L’entreprise a transféré 19,9 milliards d’euros de bénéfices dans le paradis fiscal pour échapper à l’impôt. Fabien Roussel, qui dénonce la complicité de l’Union européenne, conduira demain une délégation du PCF au siège de Google France.
D’habitude, les bandits multiplient les braquages avant de filer sur une île déserte. Google, de son côté, se livre à des allers-retours permanents. En 2017, le géant du numérique a transféré 19,9 milliards d’euros de bénéfices réalisés aux États-Unis et en Europe vers les Bermudes, pour les soustraire à l’impôt. Un chiffre en progression, puisque les montants évadés pour la même opération étaient de 12 milliards d’euros en 2014, de 15,5 milliards en 2015 et de 15,9 milliards en 2016. Ce qui commence à faire « un pognon de dingue »... Google n’est d’ailleurs pas seul à jouer aux flibustiers fiscaux. En 2012, les multinationales américaines ont déclaré 80 milliards de dollars de bénéfices dans le seul paradis fiscal bermudien, soit plus que ceux déclarés au Japon, en Chine, en Allemagne et en France cumulés, d’après un calcul de l’Organisation des Nations unies.
Pour y parvenir, ces groupes utilisent la technique dite du « double irlandais » et du « sandwich hollandais ». La firme californienne passe par des filiales dans ces pays et une foule de holdings pour ne pas s’acquitter de l’impôt de façon légale. « Les failles juridiques sont béantes. C’est du vol organisé, de la délinquance en col blanc. C’est légal uniquement parce que l’Union européenne (UE) accepte d’être complice de ces montages. La responsabilité de la Commission européenne et de tous les chefs d’État est énorme », s’indigne Fabien Roussel, secrétaire national du PCF. Le député du Nord, membre de la commission des Finances de l’Assemblée nationale, se rendra demain midi avec une délégation du PCF au siège de Google France, à Paris. « Nous voulons rencontrer le PDG de Google France et lui réclamer des comptes. Il aura beau répondre que c’est légal, il rompt le pacte républicain. Google doit respecter notre pays, nos lois et payer, comme toutes les entreprises françaises, les différents impôts et taxes dus en France. Indépendamment des failles de la législation, il est inadmissible qu’une telle entreprise délocalise ses bénéfices dans des paradis fiscaux », assène l’élu.
Face à la fraude et à l’évasion fiscales, les gouvernants avancent au ralenti
Si le fléau de la fraude et de l’évasion fiscales coûte 100 milliards d’euros par an à la France et 1 000 milliards d’euros par an à l’UE avec un impact gigantesque sur les finances publiques et nos vies quotidiennes, les gouvernants actuels avancent au ralenti. Le ministre de l’Économie et des Finances, Bruno Le Maire, souhaite ainsi mettre en place une taxe de 500 millions d’euros sur les Gafa. « C’est peanuts ! Ce qu’il faut, c’est le prélèvement à la source de l’impôt des entreprises du numérique sur tous leurs bénéfices. Il faut définir clairement leur entité juridique et les imposer comme les autres. Il est par exemple incompréhensible que leur taux d’imposition soit de 8 %, contre de 15 % à 31 % pour les PME européennes », insiste Fabien Roussel. Le parlementaire plaide aussi pour une véritable liste noire des paradis fiscaux, au motif que « l’actuelle est bidon. On y trouve des îles d’Océanie dans lesquelles ces multinationales ne mettent pas un pied. Par contre, le Luxembourg, l’Irlande et la Hollande n’y figurent pas au nom du respect des pays membres de l’UE. Une preuve de plus que les traités actuels sont caducs et à réécrire profondément ».
En attendant, l’Irlande a décidé en 2014 de mettre un terme au « double irlandais » en 2020. D’ici là, Google compte bien faire un dernier coup. Avant de chercher une nouvelle faille…
Aurélien Soucheyre
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