Une tribune du philosophe Yvon Quiniou. J’apprends par l’Humanité
du 1er septembre que Manuel Valls se réclame d’un « réformisme assumé
et d’une République intransigeante ». Laissons de côté la République,
qu’il met à mal, et contentons-nous de parler de son «réformisme». Car
c’est là une imposture sémantique, comme on dit, laquelle ne le
caractérise pas lui seulement, mais caractérise la majeure partie de la
classe politique et les médias dominants, auxquels l’Humanité
fait heureusement exception. Car il faut préciser une chose essentielle,
dont la méconnaissance contribue à la confusion des débats à ce sujet :
il y a en réalité trois réformismes.
Le premier est un réformisme de la méthode : on maintient la fin,
celle d’une transformation révolutionnaire, c’est-à-dire complète, du
système capitaliste, mais on décide de la faire par des réformes
successives, accompagnées en permanence par la sanction du suffrage
universel, donc sous une forme démocratique : c’était la position de
Jaurès, partisan du communisme, il faut le rappeler, mais partisan aussi
d’un « évolutionnisme révolutionnaire » dont l’idée lui a été inspirée,
on ne le sait pas assez, par Marx lui-même préconisant, en matérialiste
conséquent hostile à l’utopie, dès 1852, des « évolutions
révolutionnaires » pour aller au communisme, et dont Engels, à la fin de
sa vie, était le ferme et lucide soutien. Il peut donc y avoir, et je
le dis, il doit y avoir un réformisme révolutionnaire, dont les partis
communistes occidentaux ont été objectivement partie prenante, comme le
PCF en 1936, en 1946 ou en 1981, même si leur objectif réel n’a pas été
atteint, loin de là.
Mais il y a aussi un réformisme de la fin : on refuse de changer le
système social, capitaliste en l’occurrence, mais on entend malgré tout
l’améliorer de l’intérieur, par des réformes progressistes (j’y insiste)
visant à apporter un « mieux » au monde du travail dans toute une série
de domaines : niveau de vie, droits sociaux, libertés politiques (comme
le droit de vote accordé aux femmes), réduction des inégalités de
richesse par l’impôt, etc.
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