euros pour cette
édition.
Au Brésil, alors que le budget prévisionnel de
fonctionnement programmait 800 millions d’euros de dépenses, essentiellement à
la charge du privé selon le gouvernement, les frais dépassent déjà les 2,6
milliards, et l’ardoise sera principalement réglée par le contribuable, comme
pour les investissements : « 78 % des dépenses d’infrastructures pour la Coupe
du monde de 2014, estimées à 18 milliards de dollars [13 milliards d’euros],
sont financées par le secteur public », indique l’ouvrage. Comme en Afrique du
Sud, les autorités procèdent à des expulsions et des expropriations massives.
Près de deux cent mille personnes ont été déplacées à ce jour. La «
pacification » des favelas par la police s’est intensifiée. De janvier à
septembre 2011, plus de huit cents personnes ont trouvé la mort dans le cadre
des opérations de « nettoyage »...
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